[Le Vent de la Montagne] - Hongjoong X Seonghwa

Se faire connaître

Seonghwa avait fini par se faire un avis sur le nouveau venu. Certes, au début, il avait été un peu confus à son apparence. D'abord, il s'était dit qu'il était un enfant de riche qui s'était payé une maison de vacances, même si ce n'était pas le meilleur endroit pour. Mais le temps passant, il avait remarqué la bergerie retrouver sa gloire d'antan, jusqu'au jour où sous ses yeux médusés, des moutons s'étaient mis à gambader dans la prairie, comme du temps de l'ancienne propriétaire. Toutes les lettres étaient à un seul nom, donc le frêle garçon qui lui ouvrait la porte à chaque visite était celui qui avait accompli tout ce travail. Et ce genre de détermination, ça forçait le respect.

    Quelque part au fond de lui, une voix lui soufflait qu'il n'avait pas exactement besoin de frapper à sa porte. Bien sûr, en règle générale il préférait dire bonjour et prendre des nouvelles des gens. Les habitants de la vallée attendaient son passage et étaient les premiers à le saluer. Mais pour Hongjoong, il l'avait entendu plusieurs fois abandonner une activité pour ouvrir la porte, et il ne renonçait que quand il le voyait au loin, en train de s'occuper de ses bêtes à l'aube. Il avait une boîte aux lettres comme tout le monde. Ça ne lui coûterait rien de juste mettre ses lettres, et partir. Rien... Sauf une interaction.

    Et donc, encore une fois, il frappa à la porte, un sourire déjà sur son visage. Et quand Hongjoong apparut devant lui, son sourire était un parfait reflet du sien. Ils échangèrent quelques mots, recréant leur scène habituelle, jusqu'à ce que le berger brise leur routine en lui tendant des prospectus. Curieux, Seonghwa lui prit des mains, regardant rapidement de quoi il s'agissait. C'était une sorte de publicité pour son commerce. Comprenant subitement ce qu'il voulait, il rangea ses annonces dans sa besace, lui lançant un clin d'œil complice.

    "Normalement, il faut payer des frais pour ça. Mais on va dire que je te fais un prix d'ami comme cadeau de bienvenue !"

    Hongjoong eut immédiatement l'air de paniquer.

    "Oh, je-"

    "Pas de mais !  Ça me fait plaisir de te donner un coup de main, tu te donnes assez de mal comme ça. Je distribuerai ça demain au village."

    "Merci, ça m'aide beaucoup", soupira-t-il, soulagé.

    "Cela dit, tu aurais probablement de meilleurs retours si tu allais directement leur parler de ton affaire", suggéra-t-il, pensif. "Quand je parle de toi aux commerçants, ils n'ont même pas l'air de savoir que tu existes."

    "Ah, je..." ses yeux devinrent subitement fuyants, trahissant son anxiété. "Oui, tu as sans doute raison..."

    "Oh, tu es timide c'est ça ? Ils sont gentils ici, tu sais.", tenta-t-il de le rassurer. "Bon, je garantis pas pour tes cheveux. Mais ça ira avec le temps !"

    "Je n'aurai qu'à porter le chapeau, ça diminuera... le choc visuel ?" rit-il nerveusement.

    Son cœur se serra un peu. Il n'avait pas réellement pris le temps de le considérer jusqu'ici, mais ça devait être effrayant d'emménager dans un petit village perdu sans y connaître personne. S'il s'imaginait arriver en ville, avec tous ces inconnus, il ne savait pas vraiment comment il s'y prendrait. Il aurait probablement apprécié d'avoir quelqu'un là, qui pourrait l'aider avec ses premiers pas. Hongjoong n'avait personne. Ses journées devaient être... si solitaires. Passer du temps seul était bon pour les introvertis, mais la solitude... C'était autre chose. Et lui... il avait l'air seul.

    "... Tu sais quoi ? Si jamais tu as besoin de compagnie, dis-le moi. Je n'ai plus grand-chose à faire après le matin, on pourrait faire un peu de randonnée si ça te tente."

    Il ne s'y attendait pas, mais les yeux du garçon s'agrandirent, soudainement parsemés d'étoiles.

    "Oh je... Oui ! Avec grand plaisir !" s'exclama-t-il, ses poings se serrant comme s'il s'accrochait physiquement à l'invitation.

    Les étincelles dans ses yeux le parcoururent, lui donnant une énergie nouvelle. Il n'était pas sûr de pourquoi, mais avec ces quelques mots, son futur avait déjà l'air différent. meilleur.

    "Je compte sur toi pour me faire signe, alors", salua-t-il en se retournant, un signe de sa casquette en tant qu'au revoir.

    Il mit un pied sur la pédale de son vélo, se laissant glisser vers le chemin hasardeux de la descente.  Le vent frais fouettait son visage, vivifiant ses poumons. C'était une belle journée qui commençait.

    Le lendemain, il commença sa tournée, comme d'habitude, avec le boulanger, le croisant alors qu'il se rendait à la boulangerie, le soleil réduit à une suggestion bleutée à l'horizon. Il le héla avec un sourire, mettant un pied à terre avant de fouiller dans son sac, joignant un prospectus à son courrier.

    "Eh bien, qu'est-ce que nous avons là", s'étonna-t-il en remarquant le papier inhabituel.

    "Le nouveau propriétaire de la bergerie de Eunha. Il essaye de lancer son affaire !"

    "Ah, le petiot de la ville. J'l'ai pas encore vu. Qu'est-ce qu'il peut s'y connaître en bétail ? Je te l'dis, moi, y va pas faire long feu."

    "J'ai vu tout ce qu'il a fait depuis son arrivée, et vraiment, il a l'air de tenir le bon bout. En plus de ça, il est très poli. Juste un peu timide, c'est tout ! Je pense qu'il est venu parce qu'il a du mal avec les gens, ça veut pas dire qu'il sait pas s'occuper des bêtes."

    "Tu penses qu'il est capable, ce gosse ?"

    "Oui, définitivement", assura-t-il.

    Monsieur Kim fronça les sourcils, pensif, puis rangea le prospectus dans sa poche avec un haussement de sourcils.

    "Si tu l'dis, c'est qu'ça doit être vrai. S'il a du lait j'lui pass'rai commande."

    "Merci, je suis sûr qu'il sera ravi ! Passez une bonne journée !"

    "De même gamin !"

    Et Seonghwa reprit sa route, déterminé à convaincre tout le village.