Chapitre 6

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Ce midi-là, tandis qu'Alya et Nino mangeaient au collège, Marinette et Adrien rentrèrent chez leurs parents respectifs, chacun de son côté. C'était quasi systématique pour le jeune homme, son père préférant le savoir à la maison, beaucoup plus rare pour la jeune fille, qui aimait passer du temps avec ses amis. Ils échangèrent un regard au moment de se séparer, un regard profond.

Il ne cessait de se demander comment, décidément, il avait fait pour ne pas s'apercevoir plus tôt du fait qu'elle était Ladybug. Cela lui paraissait désormais tellement évident ! Bon, il fallait bien reconnaître, aussi, qu'il s'attendait à ce que l'apparence physique de sa partenaire change beaucoup et, surtout, que Marinette ne l'avait jamais vraiment regardé comme ça auparavant, avec un regard aussi ferme et droit. Elle réservait plutôt cela à leurs camarades de classe, en fait, habituellement...

Mais, clairement, Ladybug était ce qu'elle était parce qu'elle était Marinette, il n'y avait pas le moindre doute là-dessus.

À peine rentré chez lui, Adrien se dirigea vers Nathalie pour lui indiquer qu'il avait un travail de groupe à faire, ce soir-là. Quand elle lui demanda où cela devait avoir lieu, il lui indiqua que ce serait chez sa camarade de classe Marinette et, après une hésitation manifeste, elle opina sans le moindre commentaire, au grand soulagement du jeune homme. Pressé de retourner au collège, il mangea rapidement et demanda à son chauffeur de le déposer au plus tôt.

Malheureusement pour lui, Marinette n'était toujours pas revenue de chez elle quand il franchit les portes du collège. Il hésita à rejoindre Alya et Nino, qui discutaient à voix basse. Il n'aimait pas trop tenir la chandelle, et préférait généralement les laisser vivre tranquillement leur relation. Néanmoins, tandis qu'il attendait dans un coin relativement discret, il vit leur conciliabule s'élargir.

Rose et Juleka, tout d'abord, rejoignirent ses amis, rapidement suivies par Mylène et Alix. Adrien se demanda de quoi ils parlaient ainsi tout en faisant de grands gestes. S'était-il passé quelque chose de spécial au collège en son absence ? Intrigué, il s'approcha. Aussitôt, le silence se fit dans le groupe et une espèce de malaise se mit à flotter.

Adrien s'inquiéta. Ils n'avaient tout de même pas découvert qu'il était Chat Noir ? Pire encore, ils n'avaient tout de même pas découvert que Marinette était Ladybug et qu'il était Chat Noir ? Après un coup de coude pas très discret de sa petite amie dans les côtes, Nino se précipita vers Adrien et l'entraîna vers un banc, quasiment de l'autre côté de la cour.

— Euh... tout va bien ? vérifia Adrien, toujours passablement perturbé par ce qui venait de se passer, et réellement inquiet pour leurs identités secrètes.
— Ouais, ouais, t'inquiète, mon pote. Elles sont plongées dans des discussions de filles, des trucs futiles, tu vois le genre ?
— Euh... ouais... mais... T'es sûr ? Parce que j'ai l'impression que tu les dérangeais vachement moins que moi...
— Bah, c'est parce qu'elles n'avaient pas dû faire attention à moi avant ton arrivée, assura Nino sur un ton insouciant tout en s'étirant vers l'arrière et en nouant ses bras derrière la tête.
— Si tu le dis... marmonna Adrien, pas vraiment convaincu.
— Alors comme ça, ton daron t'a laissé revenir plus tôt que d'habitude ? C'est cool ! On n'a jamais assez de temps pour parler, avec l'emploi de temps de dingue qu'il t'impose...
— Ah, euh, ouais... bredouilla Adrien en se frottant la nuque nerveusement. Enfin je ne lui ai pas vraiment demandé, en fait, je ne l'ai pas croisé. Tu préfères que je revienne plus tôt tous les midis ?

Nino opina vigoureusement, un large sourire aux lèvres.

— Ça, je devrais pouvoir m'arranger pour le faire, alors. C'est vrai que c'est sympa d'avoir plus de temps ici plutôt que... plutôt que là-bas... termina-t-il à mi-voix, tandis que Nino posait une main compatissante sur l'épaule de son meilleur ami.

