Chapitre 20 : Le Roman de Silence

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- Je ne te dérange pas ? rétorqua la voix douce de la jeune fille, qui sonnait à ses oreilles comme une mélodie revenue de loin.

- Non, non, pas du tout.

Il avait répliqué sans réfléchir. C'était bon d'entendre cette voix, cette mélodie, plus qu'il ne voulait se l'avouer.

- Je peux entrer ?

- Je t'en prie.

Elle passa devant lui, et le précéda dans l'entrée. Ce qu'ils faisaient un couple mal assortis, à les voir près l'un de l'autre ; lui dans son costume impeccablement repassé, elle sous un manteau trop grand, emprunté à qui ? Elle ne le savait même plus.

- Tu veux boire quelque chose ? Vin, mousseux, thé...

Elle baladait son regard dans la pièce, comme pour s'assurer que rien n'avait changé. C'était le cas. Le piano, le vieux service à liqueurs, les tableaux... Tout était là. Alain la regardait faire, et il fut pris de cours lorsqu'elle se retourna et, d'un pas lent et déterminé, s'approcha pour l'embrasser. Aussitôt, il s'abandonna à la sensation familière et nouvelle. Cette douceur des lèvres, cette irrésistible langue, il redécouvrait tout. Elle ne s'était pas arrêtée là et avait très vite débouclé la ceinture de l'homme. C'était inévitable, Alain la déshabilla sur place et découvrit avec incrédulité les deux nouveaux bijoux qui ornaient les seins de la belle brune.

- Bon dieu... Tu es folle, marmonna-t-il, mais il ne put s'empêcher d'approcher sa bouche des somptueux trésors. Il ne la retint pas lorsqu'elle s'agenouilla devant lui, son regard coulant de biais sur elle. 


***


Alain conduisit Julia à la chambre et décida d'honorer leurs retrouvailles en multipliant à son égard les caresses et les attentions amoureuses. Ce n'était pas ce que Julia recherchait. Elle se montrait froide, le regard habité par un démon plus grand que le désir, et Alain avait fini par céder lui aussi à cet accès de sauvagerie.

Affalé dans le lit, il regardait le plafond comme si le ciel des Idées s'offrait à sa vue.

- Ça fait des lustres que je n'ai pas fait l'amour comme ça, commenta-t-il avec un air de béatitude.

Assise sur le bord du lit, Julia ne répondit rien. Elle reprit une bouffée de sa cigarette et questionna l'étrange nœud qui se formait dans son estomac. Était-ce un nœud, d'ailleurs, ou du vide ? L'un ou l'autre, pourquoi était-ce si douloureux ? Alain étendit un main pour lui caresser le dos, mais Julia se leva au simple contact et commença à réunir ses affaires.

- Qu'est-ce que tu fais ? demanda-t-il.

- Je dois rentrer.

En cet instant, le regard de l'homme perdit en sérénité. Il réalisa que depuis qu'elle s'était présentée à sa porte, sa voix avait été d'une égale froideur.

- C'est ridicule, reste ici pour la nuit. Je te ramènerai demain.

Julia ne semblait pas l'entendre, elle continuait de s'habiller.

- Alors je te retrouve à peine et tu t'en vas déjà ?

Des lèvres de la jeune fille s'échappèrent un bref « Merci pour cette soirée ».

Il la regardait s'affairer, impuissant. Il savait que c'était peine perdue, qu'il ne pourrait la retenir. Il s'était fait à l'idée. Elle finissait toujours par s'enfuir. 

- Eh bien... Si tu comptes vraiment t'en aller comme une voleuse, viens au moins embrasser une dernière fois ton vieil amant.

Le nœud dans l'estomac menaçait à présent la gorge de Julia. C'était du dégoût, elle le reconnaissait à présent. Mais du dégoût pour qui ? Elle n'en était pas sûre.

Parle-moi du bonheur (professeur-élève) - TERMINÉEWhere stories live. Discover now