Things were all good yesterday
And then the devil took your memory
And if you fell to your death today
I hope that heaven is your resting place
Afire love
Je ne fais pas dans les disputes. Je m'énerve rarement, je ne crie jamais, et mon répertoire d'insulte n'est clairement pas aussi fourni que celui du L. Ma technique, c'est de faire semblant d'être d'accord avec toi et de disparaitre plusieurs jours voir toujours. Ken le sait. Il me connaît.
Il sait que je ne vais pas me mettre à hurler dans ce salon d'essayage. Mais il sait surtout que si je m'en vais maintenant, il a y a de grande chance pour que je ne lui adresse pas la parole pendant un long moment. C'est une bataille entre mes instincts. Celui qui veut s'en aller, celui qui refuse de partir. Partir sans explication. C'est la main de Ken posée sur mon bras, qui met fin au duel. Même si je faisais le choix de partir, elle m'empêcherait de le faire.
-Dinah, sa main sur mon bras glisse jusqu'à mon épaule.
Je sens les larmes monter à mes yeux. J'en ai trop marre, j'ai l'impression de ne faire que pleurer ces derniers temps
-Pourquoi est-ce que tu fais ça ? ma voix tremble alors que je mets fin au contacte qui nous lie, je ne veux pas qu'il me touche.
-Pour toi.
Sa réponse m'intrigue. Suffisamment, pour que je n'ai pas le réflexe de reculer lorsqu'il s'approche de moi. Il profite de cet instant d'hésitation pour saisir mon visage. Je n'ai pas d'autre choix que de le regarder dans les yeux. Il y a une confiance qui se dégage de lui. Un éclat d'assurance, dont je ne comprends pas la source.
-Fais moi confiance Dinah, je vais tout arranger, je te l'ai promis.
Ses pouces se glissent sous mes lunettes pour débarrasser mon visage des larmes qui ont commencé à couler. Il dépose un baiser sur mes lèvres. Mon rythme cardiaque ralenti. Il est exactement comme une drogue. La solution aux problèmes dont il est la cause. Mon corps se détend alors qu'il me prend dans ses bras. Alors qu'il me murmure à l'oreille de lui faire confiance. Juste un peu plus longtemps. Parce qu'il me l'a promis. Il m'a promis d'arranger les choses.
Son contact est aussi bon qu'il est insupportable. Son odeur m'apaise et me dégoûte, tout à la fois. J'ai besoin d'espace. De calme. D'être loin de ce magnétisme qui m'attache toujours plus à lui. Je finis par m'éloigner :
-Je dois y aller, ma voix n'est pas sûre, elle tremble de toutes les émotions que je ressens.
-Fait-moi confiance, répond t-il alors que je m'éloigne encore un peu plus. Regarde la prestation de ce soir, s'il te plaît.
J'attrape mes affaires sans lui répondre et sans jeter un regard aux garçons. J'ai besoin de partir. Je fais le chemin en sens inverse pour sortir de la maison de haute couture. Tout est flou autour de moi. Je ne sens plus froid, je n'entends pas Mariah Carey qui passe dans les enceintes de la ville. Il faut que je m'éloigne.
Dans ma voiture, mon reflet dans le rétroviseur fait peur à voir. Mes yeux sont rouges, mes mains tremblent. Je me penche en direction du siège passager pour ouvrir la boite à gant. J'attrape la plaquette de médicament qui se trouve dedans. J'en avale un avant de fermer les yeux et de décider d'en avaler un autre. Rapidement, le calme se fait à nouveau dans mon esprit. Mes mains arrêtent de trembler, mon cœur retrouve un rythme normal.
Je prends une grande inspiration. Mon téléphone me rappelle que j'ai rendez-vous avec l'avocat/conseillé financier de Marc. Apparemment avoir vingt-cinq ans ne suffit pas. J'ai des papiers à signer concernant le trust-found ainsi qu'un testament à établir. L'ironie me fait sourire. Moi qui pensais ne pas avoir à me soucier de cet argent jusqu'à ma mort, je dois déterminer ce que cet argent va devenir si je devais mourir.
-Madame Duval.
En entrant dans les bureaux, la sensation d'être un dignitaire étranger me saisit aux tripes. Je ne cache pas venir d'une famille fortunée. Mais je ne fais pas non plus un étalage ostentatoire de cette richesse. Le plus souvent, les gens ignorent mon statut d'héritière, jusqu'à ce que je leur en fasse part. Je n'ai pas l'habitude d'être traité avec autant de déférence. Sauf lorsque je suis en présence de Marc.
Je fais un sourire à la secrétaire. Elle semble étonnée de ma réaction. Ça me fait mal au cœur pour elle. Intimement convaincu, qu'on la regarde de haut tout au long de sa journée, je lui demande comment elle va en gardant mon sourire. Un sourire peut sauver une vie ou au moins une journée. Elle me répond qu'elle va bien avant de m'indiquer que monsieur Lalande ne devrait pas tarder à me recevoir.