Tout en discutant, les deux garçons ne cessaient de regarder vers le groupe de filles, qui papotaient toujours. Lorsque Marinette rejoignit finalement celles-ci, peu avant la sonnerie, Adrien se redressa machinalement sur son banc et un large sourire s'épanouit sur son visage. Il ne prêta absolument pas attention au regard appuyé que lui jeta Nino en se penchant vers lui.

En revanche, il ne manqua pas de remarquer que, comme pour lui un peu plus tôt, les discussions des filles s'étaient brusquement arrêtées à l'arrivée de Marinette. Le jeune homme ne put s'empêcher de sentir à nouveau les mêmes craintes. Après tout, Alya était la créatrice du Ladyblog, cela faisait des mois et des mois qu'elle cherchait à percer l'identité de Ladybug...

C'était même étonnant, d'ailleurs, qu'elle n'ait pas identifié sa meilleure amie plus tôt... Ce qui, finalement, le faisait se sentir un peu moins bête de ne pas avoir osé associer pour de bon ces deux filles extraordinaires avant le moment où l'évidence lui avait crevé les yeux. Néanmoins, il devait protéger à tout prix son secret et celui de sa Lady.

Fort de cette résolution, Adrien se leva de son banc sans un regard en arrière et retourna à grands pas vers ses camarades de classe. Il entendit vaguement Chloé l'interpeller depuis un autre coin de la cour, mais n'y prit pas garde. Il avait bien plus important en tête : Marinette et la sécurité de celle-ci. Lorsqu'il rejoignit les filles, elles se turent à nouveau et se tournèrent vers lui d'un seul mouvement.

— Euh... je crois que ça va bientôt sonner... indiqua-t-il sur un ton embarrassé, tout en se frottant la nuque. On devrait peut-être aller en classe...

Marinette lui fit un petit sourire timide, qu'il considéra comme un gros progrès, par rapport à la veille, et se tourna vers Alya pour l'entraîner vers leur salle de cours. Nino rejoignit Adrien et, tout en lui emboîtant le pas à la suite des filles, lui glissa discrètement, sur un ton complice :
— Dis donc, mon pote... t'as l'air d'en pincer sacrément pour elle, hein...

Adrien sursauta vivement et se tourna vers son meilleur ami avec une expression paniquée sur le visage.

— Hein, non mais pas du tout, attends, je ne vois pas du tout ce que tu veux dire, Nino !

Celui-ci le regarda avec un petit sourire entendu. Adrien déglutit, se sentant brusquement transparent. Cela se voyait tant que ça, ce qu'il ressentait pour Marinette ?

— Ne... ne lui dis rien, s'il te plaît... s'empressa-t-il de supplier sur un ton pressant. De toute façon, à quoi bon ? Ce n'est sûrement pas réciproque...

À ces mots, Nino éclata brusquement de rire, se tenant les côtes. Adrien s'arrêta et le fixa les sourcils froncés, se demandant ce qui arrivait à son meilleur ami. Il était certain de n'avoir rien dit de drôle, pourtant ! Nino ne voulut absolument rien lui dire concernant la cause de son hilarité. Les deux garçons rejoignirent leur salle de classe et se glissèrent directement à leurs places.

Adrien sentit un profond soulagement le gagner lorsque Marinette, loin de se cacher derrière un livre pour éviter son regard, se comporta à peu près de la même manière que d'habitude vis à vis de lui. Leurs yeux se croisèrent rapidement et elle lui fit un petit sourire, ses joues se teintant d'une nuance de rose qu'il se refusa à tenter d'analyser.

L'après-midi parut absolument interminable au jeune homme. Il eut énormément de mal à se concentrer sur ses cours. Réalisant que c'était probablement l'une des raisons pour lesquelles il valait peut-être mieux qu'ils ignorent leurs identités respectives... En même temps, s'il n'était pas autant épris d'elle, et s'il ne se faisait pas autant de reproches pour avoir levé malgré elle ce secret, il serait sûrement bien plus attentif...

Évidemment, la sévère madame Mendeleiev n'était absolument pas sensible aux atermoiements du jeune homme, et il faillit écoper d'une remarque sur son carnet de liaison. Inquiet à l'idée des risques que cela pourrait faire courir à sa présence au collège, risques qu'il n'était absolument plus prêt à prendre, Adrien se secoua et se força à se concentrer au maximum, au moins durant cette heure de cours-là. Même s'il lui était vraiment difficile de détourner ses pensées de Marinette, c'était un mal nécessaire.

La (très) grosse bourde de Chat NoirDonde viven las historias. Descúbrelo ahora