J'avais pris une vitesse de course rapide pour faire le chemin qui me menait vers la ville. Je ne suivais pas les routes, pour éviter d'avoir à me colleter avec un certain nombre de zombis avant mon arrivée dans le "vif" du sujet. C'était d'ailleurs la raison qui m'avait fait éviter de prendre le blindé. L'autre était évidemment que les survivants en auraient bien plus besoin que moi, s'ils devaient fuir précipitamment de notre refuge dans les montagnes. Ce n'était pas non plus un bon moyen de passer discrètement parmi les créatures que j'allais rencontrer.
Si je n'avais pas sous-estimé le Maître, il aurait aussi des guetteurs sur le chemin qui descendait des montagnes, autour de la route, tout le moins. Il fallait que je garde un semblant d'effet de surprise, même si je me doutais qu'il savait déjà que je ne le laisserais pas faire sans prendre les mesures correspondantes. La seule chose, c'est qu'il ne s'attendait certainement pas à me voir venir seul et j'espérais qu'il n'avait pas pris des mesures trop drastiques pour sécuriser le périmètre de la ville.
Je me trompais gravement sur ce dernier point, même si j'eu la chance de voir les guetteurs à une distance suffisante pour ne pas me faire repérer. Vous vous souvenez de la précision de ma vision ? Elle me permit de détailler des créatures parfaitement immobiles, presque de la couleur du béton et installer aux endroits stratégiques où une invasion était possible.
C'est à ce moment que je compris qu'il faudrait faire plus fin pour pouvoir avancer sans être la cible principale de ces gardiens et ainsi de mettre le Maître au courant de mes objectifs.
Je longeais la crête qui donnait sur Le pourtour de Ward Canyon, sur ma droite, Pennsylvania Avenue et quelques grandes bâtisses qui m'ouvraient des perspectives de sécurité en raison de leurs larges terrains boisés. A ma gauche, une impasse, Quail Canyon Road, où se nichaient une quinzaine de petites maisons bourgeoises.
Ce qui me fit choisir cette dernière solution, ce fut la quantité de zombis qui semblaient stationné dans l'impasse, face à une bâtisse un peu excentrée qui comportait des dépendances. C'était celles-ci que le groupe de morts-vivants semblaient avoir pour cible. Depuis mon observatoire, je pouvais détailler l'installation : des rouleaux de barbelés avaient été déployés dans le chemin incurvé qui donnaient auxdites dépendances et plusieurs zombis étaient déjà bloqués dedans. Restant immobile un instant, je vis un humain adulte sortir de la maison et utilisé une batte de Baseball clouté pour réduire au silence les zombis dernièrement empalés dans les fils de fer.
Un humain adulte ? Ce devait être un immunisé !
Il n'avait pas repéré les chiens osseux et putréfiés qui avaient fait le tour par le jardin de la maison du voisin, juste un peu plus bas dans Quail. Je n'eus que le temps de réagir. Je sautais de mon perchoir et atterris facilement sur le toit de la dépendance, j'y couru aussi vite que mes jambes me le permirent pour sauter dans le jardin au moment où l'un des molosses s'ouvrait un passage dans la clôture à grand coup de dent. Nous nous rencontrâmes à la moitié de la distance qui séparait le trou dans le grillage, de l'humain. Je broyais l'échine de l'animal zombi alors que ses dents crissaient contre mon crâne.
Une fois tombé au sol, je lui arrachais la tête pour finir le travail.
L'humain s'était retourné et me vit, de dos, faire face aux autres animaux.
" Vous devriez rentrer !", hurlais-je, "Ce qui va suivre ne sera pas plus agréable à voir !"
Ma vision se troubla un instant puis, je vis clairement les animaux arriver en meute le long de la clôture, maintenant béante.
L'humain hésitait.
" - Vous n'êtes pas un ..., commença-t-il.
- Les questions viendront après..., hurlais-je de nouveau, histoire de lui faire prendre conscience de l'univers, autour de lui. Je vous couvre, pour l'instant !
Je jetais au sol mon blouson et expédiait ad patres deux des molosses qui s'étaient bien trop approché.
- Votre vitesse et votre batte ne pourront rien contre ce qui arrive ! Rentrez ! Vite !"
Il finit par prendre peur et rentra dans la maison. J'entendis que l'on barricadait la porte. Cette dépendance était en bois, comme le reste des maisons du coin. Ça ne servirait à rien contre les chiens.
Alors que je chargeais la meute, je compris que ce virus Z, à l'intérieur des animaux, m'était néfaste, en particulier, pour ma santé mentale. Je sentais les instincts animaux prendre le dessus petit à petit. Je fini par rassembler mes esprits devant un tas de viande sanguinolente dont j'étais vraisemblablement le responsable. La bonne nouvelle, c'est que la meute avait été décimée. La mauvaise, c'est que le Maître ne croirais pas une seconde au fait que les humains présents dans la maison puissent être les véritables responsables de cette boucherie.
