Partie 37 : pour la Voix

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Edwige Indiana :

À présent qu'elle s'est décidée à retrouver la Voix, Edwige a deux premières pistes : la presque église de Margaret, et la SRAM. En attendant des heures ouvrables, la jeune fille a passé des heures sur sa carte tech à passer en revue toutes les informations à sa portée pour prendre la meilleure décision. À présent, elle est épuisée, mais tient par l'adrénaline, ses pensées forment une sorte de bourdonnement cotonneux tandis qu'elle s'avance jusqu'à l'immeuble SRAM de sa ville. Elle s'arrête, plus nerveuse que jamais, et se répète à voix basse le speech qu'elle a imaginé. Elle doit entrer et demander à l'accueil le service de gestion des anomalies du Réseau. D'après tout ce qu'elle a pu lire, ce sont eux qui s'occupent de la question du tech hanté et donc logiquement de la Voix. Ensuite, elle leur explique qu'elle a un témoignage à apporter. Et après... Après, elle suivra les instructions qu'on lui donnera, et puis voilà. S'ils veulent qu'elle les aide à contacter la Voix, c'est parfait - c'est même le meilleur scénario que son esprit en ébullition a concocté. Sinon, retour à la case départ, elle pourra retenter sa chance avec Margaret et leurs amis. Elle n'a rien à perdre.

Edwige n'est pas comme tous ces gens toujours en train de se plaindre qui se méfient de la SRAM et répètent les pires rumeurs sur la multinationale. Elle ne s'est jamais intéressée à la politique et a toujours espéré commencer sa carrière chez les bicolores, au moins comme intérimaire. La SRAM est la plus puissante et la plus prestigieuse compagnie du monde. Ils sauront quoi faire.

L'immeuble est grand, sobre, mais majestueux. Le blason à l'étoile à sept branches est sculpté directement dans la pierre sous le nom de l'entreprise, et peint sur les grandes portes vitrées de l'entrée - de la nuance exacte de doré du tech, évidemment. Edwige est déjà venue ici avec sa classe pour visiter un système d'archives techs, et à chaque fois qu'elle venait en ville elle passait devant cet immeuble. Il a toujours grouillé d'activité, entre les simples visiteurs, les invités exceptionnels et les bicolores de tous les statuts qui se croisaient ici bas. Mais aujourd'hui, alors que la crise menace et panique la population, il n'y a personne. Aucune lumière n'est allumée. L'endroit semble même fermé, voire barricadé : quelqu'un a plaqué des matelas ou d'épais tissus contre les portes vitrées pour les protéger. Ça ne les a pas empêchées d'être recouvertes de tags, et à deux endroits abîmées par ce qui semble être un jet de pierre.

Ce ne sont pas ces marques de rejet qui inquiètent le plus Edwige. Les médias n'en ont pas parlé, mais il est assez évident qu'une population prête à arracher ses propres fils techs au nom de la prudence risque de se retourner contre la SRAM. Elle a même vu passer une vidéo de terroristes qui menaçaient de s'en prendre à des otages si le gouvernement n'interdisait pas officiellement le tech. Bien sûr, cette vidéo pourrait très bien être un faux grossier, la censure de vérification n'est sans doute pas capable de gérer tous les messages complotistes du moment, mais l'idée qu'on puisse escalader jusqu'à ce point de violence fait froid dans le dos. La jeune fille a toujours été certaine que la SRAM saurait gérer cette agressivité. L'entreprise a toujours eu un système de sécurité modèle, que même le gouvernement de l'AGN lui enviait. Et là... comment est-ce que quelqu'un a pu s'approcher suffisamment prêt de l'immeuble pour lancer une pierre ? Ce geste pourrait suffire à une déchéance de citoyenneté ! Personne ne croit donc plus au système ? Et pourquoi n'y a-t-il aucun garde autour de l'immeuble ? Les vert et jaune qui patrouillent habituellement brillent par leur absence, et même s'ils sont débordés par la situation, la SRAM peut envoyer les rouge et jaune des opérations spéciales, voir rouge et orange... Ces armées de gens entrainés pour faire face à toutes les situations, ils doivent bien être encore là, non ?

Lentement, Edwige avance jusqu'aux portes automatiques, sans que celles-ci ne s'ouvrent. Elle tourne lentement autour de l'immeuble, tentant de voir si une entrée a été conservée, mais tout reste fermé. Elle s'avance prudemment jusqu'à plaquer son oeil entre deux matelas et voir à l'intérieur, mais elle ne distingue rien, tout est éteint. Le seul moyen d'entrer serait de casser une des vitres blindées, et pour quoi faire ? Elle ne peut parler à personne ici. Les informations officielles sont fausses : les bureaux SRAM locaux ne gèrent rien du tout.

Les Techs - Tome 2 : la Quatrième Guerre MondialeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant