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Et finalement après quelques années
Tes rêves ne sont plus ceux d'une enfant
Et les roses posées dans ta chambre
Remplacent aujourd'hui les fleurs des champs

Le temps qui court


C'est comme être en prison. Je déteste cet endroit, au mois lorsque j'étais à l'hôpital y'avait ce gars qui se prenait pour Jesus il était hyper drôle. Ici, comme c'est un centre de "remise en forme" ils traitent de toutes sortes de maladies mentales. De la dépression à l'addiction en passant par des formes légères de schizophrénie. Du coup, il y a une liste de règles improbable à suivre.

Pas de téléphone portable, pas d'ordinateur, pas de parfum et surtout pas de déodorant en aérosol.

On va dire que l'air marin me fait du bien.

Ça ne fait que vingt jours, mais j'ai l'impression que c'est beaucoup plus. Le pire, c'est de faire face à soi-même. Comme je suis coupée du monde, je n'ai pas d'autre choix que de penser à moi et à mes problèmes, pas de fuite en avant pour Didi.

Il y a tout de même un point positif : Lina.

Elle est pas là tous les jours, mais quand elle est là, on profite toujours d'une petite demie heure pour se fumer des cigarettes derrière le centre comme des ados en colonie de vacance. La première chose que j'ai cramée chez elle, c'est qu'elle parle beaucoup. Je parle beaucoup, mais elle s'est vraiment un autre délire. Et puis elle fait partie de ses gens qui ont toujours une histoire à raconter.

Je lui ai dit de lancer sa propre chaîne youtube et de faire des storytelling mais elle est pas trop chaud. C'est dommage parce qu'elle est vachement drôle.

La première fois qu'elle m'a fait rire, j'ai eu la sensation de revivre. Ce n'était pas du tout calculé, je crois que même elle s'y attendait pas. Ça m'a surpris parce qu'en ce moment, je suis un peu sombre. La psychothérapie fait remonter des trucs pas charmants du tout. Le son était un peu faiblard comme s'il hésité à sortir, mais il était vraiment là.

J'apprécie sa compagnie, parce qu'elle ne se prend pas la tête. Elle n'a pas une tune, pas un diplôme, des amis un peu limite et pourtant elle respire la joie de vivre. Mais elle a du talent, et une passion qu'elle vit à cent pour-cent.

J'aime les gens passionnés.

Elle a pas de temps à perdre. Son objectif, c'est de se barrer le plus rapidement d'ici. Monter sur Paris et faire un carton. C'est tout le mal que je lui souhaite. Vraiment.

Dans un coin de ma tête, j'ai commencé à me dire que je pouvais l'aider. Moi, de la tune, j'en ai. Trop même. Mais ça ne fait que vingt jours. Et puis j'ai un peu peur de m'accrocher à elle. J'ai cette manie de donner tout, tout de suite. Alors j'attends.

Peut-être que je ne suis pas obligée de lui donner de l'argent. Peut-être que je pourrais l'investir ? Se serait un entre deux pas mal. Faut que j'y réfléchisse sauf que je n'aie pas le temps de réfléchir à un truc pareil.

La thérapie s'est dure.

Vraiment.

Mon regard est fixé sur l'horloge derrière le psychologue qui me suit depuis que je suis entrée dans le centre. L'idée ce n'est pas de me réparer, mais de me reconstruire. Et pour ça faut tout déconstruire de mon enfant, à mon adolescence en passant par ma première tentative de suicide sans oublier ma rencontre avec les garçons.

Qu'est-ce qui a fait que je me sois laissée dériver au point d'attenter à nouveau à ma vie ?

Parce que d'un point de vue parfaitement objectif, ma vie n'est pas suffisamment nulle pour que ma dépression soit justifiée. J'ai un mec au top, des amis qui me soutiennent, pas de problème d'argent un travail qui me plaît. Certes ma relation avec mon père adoptif n'est pas au mieux en ce moment, mais ça ne justifie pas mon état, surtout que celui-ci s'est dégradé bien avant que je ne découvre la vérité, sur ma supposée adoption.

THUNDERWhere stories live. Discover now