V- Le Pitonnoir

12 2 0
                                    


Quand j'ai rouvert les yeux j'ai été aveuglé par le soleil, j'étais allongé, à moitié couvert par l'ombre projetée par le feuillage d'un arbre. J'ai regardé autour de moi en me redressant et ai vu mes amis. Apparemment tout allait bien puisque Karan était en train de se plaindre, Toshiko se dépoussiérait pendant que Kejay regardait autour de lui aussi stupidement que moi. On venait de faire une chute depuis le septième ciel sans mourir, quoi de plus normal pour lui que crier :

« Bon sang mais dites moi que c'est un rêve !

-Je crois bien que non. Lui répondis Karan »

Ce dernier ne semblait pas croire à ses propres propos et continuait de juger son Rubix cube. J'ai regardé le ciel encore une fois, le soleil était filtré par un nuage couleur graphite.

« Les mecs on ferais mieux de bouger ça à l'air de se couvrir ».

Ils on hoché de la tête comme approbation, l'atmosphère était clairement tendue et personne n'osait dire quoi que ce soit. Je pense qu'on était en train de réaliser ce qu'il se passait, on était mort durant un voyage scolaire, on avait été emporté dans l'au-delà où on avait appris que la vie est éternelle et que l'on allait se faire ressusciter dans un tierce monde : de quoi péter les plombs en effet. J'ai analysé la situation : je ne savais même pas où et quand on était ou même le fonctionnement de ce monde. De ce que je pouvais voir c'est que l'on se trouvait dans une genre de clairière et qu'il y avait ... deux ? ... soleils ? Bon ! Stop les questions j'ai échappé deux fois à une mort définitive je ne veux pas me cramer le cerveau maintenant !

C'est alors que j'ai remarqué que Kejay pointait vers notre droite :

« Il y a une ville là bas on ferais mieux d'y aller.

-En effet il y a plus de chances de trouver un abri là bas. »

La ville en question semblait être plus un village de campagne bien qu'il soit étalé, il n'y avais à première vue ni immeubles ni autres infrastructures témoignant de l'activité d'une grande ville habituelle. La plupart des maisons étaient à colombage, ça m'a rappelé l'Alsace quand on avait été en France avec mes parents. J'ai vite regretté d'avoir pensé à ça quand les larmes ont commencé à monter. Bien sur j'étais content d'avoir la chance de pouvoir reprendre ma vie là ou je l'avais laissé sur terre mais d'un autre coté j'avais perdu tout le reste. Était-ce vraiment mieux de vivre ainsi que vraiment recommencer à zéro ? Aujourd'hui je peux dire que le choix qui nous avait été imposé était le plus juste.

On a continué de marcher en silence en croisant nos regards de temps en temps mais toujours en gardant le silence. Au bout d'une demi-heure, peu après avoir franchis les portes de la ville, la pluie a commencé à tomber. Il nous a bien fallut dix minutes de plus pour atteindre le centre, on était alors trempés et on commençait à greloter. On cherchait tous du regard une auberge ou quelque chose du genre, évidemment la place centrale n'en manquait pas mais où aller. C'est alors que je me suis figé, j'avais remarqué que ce monde était en retard sur le notre : pas de voiture en vue (tout du moins à cet instant), les lampadaires éclairaient les rues à la flamme et il n'y avait aucun écran, panneau de signalisation ou balisage routier. Dans cette atmosphère que faisait un cybercafé ici?

« Les gars vous trouvez pas que ça n'a rien à faire ici ? »

Ils se sont alors tournés vers moi, j'ai désigné la vitrine et ils ont parus fondre sur place. J'ai alors proposé :

« On rentre ? »

Il se sont contenté de hocher la tête et on a avancé vers le bâtiment. De près j'ai pu lire l'enseigne qui surmontait la porte : « Bar E-sport Le Pitonnoir ». Derrière la vitrine teintée j'ai alors vu des tours de PC clignoter et des écrans en veille. Je n'y croyais pas, c'était la première forme de technologie que l'on croisait. On s'est alors regardé cherchant des réponses mais apparemment aucun de nous n'en avait. On s'est finalement décidé à rentrer, moi en premier. J'ai poussé la porte, et, à peine y avait-il un jour de quelques centimètres qu'un son de sonnette retentis dans l'enseigne. Mais pas n'importe quelle sonnette, un son de vieux Windows XP au démarrage. Sur le coup je n'ai pas réagis, ce n'est que plus tard que j'ai vraiment saisis ce détail. De toute façon, j'aurais difficilement être plus perturbé que je ne l'était déjà.

On a franchis la porte pour arriver dans une grande pièce rectangulaire. Les murs étaient à dominance noire avec des touches de blanc. L'éclairage néon bleu donnait un coté à la fois rétro-américain et E-Tron futuriste. Plusieurs moniteurs accrochés au plafond et sur le mur derrière le bar diffusaient des infos dont je ne comprenait rien. Le bar à l'américaine se trouvais sur le mur du fond, des néons étaient fixés sous le tablier faisant ressortir les chaises hautes alignés devant. Des robinets et des machines a café chromées s'alignaient sur les étagères murales bardées de bouteilles diverses. Au centre de la pièce s'alignait des ordinateurs sur une grande table à la droite du bar, au dessus de ceux-ci se trouvait une pancarte sur laquelle était écrit « ESPACE GROUPES ». Devant nous se trouvait deux ilots de vaisselle, à notre droite d'autres ordinateurs sur des tables individuelles étaient alignés en deux rangs parallèles à la vitrine annotées d'une pancarte « INDIVIDUEL ». Contrairement aux bars classiques il n'y avait pas de chaise mais seulement des fauteuils à roulettes noir.

Avant que je puisse continuer à juger du confort intérieur du bar, quelqu'un nous a abordés depuis le comptoir.

C'était un homme d'environ trente-cinq ans, les cheveux blonds courts, les yeux entre le bleu et le vert, il était muni d'une tenue de serveur noire et blanche. Il nous souriait bien que l'on aurait difficilement fait une mine plus désorientés. Il a saisi un carnet :

« J'écoute ? »

On s'est regardé mais aucun de nous ne semblait disposé à commander. Il a alors ravalé son sourire et a commencé à nous juger du regard :

« Airbus A380 ! »

On a tous eu un petit sursaut à ce moment. N'empêche, pourquoi ?! J'ai pus me retenir de lui demander :

« Vous faites une fixation sur les avions ?

-Vous, nous dit t-il en nous passant en revue, vous êtes terriens... »

On s'est regardé pour finalement hocher de la tête.

« Président des états unis ? 

-Donald Trump. Répondis Karan sans conviction.

-Et merde je savais que ça arriverait ! »

Il y eu un gros blanc. Des centaines de questions me taraudaient dans la tête, qui il était, pourquoi connaissait-il la Terre. Mais finalement une unique question répondait à toutes les autres:

« Vous êtes aussi terrien c'est ça ?

-Affirmatif petit, et si tu te poses la question, oui j'ai suivit le même chemin que toi il y a 25 ans. »

Conclusion, il était mort et était ressuscité ici comme nous. Mais pourquoi avait-il ses souvenirs ? Yokami nous avais pourtant assuré que l'on oubliait notre monde d'origine lors du passage au « paradis ». A moins que... Mais bien sur ! Il s'est écoulé 25 ans depuis sa mort donc il avait forcément moins de 18 ans à l'époque ! C'est ça ce qu'il voulait dire par « le même chemin que toi » ! Avant que je puisse faire quoi que ce soit Kejay s'est imposé dans la discussion :

« Et vous aussi vous êtes mort donc...

-A huit ans, je rentrais de l'école, mon père se trouvait de l'autre coté de la route, je me suis précipité et ai malheureusement traversé la route. La tristesse se lisait sur son visage. Au mauvais endroit au mauvais moment comme on dit ! »

Clairement il se forçais à sourire. J'ai préféré clore cette discussion avant de faire remonter des souvenirs trop douloureux. Je venais moi aussi de vivre un truc du genre, et même si l'état de choc m'empêchait de pleurer je ne voudrais pas que l'on m'interroge là-dessus.

« Je prendrait un café avec du lait s'il vous plait. »

J'ai regardé les gars pour les inciter à faire de même. Ils ont prit des cafés aussi. A vrai dire je pense qu'ils n'ont pas trop réfléchis. Il a pris en note la commande avant de contourner le comptoir et se diriger vers la table de groupe. Il a alors actionné les interrupteurs qui se situaient sous les différents postes et les écrans se sont alors rentrés dans la table dégageant les 4 places du centre.

« Mettez vous là je vous apporte ça, pour les manteaux vous pouvez les mettre sur les chaises. Je me permet de rentrer les postes je pense que l'on a de quoi parler ».

New Life New WorldsWhere stories live. Discover now