La salle d'attente n'est pas grande. Un parquet en bois précieux, des fauteuils en cuir. Ça put le fric. Je ne suis pas à mon aise. J'ai jamais véritable réussi à m'intégrer dans ces milieux. En premier lieu à cause de la couleur de ma peau, en second à cause de ma personnalité. Je suis bien trop douce.
Monsieur Lalande apparaît avant que je n'ai le temps de m'asseoir, il me tend une main que je sers avant de me conduire dans ce qui semble être une salle de réunion. Je prends place dans la chaise qu'il m'indique alors que les deux types déjà présent me dévisagent.
-Madame Duval, c'est vraiment un plaisir de vous recevoir parmi nous, commence monsieur Lalande en lissant sa cravate avant de s'asseoir. Je vous présente mes associés, maître Pinto et maître Thauvin.
Des avocats. Je comprends que j'ai pris du grade. Beaucoup de grades, pour qu'ils soient trois à une réunion qui ne leur permettra pas de gagner de l'argent.
Mon corps se détend un peu plus. Ce sont les pilules qui font effet, d'ici une petite demie-heure je ne serait plus vraiment en état de comprendre ce qui se passe autour de moi. Pour l'instant, rien n'a vraiment d'importance et surtout pas ce qu'ils me racontent. Je signe les papiers qu'ils déplacent dans ma direction sans y prêter attention. Ce sont les avocats de Marc. Je suis sûr qu'il a lu ses papiers avant qu'ils ne me les présentent.
Puis vient la question qui fâche. Celle de mon testament. Puisque je n'ai pas d'enfant, tout ce que je possède doit revenir à Marc, sauf si je fais le choix d'ajouter des tiers dedans.
-Marc n'a pas besoin de cet argent.
C'est la première fois que j'ouvre la bouche. Ils ont l'air étonné. Je suppose qu'ils ont également un testament qu'ils pensaient me faire signer avant de me mettre très poliment à la porte. Sauf que Marc n'a pas besoin de cet argent.
-Je veux tout donner à des associations, du genre qui protègent les animaux ou les enfants.
-Oui bien sûr, c'est une possibilité, mais ...
-Pas tout finalement, je l'interromps très peu intéressée par ce qu'il s'apprête à me dire. Je suppose que les gars peuvent avoir une partie de cet argent et Inès de mon appartement, le sien est minuscule, je lève les yeux au ciel un instant avant de reprendre. Marc peut avoir ma collection de vinyles et mes droits d'auteur. Je crois qu'on à fait le tour.
-Il faudra mettre tout ça part écrit et voir un notaire.
J'hausse les épaules avant de commencer à me lever. Ce n'est pas que parler de ma mort est un peu déprimant, mais un peu quand même. En vrai, il y a bien pire que la mort. Je pourrais me retrouver dans un état végétatif pendant des années avant que quelqu'un se décide à me débrancher. Je m'arrête. Il n'est pas question que je me retrouve dans un tel état.
-Le truc DNR qu'on voit à la télévision s'est un vrai truc ?
Monsieur Lalande semble mal à l'aise. Je viens de toucher un point sensible. Il n'ignore rien de mes antécédents, mais ça n'a rien à voir. Je vais bien maintenant. Ce n'est pas pour autant que je veux rester brancher à une machine.
-L'interdiction de réanimation existe, reprend celui présenté comme maître Thauvin. Mais en principe, c'est pour les personnes gravement malade.
-Donc je ne peux pas en avoir une ?
-Techniquement si, mais il faudrait en parler avec votre médecin traitant.
-Parfait faite ça, et une carte du don d'organe aussi, au cas où.
Cette fois, je sors véritablement du cabinet. J'ai faim. Vraiment, et la boite de quinoa dans mon placard ne me tente pas plus que ça. C'est à l'instinct que je passe au driving in du burger king le plus proche de chez moi. Le calme de mon appartement m'étonne un instant avant que je ne me rappelle des MTV Award.
Masque blanc.
Je ne comprends pas. J'aimerais faire confiance à Ken sans avoir à y penser deux fois, mais ce n'est pas le cas. Comment est-ce que dans son esprit ça peut-être une bonne idée de faire cette chanson après tout le drame qu'a crée l'histoire de la jaquette ? Ça n'a pas de sens. Il aurait dû me promettre de plus jamais la jouer en publique, il aurait dû faire en sorte que le monde entier oublie jusqu'à son existence. Je veux oublier son existence. C'est plus facile comme ça. Toutes les excuses du monde ne retirerons jamais ce qu'il a fait. Donc ouais ça n'a pas de sens qu'il fasse le choix de jouer cette chanson.
Ils viennent de sortir un album entier. Ce n'est pas comme s'ils n'avaient pas d'autre choix. Je dépose le sac du Burger King sur la table de la cuisine avant de retirer mes talons et mon manteau.
