- Toi et moi faut qu'on parle. C'était quoi le plan qui derrière ta grande tirade au juste ? Pas qu'il t'oublie j'espère ? Parce que là, avec ta démo de grande classe, tu viens de lui lancer le défi de sa vie. Et Alex est trèèèèèèès joueur. T'es pas armée pour ça Lise, il va te bouffer toute crue. Remarque ça doit pas être désagréable de se faire dévorer par Miller ...
- Zoé !
- Je déconne ! Allez viens danser maintenant. Tu vas bientôt être toute bourrée, on va se marrer. Charlie a aussi passé une belle soirée de merde, faut qu'on te raconte, t'as raté trop de trucs tout ce temps. Elle s'est tapé son stagiaire, tu te rends compte ? Remarque, toi, t'as bien roulé une pelle à ton boss qui t'a peloté le cul en retour, vous faites la paire toutes les deux !
- Charlie ? Tu voulais dire Marie, non ?
- Non non Lise, Charlie, t'as bien entendu. Remarque c'est parce que t'as pas encore vu Camille, sinon tu poserais pas la question. Ah au fait, Thiago nous rejoint, il m'a envoyé un message tout à l'heure, il arrivait pas à te joindre.
- Cool ! Enfin une bonne nouvelle ! Ah bah tiens, quand on parle du loup !
Je le vois me faire signe et lui réponds en retour par un grand sourire. Mais ma joie de le voir s'éteint immédiatement. Alex vient de l'intercepter pour l'entraîner à sa table, au milieu de son cheptel dopé aux hormones ...
Alex de retour, et en mode Conquistador = 1
Lise qui s'est encore foutue dans la merde toute seule = 0
****
Je reste comme une nouille trop cuite lancée sur un mur, molle et immobile, la bouche ouverte sur ce qui reste de mon sourire.
Alex, lui, me fixe de son regard perçant, semblant fouiller mon âme sans pudeur ni scrupule, son éternel sourire carnassier aux lèvres, puis lève son verre dans ma direction avant de poser son bras sur l'épaule de Thiago le plus naturellement du monde. Comme s'ils étaient les meilleurs potes de la terre.
Je la sens pas cette soirée, pas du tout, et l'alcool + le stress commencent à faire franchement mauvais ménage. Mes premières palpitations ne sont pas loin, mais je les chasse sans ménagement. Je ne peux pas craquer ce soir car Alex ne doit surtout rien apprendre à propos de Thiago, ou de notre mariage, ça ne le concerne pas.
Enfin j'aimerais le croire ... un tout petit peu du moins ... mais je ne me voile pas la face, ses déclarations de ce soir me font plutôt penser qu'il reprend la partie exactement là où on l'a laissée il y a 6 mois ...
Et je sais exactement ce qu'il va faire, et surtout, comment il va le faire. Car à le côtoyer au quotidien pendant un an, au point de devenir son ombre, s'il y a bien une chose que je maîtrise aujourd'hui, ce sont ses méthodes. Redoutables ... et redoutées. Alex est un homme d'affaire jusqu'au fond de ses tripes, un requin qui a l'habitude d'obtenir tout ce qu'il veut, quand il le veut et de la manière qu'il veut, peu importent les dommages collatéraux.
Un conquérant qui n'aime rien tant que la chasse et la traque. "Ni blessés, ni prisonniers", sa devise fétiche.
Alors ce qui se trame dans son cerveau brillant à l'instant ne me laisse pas l'ombre d'un doute : il va s'occuper de mon mariage comme d'une de ces fameuses entreprises qu'il accule minutieusement pour mieux les faire siennes une fois à l'agonie, à la méthode "Attila". Alex Miller va donc ni plus ni moins lancer une OPA extrêmement agressive sur mon union qu'il ne comprend pas et accepte encore moins. Pour ne pas dire une littérale mise à mort. Et quand notre mariage sera réduit en cendres, et Thiago renvoyé avec pertes et fracas sur sa terre natale, il s'occupera plus personnellement de moi.
