Zinnaora

Chapitre 5 : Déstabilisé

Je marchais sur le chemin du retour, regrettant de ne pas porter un chandail un peu plus chaud. Je me croisais les bras en essayant de conserver le plus de chaleur possible. J'accélérais le pas, pressée d'arriver à la maison. Quelque chose d'étrange s'était produit ce matin, Vincent me regardait bizarrement depuis. J'étais restée avec eux pour le lunch, mais j'avais décliné l'offre pour le prochain cours. J'étais mal à l'aise d'être entourée d'autant de personnes. Lorane, une amie de longue date de Vincent ne cessait de raconter des histoires sur leur passé, ce qui me rappelait une fois de plus que c'était impossible pour moi d'en faire autant. Lorsque nos chemins se sont séparés, à la sortie de l'université, ils se sont éloignés, riant d'une plaisanterie de Julian. Vincent s'était retourné, déposant son regard sur moi, il y avait une lueur dans ses yeux, mais je n'arrivais pas à identifier ce qui l'agaçait.

Chaque personne que je croisais pendant ce trajet me dévisageait, je sentais leurs regards sur moi ainsi que leurs jugements. Je pouvais lire leurs questionnements dans chacun de leurs traits. J'avais l'impression d'être une intruse parmi ces gens. Plus j'avançais, plus je sentais la panique montée au creux de moi. Je remontais mes lunettes sur mon nez et baissais la tête, énervée. J'accélérais le pas, pour finalement courir jusqu'à l'appartement. C'était avec des mains tremblantes que je réussissais à finalement débarrer la porte d'entrée. Je refermais la porte avec mon dos, me laissant glisser jusqu'au sol, essoufflée.  Je restais assise par terre, la tête appuyée sur mes genoux, jusqu'à ce que ma respiration reprenne son rythme normal. Je relevais finalement la tête, et étendais mes jambes devant moi en soupirant. Je passais mes doigts sur le parquet du salon à l'endroit même ou le soleil le réchauffait de ses rayons.  J'appuyais ma tête sur le métal froid de la porte et refermais les yeux pour calmer mon cœur qui battait encore à tout rompre.

Je n'arrivais pas à me réchauffer malgré le soleil qui plombait sur mes jambes. Je me relevais et me dirigeait vers la salle de bain. Pendant que l'eau chaude remplissait le bain, je me plantais devant le miroir. J'observais mes traits, de plus en plus familiers, intensément. J'attrapais ma queue de cheval pour la remonter en chignon lousse. Je m'installais dans la baignoire, laissant l'eau chaude réchauffer ma peau. Chaque minute qui passait apaisait un peu plus mes angoisses. 

« Zinnaora? » La voix de Vincent me faisait sursauter, j'avais dû m'endormir, puisque l'eau était maintenant froide. « Zinnaora, j'aimerais te parler, est-ce que tu sors bientôt? » 

« Oui, je sors du bain. » Je tirais sur le bouchon, m'enroulais dans une serviette avec mon linge dans les mains. Vincent était debout devant la porte, lorsque je l'ouvrais. Je lui souriais avant de me rendre dans ma chambre pour m'habiller. Je déposais mon linge dans le panier et j'enfilais un survêtement de sport ainsi qu'un t-shirt noir. 

J'allais le rejoindre dans le salon. Il était assis, les coudes sur les genoux, l'air impatient. « Tu voulais me parler? » Je prenais place dans le fauteuil en face de lui. Il frottait ses mains ensemble et posait ses yeux noisette sur moi. Je pouvais voir l'incompréhension sur son visage. Je soulevais un sourcil en attente d'une réponse de sa part. 

« C'était quoi ça? » Je le regardais, ne sachant pas quoi répondre. « Comment as-tu fait ces exercices aussi facilement? » Je haussais les épaules. 

« Je ne sais pas Vincent. Je ne me rappelle pas en avoir déjà fait. » Il soupirait fortement. 

« Je suis en deuxième année d'université, ce sont des cours relativement avancés, et même les gens qui les suivent échouent parfois, et toi, en une demi-séance tu réussis à faire les exercices sans aucune question. » Il s'était relevé, réellement énervé. 

« Je ne sais pas quoi dire, Vince! » Il me regardait perplexe, sa bouche formait une mince ligne. « J'aimerais bien te répondre, mais c'est impossible. »