Chapitre 19

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« Il y a des larmes d'amour qui dureront plus longtemps

Que les étoiles du ciel»

-Charles Péguy

Contrairement à son habitude, Morad arriva le dernier. Il avait par contre son habituelle apparence imperturbable.

- Au travail, aboya-t-il, en faisant sursauter quelques-uns qui discutaient ensemble. Nous ne sommes pas ici pour nous reposer.

Cléophée n'eut plus aucun doute quant à l'humeur du souverain ; quelque chose le perturbait et elle se doutait que c'était elle.

Morad leur demanda de prendre des poses de yoga afin de se réchauffer. Quelques instants plus tard, l'entraînement commença et Morad fit le tour des Semi-Syrès afin de voir leur progrès. Cléophée, quant à elle, continua ses étirements en grelottant : elle regrettait amèrement de ne pas être retournée chercher un vêtement plus chaud. Ses yeux peinaient à rester ouverts et elle s'efforça de trouver une posture qui la garderait réveillée. Sam n'était pas là ce jour-là, ce qui la laissait sans compagnon d'entraînement.

- Où est Sam ? demanda Cléophée à Kimberly.

Celle-ci eut un petit rire.

- Probablement qu'il ne s'est pas levé à temps. Ça lui arrive souvent.

- Et Morad ne dit rien ?

- Il a abandonné la bataille depuis longtemps. Personne ne changera Sam...

Pourtant, elle se retrouvait sans partenaire pour la journée. Celle-ci risquait d'être fort ennuyante. Elle étouffa un bâillement tandis que Morad s'approchait d'elle. Elle fit mine de l'ignorer, se concentrant sur sa position de yoga. Morad, qui avait un excellent sens de l'observation, remarqua immédiatement les cernes noirs sous les yeux de la jeune fille. Il se demanda s'il avait bien fait de la laisser partir de chez lui. Elle ne semblait pas en très grande forme.

- Regarde-moi, lui ordonna-t-il alors qu'elle prenait la posture de l'arbre.

Elle leva la tête vers lui ; Morad s'était approchée d'elle et la fixait droit dans les yeux.

- Quoi ? fit-elle, agacée.

- Pourquoi sembles-tu si fatiguée ? lui demanda-t-il.

- Ce n'est pas de tes affaires, répliqua-t-elle d'un ton tranchant. Ou plutôt, ce n'est plus de tes affaires.

Morad leva son poignet, qui se retrouva directement dans le champ de vision de Cléophée. Le bracelet qu'elle lui avait offert y était attaché.

- Ça l'est toujours, et aussi longtemps que nous serons liés, toi et moi, je me ferai du souci pour toi...

- Ma santé va très bien, le coupa-t-elle. Merci de t'en préoccuper.

- Alors pourquoi ces cernes sous tes yeux ?

Cléophée resta silencieuse en chantant mentalement une chanson afin que Morad ne devine pas qu'elle avait lu toute la nuit ? S'il l'apprenait, il lui reprocherait sûrement son manque de discernement. Elle détestait qu'il la prenne pour une enfant.

Elle répondit donc en haussant les épaules.

- Dans ce cas, conclut Morad, je crois que tu devrais revenir chez moi.

La jeune fille s'apprêtait à répliquer, mais elle sentit quelques regards sur eux.

- C'est indispensable que tu sois au meilleur de ta forme pour demain, alors j'insiste pour que tu viennes à la maison.

La Saga des Syrès : Dévastation ( tome 3) (TERMINÉ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant