Chapitre 9

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— Où est-ce que tu m'emmène encore?

Nate ne s'attarde pas à me répondre. Il me sourit à peine et m'ouvre la porte de sa Chevy Impala, qu'il semble avoir fraichement lavée. À l'intérieur, il y a une bonne odeur de produit nettoyant, avec ce qui me semble être un faible arôme de fraise... Je n'arrive pas très bien à la déchiffrer. Le long banc en cuir à l'avant se met à s'étirer sous mon poids, et provoque un son qui ressemble à un craquement, à une friction légère.

Nate prend place du côté conducteur. Je l'observe du coin de l'œil en me demandant ce qu'il a en tête, là, maintenant. Il sait très bien que je n'accepterai pas de retourner dans la forêt seule avec lui, qu'importe à quelle point le début de la soirée m'a paru agréable la première et dernière fois où j'y suis allée. Ce serait stupide de ma part de prendre le risque de le laisser m'abandonner encore une fois au beau milieu de la nuit, entourée d'arbres sans feuille et de recoins sombres à chaque endroit où mon œil s'arrête.

— Je suis prêt à parier que tu aimes les randonnées nocturnes en forêt, dit-il, nonchalamment, en démarrant la voiture qui se met à vrombir comme un gros chat.

Je lui lance un regard en coin que je qualifierais de meurtrier, mais il se contente de sourire.

— Non ? S'étonne-t-il, sarcastique, et me jette un regard. OK, c'est trop tôt, j'ai compris.

Qu'il soit trop tôt ou non, ses blagues ne me font pas rire. D'après ce qu'il m'a fait comprendre, il ne connait rien à mon passé, ou alors il n'en a rien à faire.

Je ne prends pas la peine de lui répondre et me retourne vers la fenêtre de l'Impala, bien déterminée à ne pas lui donner la satisfaction d'une soirée réussie.


Lorsque la berline s'immobilise, je suis étonnée de remarquer que nous sommes devant le Roller Disco. Nate coupe le moteur, laisse tomber le bras qu'il avait nonchalamment posé sur le dossier du siège et ouvre sa portière. Pendant de longues secondes, je scrute les environs sans savoir comment la suite de la soirée risque de se passer

Un faible brouillard flotte très bas dans la petite rue de Brooklyn, où, pour changer de chaque endroit de la Grosse Pomme, il n'y a que très peu de passants. Au loin, j'entends les bruits agressants des klaxons qui ne s'arrêtent jamais, ici. Malgré la luminosité particulièrement basse des lampadaires de la rue, je n'ai aucun mal à voir la porte du Roller Disco s'ouvrir et se fermer à la suite de petits groupes de gens qui quittent et qui arrivent.

— Alors, t'en dis quoi? me demande Nate, en se posant derrière moi, les mains dans les poches.

Je me retourne lentement vers lui, incertaine.

— Rassure-moi, lançais-je, en plissant les paupières. Tu n'as pas l'intention de te prendre pour un héros de film, avec ton idée sortie tout droit d'une vieille romance à l'eau-de-rose ?

Un sourire en coin, il passe sa langue sur le piercing à sa lèvre inférieure. C'est tellement surfait, mais bon sang, ce que ça me plait. J'ai l'impression que cet homme a le sens du théâtre. D'une certaine façon, il sait toujours quels gestes faire, quelles paroles il doit dire pour obtenir ce qu'il désir.

— J'ai cru que tu raffolais des romances, pourtant, murmure-t-il, en me précédant pour parvenir à l'entrée.

J'espère réellement qu'il ne croit pas que je suis l'une de ces filles folles de lui qui passent leurs temps libres à lui tourner autour et à souhaiter passer par son lit au moins une fois dans leur vie. De toute manière, je crois avoir été suffisamment claire dans chacune de mes actions. Je ne cherche rien de sa part.

LotusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant