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  Deux journées encore s'écoulent sans que je les voie passer. Nous parlons, nous rions, sans jamais reparler de sujets délicats. Et c'est comme s'il n'allait plus repartir, me refusant de penser à cet instant où cet ami qui, soudainement a prit tant d'importance dans ma vie, va retourner à la sienne.

  Et alors que nous avons passé l'après-midi à visiter la ville, où simplement à ne rien faire, nous finissons, comme presque tant de soirs que j'ai l'impression qu'il est là depuis des semaines, sur ma terrasse, à boire un verre de vin, puis un autre.

    -Il y a bien assez de choses qui nous échappent, de planètes, de systèmes que nous ne connaissons pas, pour qu'ils existent d'autres formes de vie. Pour moi, c'est impensable que nous soyons les seuls, dis-je en terminant mon verre, assise sur une des deux chaises que nous avons sorties pour admirer le couché de soleil.

    -Et donc, nous avons vraiment cette conversation..., s'amuse-t-il en buvant son verre cul-sec.

    -Oui, et je crois bien que c'est la première fois que nous avons une vraie conversation intéressante, d'ailleurs !

    -Oui, jusqu'à maintenant, c'était tellement futile !

  J'éclate de rire en nous resservant, remarquant que le vin californien de Joseline mêlé à une journée chargée me fait légèrement tourner la tête.

    -Est-ce que ce ne serait pas flippant d'être les seuls dans tout cet univers ?

    -Est-ce que tu ne trouves pas plutôt flippant de te dire qu'il n'y a pas des choses que nous ne maitrisons pas ?

    -Comme... Les petits hommes verts ?

    -Comme toutes les choses métaphysiques qui nous échappent... La vie extraterrestre, la vie après la mort...

    -Oh..., dis-je en perdant de ma superbe. Et donc, on a vraiment cette conversation ?

    -Je ne sais pas...

  Je le regarde et le sens brusquement songeur. Je prends une gorgée et une grande inspiration.

    -Est-ce qu'Ethan est là, avec nous ? J'en suis persuadée.

    -Est-ce que... Tu imagines qu'il penserait quoi de tout ça ?..., dit-il à demi-voix.

    -De tout ça ?...

    -De continuer à vivre, alors qu'il n'est plus là...

  La conversation prend soudain une toute autre tournure. Les sourires s'effacent peu à peu face au souvenir, face à notre imagination de sa présence parmi nous...

  Je me plonge dans mon verre de vin déjà bien trop entamé, et essaye d'imaginer ce qu'il voit de là-haut....

    -J'imagine qu'il voudrait qu'on profite de cette vie qu'il n'a pas eu...

    -Et qu'on continue, qu'on se satisfasse du fait que voilà, le hasard, le destin, un accident et il est parti...

  Je fronce les sourcils, ne comprenant pas bien où il veut en venir.

    -Aaron, qu'est-ce que tu essayes de dire ?...

   Il hésite un instant, entrouvrant les lèvres, et semblant cherchant les mots. Comme s'il avait préparé cette phrase depuis le premier jour mais qu'à cet instant, elle lui arrachait les tripes.

    -Est-ce que... Je peux te poser une question ? Et bien sûr, dis-moi si je vais trop loin... Mais il faut que je sache.

    -Je... T'en prie..., me redressais-je dans ma chaise, sentant mon cœur un peu se serrer en ne sachant absolument pas à quoi m'attendre.

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