J'avais aussi intégré des virus de contrôleurs nécrotiques et mon esprit devait faire interférence à la volonté du Maître. Les zombis devant la maison étaient redevenus des pantins sans conscience qui déambulaient sans but. Ils ne faisaient même plus mine de m'attaquer.
J'avais grillé ma dernière cartouche concernant la surprise.
J'étais couvert de sang et de plusieurs liquides qui étaient moins définissable. Je risquais de ne pas faire forte impression.
J'entendis la porte s'ouvrir, derrière moi. Une arme se chargea et je sentis l'hésitation du tireur. Je me retournais doucement, les mains, dégoulinantes de sang, placé bien en évidence. Je forçais mes pics à reprendre leurs places sous ma peau, mais je ne pouvais pas dissimuler mon regard peu humain.
Une voix interpella la jeune femme qui me pointait avec son fusil.
"- Je croyais qu'il fallait l'abattre ? Pourquoi tu ne tires pas ?
C'était la voix d'un jeune garçon, certainement plus jeune que moi. Il reprit.
- Si je pouvais marcher, je l'aurais fait, moi ! Et sans hésiter !
Je souris.
- Tire ! Dis-je doucement, Tu l'auras fait, comme ça !
Je laissais un instant de silence, percevant sa tension.
- TIRE !" hurlais-je brusquement. Elle sursauta.
BANG-BANG.
Le double canon avait craché deux cartouches à sanglier et les deux m'avaient touchée. Elle vit les trous se refermer à vue d'œil sur mon torse, sans laisser la moindre cicatrice.
"- Tu ne peux rien contre moi, à moins d'avoir quelques choses de beaucoup plus lourd que ça. Dis-je doucement.
Elle me fixa. C'était une jeune femme, autour de 18 ans, les cheveux longs et bouclés d'un orange presque brillant et les yeux d'un vert pétillant. Des larmes glissaient au coin de ses joues. D'après ma vision, elle était saine, mais pas immunisée.
- Tu devrais retourner à l'abri. Je vais faire un brin de toilette et je frapperais à la porte. Ne vous approchez pas des cadavres, c'est cette chose noire qui provoque l'infection."
Je m'approchais de la citerne d'eau de pluie qui servait au jardin et me lavais à grandes eaux, puis retournais vers la porte pour frapper. J'avais passé un t-shirt noir. Je frappais deux fois, puis deux fois entrecoupé d'une seconde. La porte s'ouvrit sur un loft. La dépendance était certainement devenue le dernier rempart de cette famille. La jeune fille au fusil devait en être la propriétaire, vue la décoration.
Il y avait là le frère aîné, l'homme à la batte, qui devait avoir une trentaine d'année et qui était immunisé. J'en déduisis que ce n'était pas génétique. Les mêmes yeux verts, les même cheveux roux, même s'ils étaient coupé à la militaire. Une femme était allongée sur le lit. Elle semblait souffrir. Elle était infectée. Elle ressemblait à la jeune fille avec 30 ans de plus. Il restait un jeune garçon, installé dans un fauteuil roulant qui me regardait avec hargne. La voix que j'avais entendue devait provenir de lui. Ils avaient reculés vers le fond de la pièce.
"- Si j'avais l'intention de vous tuer, vous seriez déjà mort. Et tu ne me feras pas peur en me foudroyant des yeux, Steve. Dis-je en fixant le garçon.
- Comment ...
- Steve, Jason, Emma et Martha. Dis-je en indiquant chacune des personnes, Je ne nommerais pas le chat, je ne parle pas sa langue.
- Moustache est vivant ?
- D'après ce que j'en vois, il l'est en effet. Dans le grenier de cette maison, mais il n'est pas seul. Vous aviez un jeune voisin du nom de... Raphaël ?
- Il est mort de la maladie. Cracha Steve comme si ça lui brûlait la langue.
- Je pense foncièrement qu'il le croit autant que toi. Mais, vois-tu, la maladie n'est pas unique et surtout, elle fait d'étranges choses sur les gens qui sont prédisposés, comme pour moi, par exemple.
Je m'étais déplacé pour me trouver en dessous de la trappe d'accès au grenier. Avec fulgurance, je saisi le bras du jeune garçon à travers le morceau de bois qui en fermait l'entrée. Je le rattrapais pour ne pas qu'il s'écrase par terre, tête la première. Le chat sauta sur le sol avec un chuintement apeuré. Instantanément, les virus Z devinrent des Z² à travers la peau du garçon, passant ses yeux du rouge sang au dorée.
- Je pense même pouvoir sauver votre mère... et certainement te rendre tes jambes, Steve. Pour finir, je m'appelle Joshua, mais vous pouvez m'appeler J.