𝐒𝐋𝐄𝐄𝐏𝐎𝐕𝐄𝐑 ! reddie

𝐟𝐢𝐯𝐞

richie ouvre lentement les yeux, les fins traits de lumière provenant du volet dansant doucement sur son visage le sortent de son sommeil à son grand regret. il aimerait être endormi pour toujours, arrêter de se réveiller soudainement pour se retrouver dans un au-delà de rêve, loin de toute la douleur qu'il ressent dans le monde qui lui est offert. il a dormi longtemps mais il est toujours autant fatigué, il se sent toujours aussi vide et misérable que la veille. les souvenirs reviennent peu à peu et son corps entier semble se consumer sous la brûlure de la rage qu'il ressent, de toute cette colère que ses sentiments lui inspirent. c'est de ta faute, jamais t'aurais dû te mettre dans la tête des idées aussi stupides. il veut respirer profondément mais sa cage thoracique semble se resserrer comme pour l'empêcher de faire rentrer de l'air dans ses poumons. même ton corps veut que tu crèves putain.

il jette un regard vers stan, allongé à quelques centimètres de lui dans son immense lit king-sized, ses boucles tombant sur son visage à la bouche à demi ouverte et aux yeux clos. richie lui sourit même si celui-ci ne peut pas le voir, et se glisse doucement hors du lit pour se diriger sur la pointe des pieds vers la salle de bain. il se regarde dans le miroir, observe son teint pâle, ses immenses cernes, ses épaisses boucles noires désordonnées avant d'enlever le t-shirt que le juif lui a enfilé pour qu'il ne dorme pas dans son col roulé maculé de vomi. il se détaille d'abord de face, sa clavicule commence à devenir saillante et il peut compter ses côtes sans avoir à les toucher. il prend une grande inspiration et retient son souffle pour creuser son ventre, avant d'enrouler ses mains autour de sa taille ; il aimerait tellement que ses doigts se touchent mais ils sont éloignés d'une dizaine de centimètres. avec un peu de persévérance, la distance devrait bientôt disparaître. bien sûr, il ya toujours ce trop en lui, tous ses kilos qu'il a l'impression de transporter comme un fardeau, mais il a de l'espoir. dans quelques mois, il pourra sûrement avoir une silhouette qui fera qu'eddie ne pourra plus détacher ses yeux de lui, une silhouette qui rendra son cliché de copine verte de jalousie.

la pensée de l'asthmatique et du baiser qu'il a partagé hier soir le fait souffrir plus qu'il n'a jamais souffert, il a envie de se faire mal pour oublier ce vide douloureux qu'a créé son amour en lui, il voudrait être violent avec lui-même, plus que d'habitude, il désire ressentir autre chose que ce trou béant en lui qui semble vouloir aspirer toutes les couleurs autour de lui. il se baisse et ouvre le placard situé en dessous du lavabo, contemple durant de longues secondes la boîte de lames de rasoir presque vide. il prend un des petits objets tranchants avec ses doigts, l'observe en le faisant tourner dans sa main avec précaution. mais il le repose brusquement et ferme le placard en fermant les yeux. je peux pas faire ça maintenant, pas avec stan à côté.

alors il se place au dessus des toilettes pour enfoncer deux doigts au fond de sa gorge ; c'est devenu presque comme un rituel religieux pour lui, cette manière de se purger et de remplacer la douleur qu'il ressent dans chaque millimètres de son corps en douleur purement physique. il n'a rien à vomir après la veille, et la bile lui donne la sensation de recracher des épines. mais il en a besoin. alors, après s'être rincé la bouche et lavé les mains, il retourne auprès de son ami, profitant de la chaleur de la couverture épaisse.

stanley est réveillé, et stanley a distinctement entendu ce qui vient de se passer dans la salle de bain. il garde néanmoins les yeux fermés, tentant de faire partir le poid qui s'est établi dans sa poitrine, il déteste penser au fait que richie trashmouth tozier se fasse vomir. lui qui passe son temps à sourire et se moquer de tout, se sent assez mal dans son corps pour s'infliger une pareille douleur. bien sûr qu'il a remarqué que richie est plus mal en point ces derniers temps, et même s'il ne l'avait pas vu, beverly lui en parle assez ; mais il n'a pas envie de se confronter à cette réalité, il veut garder cette image de richie qu'il se construit dans ses rêves, un richie sans faiblesse. il refuse de croire que richie est brisé.