Chapitre 8- Un héritage dangereux

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Banlieue parisienne, année 2043

Le jeune homme observa longuement la haute porte en bois qui se dressait devant lui. Il jeta un coup d'œil aux alentours. L'endroit semblait calme et serein. Des abeilles voletaient paresseusement au dessus de pensées entreposées sur la fenêtre.

Un voisin arrosait son potager en lui jetant des regards furtifs de temps à autre. Victor pensa qu'il l'avait probablement reconnu. Après tout, malgré le fait qu'il n'avait pas remis les pieds ici depuis plus de dix ans, il avait passé la plupart de ses étés dans cette maison.

Que ressentirait-il lorsque qu'il foulerait à nouveau le sol fait de tomettes rouge sombre ? Probablement de la nostalgie et une certaine déception. Désillusion d'un endroit qu'il avait adoré jusqu'à ce que ce que son enfance s'envole.

Victor tortilla les clefs entre ses doigts, produisant un petit cliquètement métallique. Cela valait-il la peine qu'il entre à l'intérieur ? Il ne trouverait probablement rien si ce n'est de la poussière et des centaines d'archives et de notes de scientifique éparpillées.

Son grand père, qu'il avait aimé de tout son cœur, étant enfant, avait fini par perdre la boule et toutes ses facultés hors normes avec sa maladie. Pourtant, il avait été l'un des plus grands. Recevant même un prix Nobel de physique.

Il avait consacré toute sa vie à son travail, en oubliant ses obligations familiales. Victor lui en avait beaucoup voulu d'une certaine manière. Mais aujourd'hui, cela n'avait plus vraiment d'importance.

Le jeune homme resta un long moment face à la porte d'entrée avant de se décider enfin à la pousser non sans appréhension. L'intérieur de la vieille bâtisse sentait le moisi et le renfermé. Son grand père ayant passé les derniers mois de sa vie à l'hôpital, l'endroit était déserté depuis trop longtemps déjà.

Un craquètement familier lui fit comprendre qu'il venait de marcher sur un morceau de verre. Faisant un pas en arrière pour dégager son pied de l'objet fracassé, il se rendit compte que c'était un cadre dont le verre avait explosé en mille morceaux sous son poids.

Victor se pencha pour le ramasser et observa le visage de l'homme au maintient parfait et à l'allure noble qui lui souriait gentiment. Hugo Marais, son grand père, un homme décrit comme fantastique par ses pairs.

Le jeune homme releva la tête et découvrit la petite encoche de laquelle avait glissé le tableau. Il replaça le cadre en place et remarqua que la plupart des photos illustrant le mur étaient des coupures de journal, des distinctions qui relataient l'étendue de son savoir du temps de sa grandeur. Aucune ne les représentait sa mère ou lui.

Il examina le papier peint d'un vert défraîchi avec une moue désapprobatrice et longea le long couloir pour accéder au salon.

Une vaste pièce composée d'un double salon où Victor se remémorait son grand père, fourrant sa pipe avant d'ouvrir un livre et de s'y plonger pendant des heures, continuant à tirer sur une pipe éteinte.

Il observa la majestueuse bibliothèque au pied de laquelle se trouvait un joli piano noir laqué avec des touches de dorés sur les rainures. Son grand père lui avait appris à en jouer, ici même. C'était probablement le meilleur souvenir qu'il conservait de lui.

Le jeune homme s'avança précautionneusement. À présent, il hésitait. Son cœur s'emballa sans qu'il n'en comprenne vraiment la raison. Jusqu'à maintenant, il avait été persuadé qu'il ne trouverait rien et qu'Hugo délirait. A présent, il n'était plus sûr de rien. Et s'il y avait bel et bien quelque chose sous ce piano ?

Quelque chose d'assez terrifiant pour que son grand père n'en ai jamais parlé jusqu'à ce qu'il se retrouve sur son lit de mort. Quelque chose d'assez dangereux pour que Victor ait lu la peur se refléter dans ses yeux de mourant.

Cette perspective lui asséchait la gorge. L'envie de l'aventure se mélangeait à la peur de ce qu'il allait découvrir et qui pouvait être susceptible de chambouler, en une fraction de secondes, sa vie tout entière.

Le jeune homme retroussa ses manches et mit tout son poids pour déplacer le gigantesque instrument. Le fait qu'il se trouva sur un tapis lui facilita la tache. À sa grande surprise, Victor découvrit qu'il y avait bel et bien une trappe sous celui-ci.

Ce fut la curiosité qu'il emporta sur la peur quand il se rua dessus pour l'ouvrir. De la poussière se souleva, le faisant éternuer plusieurs fois. Après avoir essuyé d'un revers de manche ses yeux larmoyants, Victor découvrit un coffre d'une taille plus imposante que ce à quoi il aurait pu s'attendre.

C'était un de ces vieux coffres avec armature en fer forgé, du bois travaillé et élégamment ciré. Victor le hissa, non sans difficulté, jusqu'à lui et déverrouilla le loquet qui s'ouvrit sans opposer la moindre résistance. Le jeune homme soupira de déception. Si ce coffre avait réellement contenu des informations importantes, il n'aurait jamais été si facile d'accès.

Pourtant, quand il ouvrit le battant, ce qu'il découvrit lui coupa le souffle. Le garçon comprit immédiatement qu'il venait de mettre la main sur quelque chose de fondamental.

Le petit coffre contenait beaucoup de paperasses, schémas dont le papier avait jauni, fioles contenant un liquide d'un doré clair, un journal intime que Victor feuilleta rapidement et qui semblait retracer un travail important. Victor reconnut immédiatement l'écriture penchée de son grand-père.

Mais l'objet le plus précieux de tous était incontestablement cette petite tablette coulée dans de l'or véritable et étincelant marquée de hiéroglyphes. L'antiquité était reliée grâce à un petit ruban rouge, à une enveloppe qui devait probablement être l'objet le plus récent de tous.

Victor s'en empara. Un seul petit mot, tracé à l'encre noir, se démarquait sur la blancheur du papier: Victor.

Le jeune homme s'apprêtait à l'ouvrir quand la porte d'entrée grinça. Un tintamarre se fit entendre en provenance du perron. Plusieurs hommes venaient de pénétrer dans la maison.

– Fouillez-moi ce taudis de fond en comble ! Je me fiche du temps que cela prendra, mais retrouvez-moi cette gravure !

Victor étouffa un gémissement avant de se relever vivement, le coffre en main. Un choix s'imposa à lui et il fallait qu'il agisse vite et bien.


Ultra (sous contrat d'édition)Where stories live. Discover now