Chapitre 39 • Enrager éventrer et Souvenir d'une autre époque

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Je n'attendis même pas leur réponse, et filais jusqu'à mon lit. C'était tellement illogique ! Ils me grondaient alors que j'étais plus puissante qu'eux et donc plus à même de me défendre.

Il était vrai que j'avais oublié de les prévenir mais, après ce qu'il s'était passé dans le jacuzzi, je devais me vider la tête et progresser par la même occasion sur l'enquête. Et puis il me fallait aussi un peu d'intimité, je ne pouvais pas être tout le temps en leur compagnie, j'avais besoin d'instants seule avec moi-même.

Alors oui peut-être me comportais-je en adolescente puérile, mais j'avais des droits aussi. Je soupirais, et une idée me vins à l'esprit. Comment avais-je fait pour ne pas y penser avant ? L'ancienne moi devait forcément avoir laissé des traces de ma vie d'avant !

Je me mettais alors en quête d'indices en retournant ma propre chambre. Le dressing ne donna rien, seulement une montagne infinie de vêtements tous différents et plus onéreux les uns que les autres.

Rien non plus dans la salle de bain attenante, il ne restait que la pièce principale. La coiffeuse contenait toute sorte de choses dont majoritairement des bijoux et du maquillage mais rien qui pourrais me renseigner sur moi-même.

Bon sang ! Je ne pouvais pas tenir un journal intime comme tout le monde ? Cela me faciliterait grandement la tâche si j'avais mit par écrit tout ce qu'il se passait ! Mais rien, il me restait les deux commodes, et j'avais beau eut vidé tout les tiroirs, même celui à sous-vêtements, rien du tout.

De rage, je versais leur contenu sur mon lit, et je les envoyais balader à l'autre bout de la pièce. Puis une fois tout le bazar déversé sur les draps, j'attrapais le matelas et le retournais sans effort en grognant.

J'étais furieuse, mais je ne savais plus pourquoi... Pour ne rien trouver sur mon passé ? Ou parce que Léo et Peter m'avaient grondé ? Je frappais de mes poings les oreillers qui ne tardèrent pas à céder sous mes assauts : des nuées de plumes s'envolèrent et s'éparpillèrent tout autour de moi.

Je tombais à genoux, une larme dévalant ma joue, une larme rouge de sang. Je contemplais alors le désastre, tout était sans-dessus-dessous, des affaires, des culottes et plein d'autres choses encore gisaient sur le sol.

Le matelas était étendu et plié dans un coin et les oreillers rouges éventrés un peu partout, vomissaient leur plumes blanches restantes. J'en avais dans les cheveux, accrochées à ma tenue, cela risquait d'être une plaie à nettoyer.

Mon regard s'attarda alors sur un tiroir dont le bois était mal taillé. Rectification, un petit renflement démontrait qu'il y avait quelque chose. Je me saisis de l'objet et déchirait le bois comme s'il s'était agit d'une simple feuille en papier.

Alors je prenais délicatement ce qu'il gardait jalousement caché et le retournais dans le bon sens. Une photographie. Mais pas n'importe quelle photographie.

J'y étais, la qualité prouvait que la photo en noir et blanc n'était pas récente mais on devinait aisément les traits d'une jeune fille, moi en l'occurrence,en robe bouffante et aux bras d'un homme.

De longs cheveux clairs, comme du satin, des yeux captivants que je devinais bleus profonds, et vêtu d'un costume d'une autre époque. Simon.

J'étais collée à son bras et le regardais tendrement, amoureusement. Encore lui, toujours lui, il me hantait, mais les seuls souvenirs que j'avais de lui étaient mes rêves. Alors je serrais timidement la photo fragile contre mon cœur et m'assit dans les décombres de plumes et le cadavre de matelas.

Morphée m'emporta, où peut-être était-ce la fatigue accumulée tout au long de la nuit.        

On me tendit une main dont je m'emparais pour descendre d'une Cadillac grise, d'une autre époque. Je portais avec élégance une tenue composée d'une jupe crayon, m'arrivant en dessous des genoux et d'un chemisier à la taille étranglée style New Look.

Je ne pouvais pas voir ma coiffure mais j'aurai parié qu'elle ressemblait à celle des passantes de la rue bondée. Je grattais nerveusement mon vernis écaillé en observant les alentours. Des hommes travailleurs pressés, des femmes donnant la main à leur progéniture, des voitures de collection, des devantures des bâtiments et des magasins tout me semblait tiré d'un roman à la Agatha Christie.

Simon, car il devait se trouver là, passa son bras sous le mien et m'entraîna vers la porte d'un édifice imposant. Je tremblais d'appréhension alors que je ne savais même pas où il me conduisait.

Dans le hall, une secrétaire blonde, avec ses lunettes rondes et tirée à quatre épingles nous demanda de patienter sur des chaises en cuir noir. Quelques instants plus tard un colosse nous fit signe de le suivre et nous empruntâmes l'ascenseur.

Une musique jazzy très cliché se jouait en fond et balayait le malaise établit entre nous trois. Les grilles s'ouvrirent alors sur un bureau, surplombant la ville et nous donnant une vue imprenable sur cette dernière.

Au mur était suspendus une horloge et des tableaux quelconques et aux plafond des néons blancs éblouissants. Sur un fauteuil juste derrière le meuble principal de la pièce, une élégante jeune femme se tenait droite.

Elle était élancée,mince, ses cheveux blonds courts ondulant légèrement autour de son visage. Une touche de rouge à lèvres pétant faisait ressortir la pâleur de sa peau et ses yeux jaunes d'aigle nous épiaient de façon étrange. Je ne pouvais dire si nous nous connaissions, si nous étions amis ou le contraire.

Elle se leva alors, perchée sur ses talons assortis à sa bouche et nous serra la main sans nous lâcher des yeux. Son regard était déstabilisant et semblait percer tout nos mystères en un clin d'œil.

Elle nous invita à nous asseoir en face d'elle et sortit d'un tiroir un long fume cigarette, elle l'alluma et le porta à ses lèvres. Après avoir tiré élégamment une bouffée,  elle expira vers nous.

L'odeur de tabac m'insupportait et je me retins de justesse de tousser. Son regard étrange navigua de moi à Simon puis elle prit enfin la parole.

''-Simon, j'ai un nouveau travail pour toi.

-A ce propos, nous voulions parler de travail...

-Vraiment ? Il y a un problème ?

-Je veux résigner le contrat.''

Amnésie vampiriqueWhere stories live. Discover now