Je vois d'ici son plan d'attaque, sa stratégie en 3 étapes, immuable et toujours couronnée de succès, quel que soit l'objectif à atteindre ou le type d'adversaire à combattre. Et elle s'appliquera à mon cas sans soucis
1 - Isoler l'ennemi ( = se débarrasser de Thiago)
2 - Abattre les défenses ( = ruiner mon mariage et le conduire jusqu'au divorce)
3 - Envahir la place forte et faire main basse sur les femmes et les richesses ( = me mettre dans son lit ou sur toute autre surface plus ou moins plane et s'auto-proclamer mon "légitime")
Avec en cadeau bonus non négligeable, l'affront subit 6 mois plus tôt lavé en bonne et due forme.
Et mon problème, là, c'est que je ne suis pas du toute sûre de pouvoir, ou vouloir, lutter quand le moment arrivera. Et il arrivera, sans aucun doute possible ...
J'ai donc absolument besoin d'un peu de temps avant d'être au centre du cyclone "Miller", qui, si j'en crois les regards qu'il continue à me jeter, doit en être déjà à la mise en œuvre de sa tactique. Il faut donc que je l'arrête, ou du moins que je le ralentisse, avant que son buldozer ne réduise à néant tout ce que nous avons prévu avec Thiago et que notre projet s'effondre comme un trop fragile château de carte.
J'en suis encore à me demander par quel bout attaquer concrètement quand je réalise d'un coup qu'Alex a déjà un temps d'avance sur moi. Son attitude parle pour lui. Il a parfaitement compris comment "aborder" mon mari. En féroce adversaire, il a déjà identifié son principal point faible, son talon d'Achille. Et qui, étrangement, s'applique aussi à Alex, j'en sais quelque chose.
Quoi de mieux qu'un sex-addict pour en reconnaitre un autre quand il le croise, hein ?
J'espérais qu'il ne joue pas sur ce terrain que moi, pour le coup, je maîtrise moyen. Optimisme quand tu nous tiens ...
Cela dit, j'ai quand même peut-être un coup à jouer moi aussi, en total freestyle par contre. Alex est déjà en train de pousser subtilement une de ses dindes dans les bras de Thiago et je sais d'expérience qu'il ne résistera pas longtemps. Deal ou pas deal.
Mon joker réside alors dans le fait qu'Alex ne sait rien de la relation qui nous unit réellement Thiago et moi. Et pour le moment, il ignore encore comment je me positionne par rapport au "point faible" de mon mari. Est-ce que je suis pleinement au courant de ses travers, seulement un peu consciente et/ou vaguement suspicieuse quant à un comportement potentiellement suspect, ou encore franchement aveugle ? Et c'est précisément cette incertitude qui va me servir ici.
Car je ne suis pas le moins du monde jalouse, du moins pas avec Thiago. Notre arrangement est on ne peut plus clair. Son corps, qui appelle au vice et à la luxure (deux choses dont il est totalement incapable de se passer) m'est réservé et offert au-delà de mes attentes chaque fois que j'en manifeste le désir. Et nous vivons sous le même toit, comme un mari et sa femme. Mais ça s'arrête là. Aucune exclusivité de quelque sorte nous lie, seule une certaine discrétion nécessaire est requise. Car le lien qui nous unit, hormis une profonde et sincère affection, est tout autre, et personne ne doit le découvrir. Surtout pas Alex. Lui ne doit pas voir au-delà des apparences et du rôle que Thiago et moi jouons en public, alors il va me falloir me la jouer serré pour tenir ma place de petite femme éperdue d'amour, encore au stade de la lune de miel, ivre de baisers et de caresses, même en public.
