8. Lianna

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Le Maitre Sith posa en douceur la navette sur l'emplacement que lui avait indiqué le spatioport. Les derniers jours avaient été éprouvants ; l'espace confiné qu'il partageait avec Chloan ne lui avait laissé que peu de répit. Le gamin était enthousiaste, curieux, bavard, et ne cessait de poser des questions.

Quand il ne s'arrêtait pas soudainement pour bafouiller, l'œil humide. Quand donc finirait-il le deuil de sa mère ?

–Alors ça y est, on est arrivé, cette fois ?

–Ton sac est prêt ? demanda sèchement Zilar.

–Oui, Maître, répondit-il avec ardeur.

Le Maître Sith soupira. Le Côté Obscur exigeait un grand sens du sacrifice, et semblait parfois se moquer de ses efforts.

Lorsque Chloan pénétra dans le cœur de l'astroport, une foule de sensations l'assaillirent. C'était si grand, si lumineux, si noir de monde...

Les rayons du soleil inondaient le complexe à travers de grands panneaux de transparacier. Des droïdes de renseignements argentés sillonnaient la foule pour renseigner les voyageurs. Les odeurs corporelles propres à chaque espèce saturaient l'air ; plusieurs fois, il fronça le nez en grimaçant. Il se sentait tout petit, impuissant, perdu parmi ce brouhaha.

D'instinct, il agrippa la main de Zilar. Son dernier point de repère. Il avait trop peur de le perdre. Ce monde le terrifiait.

– Allons, Chloan, ce n'est qu'un astroport.

Le jeune garçon acquiesça en silence, mais ne lâcha pas la main salvatrice. Il ne connaissait du monde extérieur que les reportages holonet. Et la réalité était bien plus oppressante.

Son regard papillonnait de droite et de gauche alors qu'il découvrait bothans, zabraks, mon calamari et autres sullustéens. Ce qu'il avait pris pour un végétal s'anima, il sursauta, surpris, avant de se détourner. Cet endroit était un cauchemar.

Son Maitre le guidait vers l'une des interminables sorties de ce monstre de transparacier tentaculaire. Il s'y accrochait comme à une bouée de sauvetage.

– Maman !

Le cri aigue le figea sur place.

– Alyss ! La Force soit louée, j'ai cru t'avoir perdue !

Chloan n'entendit pas la suite du dialogue entre la petite zabrak et sa mère. Il était pétrifié. Une violente douleur poignardait son cœur tandis que l'émotion le submergeait. Lui n'avait plus de mère. Il ne connaitrait plus ces instants intemporels entre ses bras.

Puis la colère remplaça la tristesse.

Ce n'était pas juste ! Pourquoi sa mère était-elle morte alors qu'il avait encore tant besoin d'elle ? Comment supporter que d'autres aient encore droit à ce bonheur ? C'était injuste.

Il les voyait, maintenant. Où qu'il pose les yeux, partout des mères enlaçaient leurs enfants, murmuraient des paroles de réconfort, riaient aux éclats. Comment pouvaient-ils être aussi heureux, insensibles à son malheur ?

Un grondement sourd pétrifia soudain la foule. Dans un fracas étourdissant, un éclair frappa la verrière, se brisant en milliers d'étincelles dorées sous un ciel devenu sombre et menaçant.

Surpris, Chloan se jeta contre Zilar, terrifié par cet orage soudain.

– Tout va bien, tout va bien, murmura le Sith pour essayer de détacher l'enfant.

– Très impressionnant, ajouta-t-il pour lui-même.

A l'extérieur, nulle pluie. Ils grimpèrent dans l'un des speedertaxis et Zilar lança une adresse d'un ton sec. Le trajet fut long et silencieux.

Le Maitre Sith n'avait jamais douté du potentiel de son apprenti, et cette démonstration le confortait dans son opinion. Son don brut ne pourrait que s'améliorer avec un apprentissage adapté. S'il ne se consumait pas avant, il ferait des merveilles.

–Voici ta chambre.

Bouche bée, Chloan avança de quelques pas. Depuis son arrivée sur Lianna, il vivait un rêve...

D'abord, l'astroport immense et majestueux. La ville ensuite, Lola Curich. Les rues larges, propres, les files de speeders interminables...

Et la demeure de Zilar. Un véritable palais ! Des colonnes et des escaliers en marbre. Plus de pièces qu'il ne savait compter.

Maintenant sa chambre. Une large baie en transparacier donnait sur le jardin ; un grand lit d'adulte, un bureau avec un ordinateur dernier cri. Des étagères remplies de datacartes couvraient les murs.

–C'est... C'est... Merci merci merci ! s'exclama le petit garçon en sautillant de joie.

Chloann s'adapta rapidement à sa nouvelle vie. Quelques amitiés naquirent à l'école dans un premier temps ; avant que l'école ne soit reléguée à l'arrière-plan de ses pensées. Les cours particuliers dispensés par Zilar se révélaient bien plus intéressants. Des séances à la fois philosophiques et sportives, où le garçon apprenait à apprivoiser les changements de son corps ; à ouvrir son esprit à différentes cultures ; et surtout, à maitriser la Force. Le Maitre Sith n'avait pas eu d'élève aussi appliqué depuis longtemps. Après des débuts laborieux, Zilar avait rapidement cerné son apprenti. Un premier exercice qu'il réussissait avec une facilité déconcertante, suivi d'un second qui paraissait à peine plus difficile, auquel le garçon échouait systématiquement. Intéressé par la réussite, il écoutait alors avec attention les méthodes pour y parvenir.

Petit à petit, Chloan acquit une aura d'assurance. Il ne s'en rendit pas compte immédiatement ; ses camarades de classe s'éloignèrent progressivement de lui comme ils percevaient ce déploiement de confiance. Lors des séances de jeux collectifs, ses adversaires commencèrent à s'écarter de lui. Car lorsque Chloan décidait de passer, il passait. Malheur à ceux qui tentaient d'opposer une résistance. Le jeune garçon filait droit sur ses objectifs, comme le lui avait enseigné Zilar.

Bientôt, l'école ne fut plus pour lui qu'un moyen d'obtenir des connaissances générales. Ses camarades l'ignoraient ? Et alors ? Il n'avait pas besoin d'eux. Ils étaient faibles ; lui fort. C'était l'ordre naturel des choses. Maître Zilar avait raison.

Il ne savait pas que Zilar l'observait tandis qu'il gagnait en suffisance et arrogance. Le Maitre Sith allait devoir briser la ligne droite qu'il imaginait être son destin ; la souffrance sanctionnait la progression sur la voie des Sith.

Ce soir-là, quand Chloan rentra, son Maitre arborait un sourire retors. Perplexe, il s'immobilisa : l'avait-il déçu ?

– Tu vas être content, Chloan. J'ai décidé que tu étais prêt à commencer l'entrainement au sabrelaser.

L'Apprenti SithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant