LUCY

15H15

J'observe la mine gênée de Rosie tout en essayant de comprendre qui est ce gamin, et comment il a réussi à lui parler. Rien n'est clair et mon cœur s'emballe sur ce qui vient de se passer dans cette pièce. Tout n'est que mystère autour de moi mais cette fois-ci, c'était différent. Il y avait quelque chose dans cet enfant que je n'avais jamais vu et si ce nouveau don ne m'avait pas montré qu'il manquait d'une aura, je n'aurais peut-être pas fait attention à lui. Rien qu'en ayant cette pensée, mon esprit broyé par mes tortures incessantes trouve une lumière. Je me secoue intérieurement et passe devant Rosie pour rejoindre sœur Judith. Je n'ai pas oublié la demande de la Mère Supérieure alors j'entre dans la cuisine avec hâte. Judith est toujours à la petite table en train de surveiller les enfants dans la cours. Je me racle la gorge et son sourire inonde pendant une seconde mon cœur d'apaisement. Elle ne se doute de ce qu'il vient de se passer.

- Alors ce garçon ?

- Il...

Je cherche mes mots sur ses yeux brillant d'impatience mais ils se ternissent comprenant sûrement qu'il y a un problème.

- Lucy ?

- La Mère Supérieure veut que tu demandes au Père Ambrose de venir ici au plus vite.

Elle ne me quitte pas des yeux et ses mains se crispent sur la tasse en porcelaine. Ses sourcils se froncent dans une inquiétude profonde. Je ne sais pas qui est cet homme mais son nom à suffit à Judith pour perdre toute joie.

- Bien.

Je jauge son aura malgré son sourire qui se veut rassurant. Sa couleur est passé d'un rose clair et doux à un bien plus profond et rougeâtre. Alors je ne me fais pas d'illusion quant à sa signification, je n'ai même pas besoin de la toucher pour me rendre compte qu'elle me ment sur ses sentiments. Je devine aisément qu'elle est inquiète, et je crois, terrifié.

- Je... vais le faire tout de suite.

Elle se lève et sort de la cuisine pour chercher le téléphone dans l'entrée. Je la suis et observe ses mains trembler avant de saisir le combiné. Son inquiétude me noue la gorge, et j'ose poser cette question qui me taraude.

- Judith, qui est le père Ambrose ?

Elle se retourne vers moi, le téléphone en main et me sourit simplement. Ses joues rosies, elle continue de me dissimuler cette frayeur qui gagne autant son visage que son cœur. Sa couleur est cramoisie et terne alors je l'interroge du regard tandis qu'elle cherche un numéro dans un petit calepin.

- Il... euh... comment dire...

Elle continue de farfouiller dans des papiers tout en me lançant quelques regards indécis.

- La Mère Supérieure et lui se connaissent très bien. C'est... un très bon prêtre.

Ses doigts fins trouvent un numéro et ils tapent nerveusement sur le combiné.

- Un très bon prêtre ?

Elle fuit mes yeux et grogne contre elle-même d'impatience.

- Oui, euh... Lucy fait entrer les enfants qu'ils aillent en salle de devoirs.

Je me renfrogne et me mord l'intérieur de la joue alors qu'elle plante son regard vers moi. Elle ne me demande pas gentiment d'envoyer les enfants faire leurs devoirs. Elle me l'ordonne. Elle ne m'a jamais parlé comme ça mais ses épaules s'affaissent et elle soupire.

- S'il te plait ma fille.

Ses traits se radoucissent, me soulageant l'espace d'une seconde. Sa concentration reprend le dessus une fois qu'une personne lui répond au bout du fil. Elle me tourne le dos et demande à parler au père Ambrose. Je regarde du coin de l'œil le salon où les enfants sont devant la télé. La salle des devoirs est dans une annexe au bâtiment alors le plus difficile sera de faire sortir déjà ceux qui sont devant un dessin animé. Il est parfois compliqué d'envoyer un seul enfant faire ses devoirs, alors en les voyant tous ici et là, je grimace. Je prends mon courage à deux mains tandis que Judith ne fait même plus attention à moi. Je m'avance vers la salle commune et toque à la porte.