L'alcool, et le superbe corps musclé et chaud comme la braise 24 h sur 24 de Thiago aidant, je me sens presque prête à me lancer dans l'arène et combattre le feu par le feu. A la méthode "Alex Miller", ni plus ni moins. Je veux, j'exige, je prends. Sans fioriture ni débat inutile et stérile.
Je dois maintenant assumer le fait de m'être jetée comme une gourdasse dans la gueule du loup avec ma scène du "Suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis". Zoé a raison : je lui ai lancé un défi à sa hauteur, comme il les aime et les vénère, ardu, complexe, redoutable mais pas impossible : celui de me reconquérir et de me posséder. Enfin.
Je sens une main se poser sur mon bras, me faisant sortir de ma réflexion.
- Lise, oublie la piste de danse, faut que tu fasses quelque chose tout de suite ou Alex va retourner Thiago comme une crêpe, et vous pourrez dire adieu à ce que tu sais. Accroche-toi des couilles de taureau autour du cou en guise de collier, tu vas en avoir besoin, et attaque, t'as plus le choix. Tu te sens prête ?
- Pas vraiment, mais j'étais en train de me faire la même réflexion Zoé. Plan B indispensable ... J'ai une idée, qui a déjà fonctionné ...
- Laquelle ?
- Faut que je joue la surprise, c'est ma seule chance pour l'attaquer sur son propre terrain.
Je lui lance un clin d'oeil que j'espère aguicheur et sexy pour me tester, avant de poursuivre
- Admire la nouvelle Lise en action oeuvrer corps et âme pour sa cause perdue, Zoé ! Ca va chier ! Enfin j'espère ...
Zoé éclate de rire avant de me serrer dans ses bras pour notre "calin du courage"
- Mais qu'avez-vous fait de ma douce et sage Lise ? Qui est cette femme pleine d'assurance et suintant le sex-appeal qui se trouve devant moi, prête à faire mordre la poussière au charnel et délicieusement dépravé Alex Miller ?
- Enfin, t'oublie surtout "au pied du mur, sans autre option que de foncer dans le tas" ?
Ma voix se casse un peu sur la fin (pleine d'assurance, plein d'assurance, ... à d'autres, oui) et Zoé retrouve immédiatement son sérieux pour attraper mon menton entre son pouce et son index et m'obliger à la regarder dans les yeux.
- Ma Lise, tu as trop à perdre si Miller s'occupe de Thiago, je ne t'apprends rien. Alors ne te pose pas de questions, mets ton cerveau sur off, branche-toi sur tes hormones et cloue-le au pilori ton Miller. T'as des seins et un cul à se damner, alors avance ton pion en premier et prends l'avantage. Et puis tu sais bien que si je pouvais le faire à ta place, j'irais, mais ça aurait moins d'impact, hein ?
Sa remarque, aidée par l'alcool et le souvenir de nuits brésiliennes débridées, déclenche chez moi un rire salvateur et hautement stimulant
- J'en doute pas un instant ! Ma Zoé, toujours prête à se dévouer ! Heureusement que je t'ai, hein, qu'est-ce que je ferais sans toi ?
- A part des conneries, tu veux dire ? me répond-elle hilare
- Ouais à part ça ?
Avant qu'elle n'ait le temps de me répondre plus sérieusement et me faire flipper au passage, j'attrape le verre qu'elle tient négligemment du bout des doigts, l'avale cul-sec et pars sans attendre vers la table où trônent mon ancien boss fort sexy et mon beau mari tout neuf, la tête haute et la démarche exagérément chaloupée. Arrivée devant les deux énergumènes qui n'ont rien loupé de mon approche féline et diaboliquement sensuelle (c'est du moins ce que je l'imagine dans ma tête), je m'arme de mon sourire le plus angélique, pousse délicatement mais fermement une dinde malencontreusement égarée sur ma route, pose la main sur l'épaule de Thiago et passe lascivement mes jambes de part et d'autre des siennes. Ses mains se posent alors spontanément sur mes hanches et j'en profite pour coller mon bassin tout contre le sien, son torse épousant le mien, sans équivoque. Je rapproche nos deux fronts et dépose un premier baiser à la commissure de ses lèvres ...
... avant de lui souhaiter la bienvenue, suffisamment fort pour que son voisin l'entendre clairement
- Bonsoir mon amour, tu m'as manqué tu sais ...
Non mais franchement, qu'est-ce que ces mecs sont capables de me faire faire ! Me voilà en train de chevaucher mon mari, en pleine boite de nuit, comme une danseuse de strip, lui susurrant des mots doux comme comme une hôtesse du téléphone rose, uniquement pour calmer les plans foireux de mon ancien patron qui veut me bouffer toute crue.
Grotesque. Caricatural. Mais nécessaire.
Je glisse une œillade discrète vers Alex, qui n'en perd pas une miette, médusé et visiblement très énervé, et enserre de mes petits bras bronzés la nuque de Thiago. Mes mains se faufilent quelques centimètres plus loin pour agripper avec une fougue toute voluptueuse ses cheveux, pendant que ma croupe en profite pour onduler très légèrement, lovée sur une bosse déjà fort prometteuse.
Je sais que là, maintenant, j'ai toute leur attention. A tous les 2. Et si j'entends le silence qui vient de s'abattre sur la basse-cour, j'ai même le public au complet pour mon final. Parfait. J'évite de penser au ridicule de ma situation et à la gêne immense que je m'auto-inflige dans cette position, mets un mouchoir sur mon étrange ressenti de plaisir totalement coupable et repose ma bouche au coin des lèvres de Thiago. Calmée par ce contact que je connais par coeur et dont je m'enivre jusqu'à l'overdose, je ferme enfin les yeux et me laisse emporter par la réactivité de mon mari qui, conscient de la gène qui commence à m'envahir malgré moi, prend d'autorité les choses en main.
Ses mains aux doigts agiles se glissent alors sous le fin tissu de mon débardeur, et remontent délicatement dans mon dos, laissant ici et là des frissons prendre vie sous la pulpe de ses doigts magiques. Centimètre après centimètre, par petits cercles ou grandes arabesques, elles continuent leur ascension lascive et inexorable, sans jamais marquer le moindre arrêt, mettant la totalité de ma peau en émoi, le reste de mon corps, désormais hautement réactif, réclamant lui aussi son du. Entendant mes suppliques silencieuses, arrivés au niveau de mes seins archi-tendus sous l'effet du plaisir et du désir, ses pouces s'échappent, chacun vers son lobe de prédilection, et en titillent avec une délicatesse contenue les pointes ultra sensibles.
Enhardie par une véritable poussée d'endorphines, ma conscience se déconnecte pour de bon et je me laisse enfin totalement aller à notre corps à corps suggestif, à la limite de l'érotique. La pointe de ma langue vient jouer avec la sienne, venue à sa rencontre sitôt ma bouche posée sur ses lèvres, et incite par une délicieuse pression sur mes tétons engorgés à lui laisser plus de latitude. J'ouvre la bouche et le laisse me pénétrer de sa langue comme s'il me faisait littéralement l'amour. Notre baiser s'enflamme, entraînant sur son passage un embrasement total de mon corps, et ce n'est qu'en prenant conscience de l'énergie incroyablement négative émaner d'un Alex fou de rage que j'arrive à stopper notre étreinte franchement torride. À bout de souffle, n'osant regarder ni à droite ni à gauche, telle une gamine prise en faute, je quitte les cuisses de Thiago, et lui tends là main pour l'entraîner vers la piste.
Sachant sans l'ombre d'un doute que la riposte d'Alex n'allait pas tarder à exploser ...
Lise en mode "Je maîtrise ... rien du tout en fait " = 1 (jury tres généreux)
Alex en mode "tres probable tsunami à l'approche" = en attente de la décision du jury