Première rencontre

4.5K 334 21
                                    

J'apparus dans une ruelle sombre. Je fermai les yeux quelques secondes. Je suis désormais visible aux yeux des humains, j'ai aussi pensé à enlever la fonction 《prédiction de la date de mort》. Je cachai mon aura et sortis de la ruelle, les mains dans les poches. Je me mêlait à la foule. J'appréciais ce sentiment d'être entourée. Même en Enfer, je parlais très peu à part avec les Rois et certains Démons. Mais c'était toujours les mêmes discussions : les mortels, les Anges, les âmes à trier ainsi que les ordres du jour. C'est très lassant, alors parfois, même si je ne porte pas les humains dans mon coeur (ils sont si fragiles !), j'enviais leur comportement normal, comme si seule la vie comptait, de parler simplement de la pluie et du beau temps, de la tante de truc qui est allée promener ses chihuahuas... Ouais, j'enviais ce côté-là, innocent, des mortels.

Alors que je marchais tranquillement quelqu'un me bouscula l'épaule. Je m'arrêtai et me retournai. Personne ne s'était senti coupable pour daigner croiser mon regard évidemment. Voilà ce que je déteste chez eux, la lâcheté, le mépris, l'arrogance... Je serrai les dents et continuai mon chemin. Mais d'un coup, quelqu'un me prit par les épaules et me poussa dans une ruelle pour ensuite me jeter au sol. En une fraction de seconde, je me relevai et me tournai vers mon agresseur. Un homme, grand, cheveux courts. Il me faisait face, la lumière des lampadaires dans son dos.

     - Qu'est-ce que tu veux ? Fis-je légèrement agacée d'avoir été jetée au sol (le type ne bougea pas) Oh putain mais vous les humains vous me... Eh ! Oh ! Oh ! Arrête !

Le type s'était rapproché de moi et me maintenait par le col en me plaquant au mur. Un faisceau de lumière éclairait une partie de son visage. Ses yeux étaient bleus-gris, semblables à un ciel nuageux, une cicatrice s'étalait  sur son cou. Je suivi du regard son bras contracté qui me maintenait, et parmi le nombre incalculable de tatouages, j'en remarquai un sur son avant-bras, plus grand et plus prononcé. Il représentait un flingue avec une rose qui s'enroulait autour.

     - Joli tatouage, fis-je en l'indiquant du doigt.

     - Tu sais ce qu'il représente ?

J'haussai les sourcils et regardai plus longuement le tatouage. J'essaie de trouver un truc crédible parce qu'en fait, ce tatouage ne me disait rien. Quoique, une inscription attira mon attention sur l'arme :

Diabolus autem est in omnibus nobis

《 Un Démon sommeille en chacun de nous 》 du latin je crois. Je connais évidemment. Il s'agit d'une organisation qui regroupe pas mal de trafic et de tueurs à gages. Cette organisation illégale se nomme 《 Diabolus》. J'ai participé à sa création, j'ai aidé le chef. Je l'ai guidé, et puis de toute manière avec son passé, il avait déjà sa place réservée en Enfer. Donc autant profiter à fond et devenir riche. Il a donc créé la plus grande organisation illégale. Drogue, armes, mercenaires... Il a un commerce diversifié et qui rapporte gros. Je l'ai même aidé à plusieurs reprises à échapper aux flics. Je l'ai laissé ensuite gérer puisqu'il se débrouillait très bien, il y a de cela une trentaine d'années. Il doit avoir plus de soixante ans maintenant.

Je reculai, et croisai le regard du type. Il avait  l'air d'être impatient de savoir ma réponse. Je le regardai dans les yeux, puis baissai le regard vers le tatouage. Des souvenirs remontèrent à la surface. J'étais très proche du dirigeant, j'étais celle qui l'écoutais et qui le conseillait. C'était la première fois que j'avais été si proche avec un humain. Je m'étais découvert une autre personnalité auprès de lui. Nous étions complices. Et lorsque j'ai décidé d'arrêter, il avait été très en colère et m'avait dit que tout ce que nous avions fait jusqu'à maintenant ne servait plus à rien si je partais. C'était la première fois que les mots d'un humain m'aient fait du mal.

