CHAPITRE 01 | Nouvelle arrivée...

Depuis le début
                                    

Lorsque j'en vins à la charge d'un électron, je soupirai, en me demandant l'utilité d'apprendre cette grandeur par cœur. - 1,60*10^-19 Coulomb. Une grandeur essentielle en physique, certes, mais dont l'apprentissage restait anecdotique.

J'attrapai mon sac à dos, préparé la veille au soir, et descendis dans le hall d'entrée où j'enfilai mes chaussures. Je croisai alors mon regard dans le miroir de l'entrée et parvins à peu près à remettre en ordre mes cheveux bouclés - un peu trop bouclés si vous voulez mon avis.

─ Salut Rika ! lançai-je en direction de ma tante, occupée à faire la vaisselle.

─ Passe une bonne journée, ma chérie.

Avant que je ne franchisse la porte d'entrée, elle rajouta :

─ Et bonne chance pour ton examen de physique !

Je la remerciai et fermai la porte. Ma tante avait cette capacité à retenir les dates de mes examens avec précision. Il suffisait que je lui en parle une fois et le jour dudit examen, elle me souhaiter bonne chance. C'était une de ses nombreuses qualités : elle avait une très bonne mémoire.

Enfin dehors, je mis mes écouteurs - ma tante détestait quand je les mettais à l'intérieur, prétextant que je ne lui portais aucune attention lorsque j'avais de la musique dans les oreilles - et lançai une playlist des chansons de Shawn Mendes, le chanteur préféré d'Elsa.

Tout en fredonnant approximativement les paroles de Treat you better, je me rendis à l'arrêt de bus, situé à quelques pas de chez moi. Comme je ne connaissais personne - ou, selon Elsa, comme je ne faisais aucun effort pour connaître quelqu'un - je me mis le plus loin possible des autres, mes écouteurs me coupant du reste du monde. Je fermai les yeux et quelques brides de mon cauchemar me revinrent, m'obligeant à les rouvrir afin de ne pas m'y replonger.

Le bus finit par arriver, je grimpai en dernière et m'assis sur les premières places libres, situées devant. Le bus s'arrêta quelques mètres plus loin, mais je n'y fis pas attention, trop occupée à écouter Stitches.

Soudain, quelqu'un m'arracha mon écouteur, en passant trop près de moi. Je fis volte-face, irritée, mais le jeune homme était déjà loin. Je grommelai et replaçai mon écouteur, laissant la musique m'emporter de nouveau dans son univers.

Le trajet passa rapidement et, arrivée au lycée, je trouvai bien vite Elsa, qui discutait activement avec Lorrie, une fille de notre classe. Nous discutâmes un petit moment de nos week-ends respectifs, puis la sonnerie retentit, mettant fin à nos bavardages - ou plutôt à ceux d'Elsa et de Lorrie.

Nous nous rendîmes alors à notre premier cours de la journée - les mathématiques - et sur le trajet, Elsa, fidèle à elle-même, continua de bavarder, racontant son fabuleux week-end. Lorsque la professeure arriva, je n'avais toujours pas ouvert la bouche et Elsa était toujours en train de me raconter aventure de fin de semaine.

La professeure nous fit entrer et le cours débuta par une série d'exercices portant sur le thème des dérivées. A peine quelques minutes après le début du cours, quelqu'un toqua à la porte de la salle et moi, trop absorbée à résoudre une équation, je ne pris même pas le temps de relever la tête. Ce fut le coude de Elsa qui me déconcentra ; voyant que les autres élèves commençaient à se lever, je fis de même, avant de comprendre que le proviseur de notre lycée venait d'entrer dans la salle.

─ Bonjour à tous, dit-il d'une voix engageante. Asseyez-vous, s'il vous plaît.

Je me rassis, et constatai seulement maintenant que le proviseur n'était pas seul. À ses côtés se tenait un adolescent de notre âge, l'air insondable et mystérieux. Je ne pus m'empêcher de le reconnaître : c'était celui qui avait arraché mon écouteur dans le bus, sans même s'excuser.

─ Je vous présente Lylian Johnson, reprit le proviseur. Il est nouveau dans cet établissement et va intégrer votre classe pour cette année. J'espère que vous saurez l'accueillir comme il se le doit.

Après quelques formules de politesse et un échange bref avec la professeure de mathématiques, le proviseur s'en alla, laissant le nouvel élève à nos soins. La professeure lui indiqua aimablement une place où s'asseoir, et nous ordonna de poursuivre nos exercices, ce que je fis sans me faire prier.

Je me replongeai dans mon équation et, alors que je maniais habilement les chiffres, une voix, bien qu'extrêmement polie et prévenante, vint me déranger.

─ Excuse-moi.

Je me retournai vers la voix et tombai nez-à-nez avec le nouveau. Je faillis pester ; avait-il l'habitude de déranger les gens, comme ceci ? Je constatai alors qu'il me tendait quelque chose. Un stylo. Mon stylo.

─ Je crois que tu as fait tomber ça.

Alors que je saisis le stylo, mes yeux se plantèrent dans les siens. Je n'avais, jusque-là, pas remarqué à quel point ils étaient... beaux. D'un bleu clair, presque gris, ils semblaient d'une profondeur infinie. La couleur était tellement infime, que ses yeux en paraissaient presque transparents, ce qui installa automatiquement un malaise en moi. Une lueur de mystère luisait au fond de ces yeux, leur donnant un aspect de pierre précieuse.

Soudain, le coude de Elsa me tira de ma contemplation et je me retournai vers elle. En plein calcul, elle ne releva pas la tête de son cahier et me demanda :

─ Zéli, tu as trouvé combien ?

Je ne répondis pas, ne sachant pas du tout de quoi elle parlait. Devant mon silence inhabituel, ma voisine de bureau releva la tête et je rougis légèrement, lorsqu'elle fit l'aller-retour entre moi et le nouveau. Un sourire narquois étira ses lèvres et elle émit un petit rire.

─ Zélina..., rigola-t-elle, avec une voix faussement désabusée.

─ Quoi ? me défendis-je, en faisant mine de ne pas comprendre ce qu'elle me reprochait.

Alors qu'elle allait rétorquer avec humour, je la coupai :

─ 5,5.

Elsa fronça les sourcils et ce fut à son tour de se retrouver dans l'incompréhension.

─ J'ai trouvé 5,5, rétorquai-je avec sérieux.

Cela mis fin à notre conversation et je me reconcentrai sur le cours de Mme Reger, ignorant le regard brûlant que le nouveau portait sur moi.

ווו×

En sortant du cours de mathématiques, je sentis le stress monter : l'interrogation de physique allait commencer dans quelques minutes. Toute la classe se rendit dans ce que l'on appelait, dans le jargon du lycée, la « cave ». Il s'agissait en fait d'une grande salle d'examen, située en sous-sol, qui recevait très peu la lumière du jour et où les différentes classes se succédaient pendant la journée afin de passer une interrogation. Plutôt flippante comme salle. Certains aimaient la surnommer « la salle de torture », tandis que d'autres entretenaient la rumeur qu'un élève y avait un jour trouvé prématurément la mort.

Alors que je descendis les escaliers en compagnie d'Elsa qui récitait à mi-voix les quelques formules à connaître, une main se posa sur mon épaule. Je me retournai et tombai encore une fois face au nouveau, dont le nom m'avait échappé. Que voulait-il encore ?

─ Zélina ? Mme Reger m'a dit que si j'avais des questions, je pouvais te les poser à toi.

Devant mon air ahuri, il reprit, l'air un peu embêté :

─ Tu es bien Zélina ?

J'acquiesçai d'un signe de tête et je crus voir un frisson lui parcourir le corps, à moins que ce ne soit que le fruit de mon imagination. Malgré moi, mon attention se focalisa alors de nouveau sur les yeux du jeune homme qui se trouvait devant moi. Je ne pus m'empêcher de penser qu'ils avaient un certain pouvoir hypnotiseur, qui me privait de regarder ailleurs lorsque j'avais le malheur d'en croiser l'étincelle. Il y avait définitivement quelque chose en eux qui retenait toute mon attention. Quelque chose que je ne saurais définir.

─ Zéli, tu viens ?

La voix d'Elsa me tira une nouvelle fois de ma contemplation. Je fis volte-face et me dépêchait de rejoindre ma meilleure amie, sans même jeter un dernier regard à ce mystérieux nouvel élève.

Cependant, son regard ne me quitta pas et, même l'interrogation de physique ne m'enleva pas de l'esprit ses yeux hypnotisant.

T1 | S'il suffisait que je te le dise...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant