Chapitre 3

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Connor refusa de s'asseoir et posa ses mains sur la table en bois. La reine se posta derrière lui et plaça ses doigts griffus sur ses hanches.

— Ton âme me plaît.

— Laissez-moi partir.

Elle resserra sa prise.

— Pas pour l'instant. Je n'en ai pas terminé. Pourquoi ne succombes-tu pas ?

— Vous êtes sublimes, vous encore plus que Desily ou Octavia. Mais de votre beauté surnaturelle, je ne veux pas me laisser ensorceler. Ce n'est pas moral. J'aurai l'impression de profiter de vous. Quand bien même les clients d'ici viennent pour mourir. Quand bien même vous aimez ce que vous faites. Moralement, moi, cela ne me convient pas. Je ne peux et ne veux m'y résoudre.

Estrella s'éloigna du détective dans un rire et celui-ci se retourna, surpris.

— Les humains comme toi sont extrêmement rares. Voilà pourquoi ton âme me plaît autant. Et puis...

Elle s'approcha de nouveau.

— Physiquement, tu n'es pas mal non plus.

Elle attrapa ses lunettes et les posa doucement sur le bureau.

— Laisse-moi voir tes yeux.

Connor détourna immédiatement la tête.

— Aimerais-tu que j'appelle un homme fée si cela est plus à ton goût ?

Le détective soupira.

— Le problème n'est pas là. Je vous le dis encore une fois, je ne souhaite ni mourir ni perdre mon âme. Ni profiter de votre beauté. Je voulais des réponses à mes questions et c'est chose faite. Je n'ai plus aucune raison de demeurer ici.

Estrella posa sa main cuivrée sur la joue pâle de Connor.

— Dans ce cas, je te propose un dernier pari.

Le détective détestait les jeux de hasard, qu'ils impliquent ou non de l'argent. Sa mère lui avait toujours appris à s'en méfier. Toutefois, sans le bon vouloir de la reine, jamais il ne sortirait du Secret Nirvana.

— Je vous écoute.

— Couche avec moi. Pas de prestations bizarres ni d'âmes dévorées, je te le promets. Couche avec moi et j'estimerai avoir gagné. Après ça, tu pourras partir.

— Je...

Estrella l'embrassa brièvement et Connor comprit qu'il n'avait pas d'autre choix. Le goût des lèvres de la fée lui montait déjà à la tête.

— Lâche prise.

Connor eut le malheur de plonger son regard dans celui de la reine. Il fut happé par le feu incandescent qui y vivait et ne s'aperçut pas des mains qui retiraient sa veste et son pull, ni des griffes qui se promenaient sur son torse nu. Estrella dévoila ses crocs et lui mordit l'épaule. Le détective se souvient du bruit de sa ceinture, d'une paire d'ailes qui apparaît et de quelques mots.

« Tu as été aimé. »

Desily et Octavia entrèrent dans le bureau de leur reine et enjambèrent le cadavre sur le sol. La plus âgée s'agenouilla près de lui.

— Il n'a pas supporté ?

Estrella, assise sur son fauteuil, souriait.

— Non. Tu sais bien que rares sont ceux qui survivent à la métamorphose. Mais c'est dommage, il aurait été une fée magnifique.

Parce qu'ainsi apparaissaient les hommes fées. Il s'agissait toujours d'humains transformés, alors que les femmes, elles, naissaient déjà sous cette forme.

— Mais ne vous en faites pas, il m'aura au moins servi de reproducteur. Il était parfait pour ça.

Desily et Octavia sourirent. Deux siècles que leur reine n'avait pas enfanté !

— Nous allons rentrer chez nous quelque temps. Récupérez vos affaires, nous partons ce soir. Et emportez Connor. Nous l'enterrerons auprès des autres hommes qui ont contribué à notre espèce.

Elles acquiescèrent, mais avant de quitter la pièce Desily se retourna.

— Et pour l'écrivain, que fait-on ? Je l'achève ?

— Non. Offre-lui la grâce de la muse. Qu'il rédige une ultime œuvre sur nous les fées avant que ce qu'il lui reste d'âme ne se consume.

— Avec plaisir, Majesté.

Et ce fut ainsi que le Secret Nirvana disparut comme par magie, du monde et des mémoires, tout comme l'existence d'un certain Connor Karpenter. Deux ans plus tard fut publiée l'œuvre de Kappei Shindou, « La danse des fées », juste avant son suicide.

Psycho LoveWhere stories live. Discover now