     - Ouais je sais ce que ça représente, fis-je, Diabolus hein ? (Le type me lâcha et je soupirai en passant ma main sur mon cou) Je connais le patron, mais je ne suis pas sûre que lui me reconnaîtra.

     - Tu connais Monsieur E. ?

     - Ouais, je connais Monsieur E., souriais-je, il n'a pas changé, il a quoi maintenant, plus de soixante ans non ?

     - Soixante-deux, comment peux-tu le connaître ? Il n'a jamais parlé d'une fille comme toi !

     - N'a-t-il jamais parlé d'une Mayra ?

     - Si, mais il ne la plus revue depuis au moins trente ans.

     - Il dirige toujours ? Il faut que je le retrouve.

     - Qui me dit que tu ne veux pas le tuer ?

Je le dépassai sans lui répondre. Mais le type m'attrapa le bras et me tourna vers lui.

     - C'est quoi ton nom ? Me demanda-t-il ?

     - C'est quoi le tien ?

     - C'est... Jay, et maintenant à toi et je t'amène à Monsieur E.

     - C'est Mayra.

Je le vis hausser les sourcils et je me dégageai de sa prise pour continuer mon chemin. Il ne me croira jamais cet humain ! Par contre j'espérais que Monsieur E. n'a pas oublié qui j'étais.

Je me dirigeai dans un parking vide et fis apparaître une sublime Dodge Charger de 1969. J'adore les voitures... et puis autant se faire plaisir quand on en a les moyens ! Je m'installai à l'intérieur et la démarrai. Je n'étais pas loin de la planque principale, un énorme building à l'allure normal, lorsque je remarquai qu'un GMC Sierra noir commençait à prendre la même route que moi. Entrons par l'entrée secrète ! Pensais-je. Je suis la seule personne à part Monsieur E. qui sache où est cette entrée. Décidée à semer le GMC, je reprends les routes les plus fréquentées. Je me gare ensuite à un bar, pour lui donner fausse route. Le GMC se gare à l'opposé  de ma voiture. Il ne va pas me trouver. Je fais signe au barman. Il fut surpris et je souris. Il a dû me reconnaître mais n'y croit pas. Je passai dans les cuisines. J'entre ensuite dans les vestiaires du personnel puis en ouvrant une armoire, je trouvai un digicode. Je tapai le numéro et un bip sonore retenti. L'armoire se déplaça pour révéler un passage qui passe en dessous de la route et qui rejoins le building. Je rentrai et refermai l'armoire derrière moi. Pendant que je me rapprochai de mon ancien ami, je me demandai pourquoi je tenais tant à le revoir, qui n'est pour moi qu'un simple mortel. Mais au plus profond de moi, ce 《mortel》 si commun est le premier ami humain que je n'ai jamais eu. Arrivée en haut, à peine essoufflée  (Je ne suis pas vivante, mon  coeur ne bat pas), je pousse le battant d'une autre armoire poussiéreuse. J'arrive dans une grande pièce, et refermé l'armoire derrière moi. Un bureau trône au milieu avec un fauteuil digne d'un méchant de film. Il y a une baie vitrée avec une vue sur la ville illuminée. Un canapé chic en cuir noir cher est en face du bureau, je m'y installai et attendai patiemment Monsieur E.

Après quelques minutes, j'entendis la porte s'ouvrir. Des pas lourds s'approchèrent de moi puis s'arrètèrent soudainement. A la manière dont les pas étaient espacés et lourds, il s'agissait bien de Monsieur E. car j'ai l'impression qu'il traîne son poids sur ses jambes. Mais je sens, le canon froid d'un pistolet contre mon crâne.

    - Je suis contente de te revoir Edmund ou devrais-je dire, Monsieur E. , fis-je sans lui faire face.

Un clic résonna près de mon oreille, Edmund venait d'enlever la sécurité.

 La Mort Où les histoires vivent. Découvrez maintenant