De Drama Queen :
Je pars à la soirée avec le S, fais-moi confiance.
Par réflexe je retourne le téléphone et le pose sur la table de manière à ce que l'écran ne soit pas visible. Je pratique la fuite en avant depuis tellement longtemps que je ne le réalise pas immédiatement que c'est ce que je suis en train de faire. Ne pas répondre, disparaître, c'est mon mode opératoire, chaque fois que je suis face à une émotion un peu trop forte.
Clairement le s-crew qui interprète masque blanc au MTV music award c'est le genre d'émotions auxquelles j'ai du mal à faire face.
Je suis face un dilemme. Faire confiance ou ne pas faire confiance. Répondre ou ne pas répondre. C'est beaucoup plus simple à dire qu'à faire. Les minutes défilent. C'est autant de minutes pendant lesquelles je ne réponds pas. Autant de minutes pendant lesquelles Ken doit regarder son téléphone dans l'attente que je lui réponde.
Une chose à la fois Dinah, ce n'est pas la peine de tout mélanger. J'ai eu raison de prendre les pilules. C'est ce qui me permet de faire encore usage de mon cerveau. Pourtant, malgré les anxiolytiques, je peux sentir la boule presser mes entrailles. Je devrais peut-être en prendre des plus fort.
Je sais exactement ce que je dois faire pour me débarrasser de la boule. Alice m'avait prévenu, si je dois être dans une relation avec Ken, je dois m'y engager pour de vrai il n'y a pas de retour en arrière. Je dois affronter toutes les émotions qui en découlent, même celles qui me plaisent le moins.
J'espère ne pas le regretter. Je pousse un soupire la tête plongée dans mes mains. Je déteste les regrets, je préfère les remords.
À Drama Queen :
Je te fais confiance.
Et puis j'ai toujours la phase B de mon plan diabolique. Je vais le faire. Je veux le faire. L'idée, c'est de réveiller sa curiosité. Rien de vulgaire, juste suggestif. Et surtout sans mon visage. Mon but dans la vie ce n'est pas de finir sur revenge porn. Après un instant de réflexion, je choisis de lui envoyer une photo de mes jambes. Sensuelle mais pas vulgaire. Sa réponse ne se fait pas attendre.
De Drama Queen
Sorcière
À Drama Queen
C'est pour ça que tu m'aimes.
De Drama Queen
Ça et plein d'autres raisons
Mon cœur loupe un battement. Il ne l'a jamais redit depuis la soirée à son appartement. Je me souviens parfaitement lui avoir répondu qu'il ne m'aimait pas. Et oui, je sais part sms et de manière détournée ça ne compte pas vraiment. Mais ça n'empêche pas mon cœur de battre un peu plus vite.
Je décide de lui envoyer une nouvelle photo. Une, un peu plus suggestive, je prends rapidement en photo une partie de mon décollette. La photo montre plus mon soutien-gorge que ma peau, mais j'en suis suffisamment satisfaite pour l'envoyer. Je m'affale sur le canapé et allume la télé sur MTV l'émission a commencé, mais les garçons n'ont pas encore fait leur apparition.
Il ne répond pas. Avant ce soir, je ne savais pas à quel point, c'est agaçant de ne pas avoir de réponse à un sms. C'est le Karma qui me punit.
Comme prévue, l'émission n'est pas terrible du coup, je ne la regarde qu'à moitié. Je continue mon envoi régulier de photo à Ken. Rien de vulgaire simplement sexy. Un autre bout de mon soutien-gorge, le bas de mon corset. Messages auxquels il ne répond pas.
Je commence à le détester. C'est super agaçant. Qu'est-ce qu'il peut bien faire de si important pour ne pas répondre. Surtout, que je sais qu'il a vu les messages. Le vu apparaît dans la minute qui suit l'envoie. Je déteste ce type.
Je finis par ressortir du canapé pour débarrasser le reste de mon repas. Le présentateur de l'émission annonce le passage du s-crew et je me précipite devant la télévision. La musique démarre. Il y a comme des rayons lasers verts sur scène, ils finissent par constituer un logo. Mon logo.
Celui d'Elysium.
Je mets pause, et m'approche encore un peu plus de l'écran. C'est vraiment là, le logo est vraiment là. J'appuie à nouveau sur la télécommande. Ken apparaît sur scène. Je suis engluée dans l'écran, incapable de bouger. Elysium est écrit partout sur scène grâce aux lasers. Les garçons sont fantastiques, le public est en folie. Lorsque leur prestation prend fin, j'en reviens pas.
Il l'a vraiment fait, il m'a promis qu'il ferait en sorte de tout réparer et c'est ce qu'il a fait.
Alors ? Est-ce que vous pensez que Ken s'est bien rattrapé ? Dans tous les cas nous sommes le 8 mars donc je souhaite une bonne journée a toute les madames qui passent par y ici aujourd'hui.
Je vous envoie plein d'amour
IBGY-T