•Chapitre 29• «Can I ?...»

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Oh. Mon. Dieu. Oh. Mon. Dieu. Oh. Mon. Dieu. C'étaient les trois seuls mots que je parvenais à sortir de mon esprit en ébullition.

L'atmosphère se fit d'un coup suffocante.

Ok, là, je crois que j'avais atteint une sorte de summum de la honte, une frontière infranchissable, à inscrire dans le Guinness Book des records.

J'étais tellement sous le choc que j'en oubliai de respirer, en transe complète. Elsa, me voyant rouge écarlate (pas qu'à cause du manque d'oxygène) me pressa gentiment le coude. Je constatai alors qu'elle était tout sourire. Qu'attendait-elle de moi ? Et pourquoi tous ces gens me regardaient comme si j'étais un alien (c'était peut-être le cas, mais quand même) ?

Soudain, je me souvins, comme si l'apport nouveau en dioxygène venait de débloquer mon cerveau tétanisé. Il avait osé. Je rougis davantage (même si ce n'était plus vraiment possible à mon stade). Tous les regards braqués sur moi me paralysaient et m'empêchaient de bouger, tel un carcan douloureux. Je ravalai ma salive pour hydrater à nouveau ma gorge, sèche comme un vieux parchemin, datant du temps des pharaons.

Elsa me donna un nouveau coup dans le coude, en soufflant, sans chercher à cacher sa jubilation :

«-Heu... Zéli ! Faut p't'être que tu bouges tes miches là !»

Son ton sarcastique me fit violemment revenir sur terre. Tendue, je me levai, les jambes en coton. Tous continuaient à me regarder, telle une proie entourée de fauves sauvages. Je finis par prendre la décision de rejoindre Lylian sans savoir ce qu'il fallait que je dise ou que je fasse. Une sorte de brouillard d'indécision et de doutes flottait autour de moi.

Le chemin jusqu'à Lylian me parut durer une éternité (pourtant il me suffisait de descendre trois marches et parcourir deux mètres...).

Lorsqu'enfin je fus à sa hauteur, Éric et ses coéquipiers se mirent à siffler et à crier, acclamations soutenues vivement par la tribune que je venais de quitter. La tribune d'en face, elle, restait silencieuse. Comme les cris commençaient à s'éteindre, Lylian m'attrapa la main, ravivant de plus bel les hurlements. Je regardai Lylian, timidement. Il me souriait ouvertement sans cacher sa joie d'avoir enfin déclarer ses sentiments au vu et au su de tous.

Je l'interrogeai du regard, l'air de dire : "Qu'est-ce que tu as fait ?". Il parut percevoir ma gêne car il sourit davantage, ne se départissant pas de son calme à tout épreuve. Je me demandai comment il pouvait être si calme et si peu embarrassé. Il finit par se rapprocher doucement de moi, tout en observant mes moindres faits et gestes, guettant mon potentiel refus. Je compris qu'il ne voulait pas me forcer, mais, qu'au contraire, il attendait une sorte d'approbation de ma part. Cependant, je me laissai faire, tétanisée.

Lorsque son visage fut à quelques centimètres de moi, je fermai les yeux, attendant. Je ne savais pas quoi faire. Refuser ? Partir en courant ? Le frapper ? Ou tout simplement l'embrasser ? Je n'eus pas le temps de trop réfléchir que je sentis des lèvres, ses lèvres, se poser sur les miennes. Ce geste n'avait rien de forceur. Au contraire il sonna un peu comme un questionnement.

Je peux ?

Je répliquai par une légère pression de mes lèvres contre les siennes, chaudes et douces.

Oui, tu peux.

Le baiser sembla durer une éternité. Mais cela n'avait rien à voir avec la forêt d'yeux que j'avais traversée ultérieurement. Cette éternité était très agréable. Le temps y était suspendu, tétanisé, comme moi. Lylian était étonnamment calme et doux. Je ne savais pas s'il avait les yeux ouverts ou fermés, mais je pouvais sentir sa concentration à travers mes yeux fermés. Son souffle était léger et cela parvint à calmer relativement les palpitations de mon cœur. Finalement, nous nous séparâmes après un temps indéterminé. Les regards recommencèrent à nous emprisonner. Lylian ne semblait toujours pas gêné et me regardait avec une sorte de fierté et un autre sentiment que je ne parvenais pas définir.

T1 | S'il suffisait que je te le dise...Where stories live. Discover now