8. Révélation

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La voir ainsi blessée me brisa le cœur.

Mais comment lui expliquer que je n'avais pas eu le choix de le confier à Ted ?

- Écoute Megan...

- Ne dis rien ! coupa-t-elle. Vous n'êtes tous que des traîtres.

Je cherchai un peu de soutien auprès de Teddy, mais celui-ci étant dans le même état que tout à l'heure ne me fut d'aucune aide. Qu'est-ce qui lui arrivait, bon sang ?

- Megan ! persévérai-je en me mettant debout à mon tour.

Elle recula, une main devant elle, comme pour chasser un mauvais esprit.

Je l'implorai du regard.

- Ma première meilleure amie m'a trahie.

- Je ne suis pas ta première meilleure amie ! s'écria-t-elle, vexée.

Elle était au courant que j'avais été harcelée à New-York, mais elle n'avait jamais su pourquoi. C'était très difficile pour moi d'aborder ce sujet, mais je devais aller jusqu'au bout, pour une fois.

- J'ai vécu l'enfer, Meg !

Je me maudis d'avoir la larme aussi facile, surtout avec le souvenir qu'à l'époque ceci faisait le bonheur de mes anciens persécuteurs.

Je m'épongeai les joues avec la manche de mon pyjama et racontai en fixant mes pantoufles :

- Je n'ai jamais ressenti de l'attirance pour les garçons. Quand j'ai enfin compris ce que cela impliquait, je venais à peine d'avoir treize ans. J'ai pris peur et j'ai fait l'erreur de me confier à Rachel...

Ma gorge se noua et mes joues se transformèrent très vite en rigoles.

- Elle l'a dit à tout le monde, poursuivis-je d'une voix chevrotante. Et elle a rajouté que j'ai voulu la...

Mes bruyants sanglots me coupèrent la parole. Ce ne fut que grâce à l'expression désormais mi-confuse, mi-attendrie de Megan que je trouvai la force de continuer.

- Avant tout ça, tout le monde ignorait ma petite taille et mes bourrelets...  Quand les premières moqueries ont commencé, j'ai voulu mourir... J'étais noire, grosse, et lesbienne... Le middle school a été juste horrible... Déménager ici fut ce qui m'est arrivé de mieux. Mais la peur de revivre tout ça ne me quitte jamais. Ne m'en veux pas trop, Meg !

- Je ne suis pas cette fille ! répéta-t-elle d'une voix ferme, mais sans acrimonie cette fois. Et Portland n'est pas New-York !

Je m'essuyai à nouveau les joues et réalisai que Teddy était sorti de sa transe et qu'il me fixait avec compassion. C'était la première fois que je m'ouvrais autant sur cet épisode de ma vie  J'étais déjà trop heureuse qu'ils ne se furent pas enfuis en courant.

- Je sais que tu ne seras jamais comme elle, reconnus-je. Je le sais au fond de moi. Mais quand tu es lesbienne, tout le monde s'imagine que tu craques pour toutes les filles de ton entourage. Je n'ai pas pu m'affranchir de la crainte que ça devienne bizarre entre nous.

- Je ne suis pas tout le monde, dit-elle en détachant chaque syllabe.

- Je suis désolée, Meg.

J'aurais dû le lui avouer plus tôt. Je regrettais tellement.

- Ted l'a su avant moi, pointa-t-elle, comme si ce point était le plus difficile à digérer.

- En fait, elle m'a embrassé, intervint le rouquin pour la première fois.

- Quoi ? s'étrangla Megan.

Plus elle en découvrait, plus je me sentais coupable. Je baissai à nouveau la tête, les épaules lourdes.

Héroïne [ÉDITÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant