Sue Me - T1

9. Paysonnage

Mais bien sûr, ma mère est la reine de tout ce qui cosmétiques et soins. Même si elle a la cinquantaine entamée, elle a l'air d'avoir trente-cinq ans tout au plus, si ce n'est que les quelques cheveux blancs dans son opulente chevelure. Quant à mon père, en étant marié à la reine, il reste aussi beau qu'un roi.
Mais ça me terrifie quand même.

Un jour, je vais devoir vivre sans eux.

Si j'ai toujours été à la recherche de mon intimité et de mon indépendance, partant de la maison à mes dix-huit ans pour aller étudier à Harvard en travaillant à côté des études pour les financer moi-même, je ne peux plus passer plus de quatorze jours sans voir mes parents. Chaque semaine, au moins, je dois donner un câlin à ma mère, manger quelque chose cuisiné de ses mains et me faire demander si j'ai besoin de quelque chose de la part de mon père qui, sous ses apparences de gros dur, est un homme doux comme une chatte.

Certes, je manque toujours les évènements de famille parce que je suis un con acharné sur mon travail, mais j'essaie toujours de me libérer comme aujourd'hui pour me sentir comme un gamin à nouveau.

— Allez, papi ! s'écrie Jaden qui est assis sur mes genoux.

En vrai, mes cuisses ont été monopolisées par Jaden et Juliet alors que celles de Luka ont été colonisées par Jasmine et Jude qui tapent dans leurs mains, excités.

Papa exauce donc leurs voeux et démarre le véhicule qui gronde du moteur. Puis, nous partons faire un petit tour autour de l'énorme terrain familial.

— C'est grand comme... toute la planète ! s'écrie Juliet en se laissant coucher sur mon torse.

— Comme toute la planète ? On n'en finirait jamais de planter ce coton, la taquiné-je en lui chatouillant les côtes.

Elle glousse en se débattant avant de pousser un grand « oh » lorsque nous sommes en haut d'un montant de la terre et que les bourgeons blancs du coton rendus éblouissants à cause du soleil s'étalent à perte de vue. Les garçons sautent de nos genoux pour se coller à la vitre et regarder, les yeux écarquillés.

— J'ai tout planté ça moi-même, leur annonce papa sur un ton amusé.

— Avec moi, ajouté-je pendant que Luka roule des yeux.

— Je vais t'éjecter de ce tracteur, Noah, avertit mon père en faisant un mouvement fluide du poignet pour tourner vers la gauche.

Les enfants gloussent, même mon frère ricane.
Je grogne.

— Ça aussi, c'est de la diffamation. Tu vois comment ma réputation est touchée ? La prochaine fois qu'on se verra, ce sera en cour, le provoqué-je en me calant contre le dossier du siège.

Il éclate de rire et me jette un regard pétillant.

— Je n'ai pas peur de toi, fiston. Ta mère m'a habitué à ces conneries.

Il dit souvent que mon attrait pour la justice et ma carrière d'avocat viennent sûrement du fait qu'il y a déjà trente ans, mes parents ont dû s'affronter devant un tribunal pour s'approprier ce terrain même avant de tomber fous amoureux l'un de l'autre. C'est le destin.

— Ouais, j'avais oublié qu'elle pouvait être féroce.

— Elle l'est toujours. Dans la vie et au lit.

Je fais mine de vomir et Luka grimace :

— Trop d'information, papa.

— Qu'est-ce qui se passe dans ton lit, papi ? demande Jasmine avec des étoiles dans les yeux.

Jaden, le diable de la marmaille, met fin à sa contemplation du paysage pour se retourner brusquement.

— Tu veux que je te dise ce qui se passe dans un lit ?