Lotus

Chapitre 54

Lory

Mon cœur fait un saut périlleux dans ma poitrine.

Ce n'est pas possible, ça ne peut pas être vrai. Je suis en plein cauchemar ! Logan ne peut pas être devant moi !

Mon premier réflexe est de claquer la porte le plus rapidement possible, mais son pied se glisse dans la fente juste avant que j'aie le temps de la refermer. Sa main l'empoigne, je la vois juste devant mon visage... Ses longs doigts qui se sont donnés tant de plaisir à me torturer durant des jours et des jours.

— Je vois que je t'ai manqué, siffle-t-il, doucement, en poussant sur la porte pour l'ouvrir à nouveau.

Je me mets à trembler. Un frisson, que je n'avais plus ressenti depuis un bout de temps, traverse mon corps, qui réagit à mes émotions avec une intensité multipliée.

Son visage... Plus je le regarde, et plus je réalise que chacun des traits de ce maudit visage ne s'est effacé de ma tête depuis tout ce temps. Il est exactement comme dans mes souvenirs; ses yeux verts pétants, des cheveux blonds en bataille, un look de geek... Les airs de détraqués en moins, aujourd'hui il a l'allure d'un jeune garçon modèle.

Pourtant, je sais que le Diable se cache sous cette peau d'ange.

Calmement, il pousse les petites lunettes rectangulaires qu'il porte sur son nez avec le bout de son auriculaire. J'aimerais hurler assez fort pour que tout New-York puisse m'entendre... Je n'avais plus revu cet homme depuis plus de cinq ans. Il a hanté mes nuits durant des années, mais jamais je n'avais cru qu'un jour, il frapperait à ma porte.

Je ne l'espérais pas.

Après quelques secondes à le regarder dans le blanc des yeux, je prends mes jambes à mon cou pour contourner le comptoir de la cuisine et m'armer d'un couteau de cuisine tranchant. Quand je me retourne brusquement pour le brandir dans sa direction, je remarque qu'il entre lentement dans l'appartement, sans se précipiter... J'analyse ses mouvements.

Avec un petit sourire qu'il ne tente même pas de dissimuler, il lève ses avant-bras, en signe d'innocence.

— Lory... Je veux simplement discuter avec toi, déclare-t-il, d'une voix grave et lente.

Je crois remarquer qu'il a changé, depuis la dernière fois que je l'ai vu. Ses cheveux sont plus courts, sa voix, plus mature, et il semble plus grand. Il a pris de la masse musculaire. Il ne ressemble plus au jeune perturbé qui m'a enfermé dans un sous-sol pendant des jours, mais ça ne suffit pas à me tromper.

Son regard ne ment pas.

— Qu'est-ce que tu veux, Logan ?! Hurlé-je, appuyée contre le coin du comptoir. Tu n'as pas le droit de t'approcher de moi !

Il ignore mes paroles d'un revers de main élégant. On dirait qu'il a appris le self-control, en prison, parce qu'il n'avait pas ce sang-froid et ce calme sidérant, quand je l'ai rencontré. Il avait l'air d'un fou, incapable de contrôler ses émotions. Il se tirait les cheveux, essuyait constamment la sueur sur son front... Je me souviens de ses tics, qui l'empêchait de parler correctement. Ça aussi, ça semble être disparu.

— Je t'en prie, dit-il, d'un ton las et imperturbable. Ne nous emballons pas. Je ne suis pas là pour te faire du mal, ma douce... Tu as beaucoup muri, depuis la dernière fois ! Tu es ravissante, Lory.

Je le vois détailler ma tenue, et un haut le cœur traverse mon corps. Je ne regrette pas mon choix.

Il fait un pas devant, et je m'apprête à reculer quand je me heurte au comptoir. Je lève le couteau vers lui, mais il ne bronche pas. Son sourire est subtil, sauf qu'il ne m'échappe pas... Je ne connais pas ses intentions. Ça me rend dingue de penser qu'il est devant moi.