Le Retour aux Origines

CHAPITRE 12 : Nouvelles des amis

Deux semaines s'écoulèrent ainsi. Ils chevauchaient en direction du Gouffre de Helm le jour et dormaient à la lueur des étoiles la nuit. La blessure de Thalion guérit étonnamment vite, ce qui laissa supposer à Elenna que Kementári était derrière tout ça. Le ventre de l'elleth continua à s'arrondir progressivement, et à présent même un Homme n'ayant pas une très bonne vision pouvait s'apercevoir qu'elle attendait un enfant. Elle était enceinte de quatre mois et demi, et elle commençait à avoir peur pour l'avenir de son enfant. La Terre du Milieu était en guerre, et elle ne voulait pas que son fils ou sa fille connaisse la douleur de perdre un être cher à leur cœur lors d'une bataille comme il y en avait tant. Mais, durant ces deux semaines, l'esprit d'Elenna fut également accaparé par de nombreuses questions. Son esprit ne semblait jamais se reposer, et le sommeil ne venait la trouver que lorsque Kementári chantait. De même, la jeune Elfe fut surprise mais non mécontente, quand elle s'aperçut que durant tout le trajet, ils n'avaient pas croisé un seul Orc. Elle était certaine que la créature qui veillait sur eux en était responsable, mais elle n'osait pas lui en faire la remarque.

En ce moment même, l'esprit d'Elenna était occupé par une question à laquelle elle tentait de trouver une réponse sans succès. C'était une question parmi tant d'autres, n'ayant plus d'importance que celles qui l'assaillaient un peu plus chaque jour. Quel avenir pour son enfant ? Qui était réellement Kementári ? Son rêve, avait-il été réel ou avait-ce été son imaginaire qui avait pris ses aspirations pour des réalités ? De même, comment allait-elle sauver l'Elfe au Gouffre de Helm ? Tant de questions qui bousculaient son esprit et qui l'empêchaient de profiter de la quiétude du soir et de la liberté du jour.

Seize jours exactement après la rencontre avec Kementári, alors que le soleil se couchait et que le ciel se teintait d'une magnifique couleur orangée, ils firent halte sur une plaine. Cela faisait à présent trois jours qu'ils avaient quitté la protection et l'anonymat que leur conféraient la montagne et les bois. Elenna ne se sentait pas rassurée, même si elle savait que leur protectrice veillait sur eux. Plus le temps passait, plus elle prenait conscience que sa tâche était dangereuse. Car sauver un Elfe au milieu d'une bataille signifiait s'engager soi-même dans celle-ci. Or, si elle n'avait pas été enceinte, cela n'aurait nullement gêné Elenna, même si elle aurait certainement été angoissée. Non, elle s'inquiétait pour son enfant. Si elle était blessée, ou si elle mourrait, son enfant perdrait la vie. Alors, au risque de perdre son bébé, était-elle vraiment prête à sauver l'Elfe de sa vision ? Mais, si elle ne le faisait pas, elle savait que la culpabilité qu'elle ressentirait serait énorme. Car elle avait vu sa mort, elle savait qu'elle pouvait empêcher celle-ci d'atteindre l'homme. De même, un fort sentiment au fond d'elle-même lui criait qu'en le sauvant, elle finirait par découvrir nombre de choses sur elle-même, sur sa véritable histoire, sur la raison qui l'avait conduite en Terre du Milieu. Que se serait l'élément déclencheur d'une longue quête passive. Mais la peur de perdre sa fille ou son fils la tiraillait de toute part. Elle soupira. Au fond d'elle, elle savait qu'elle n'avait pas vraiment le choix. Elle avait hérité de sa mère sa générosité et sa compassion. Des traits de caractère qui ne faisaient pas bon ménage avec celui de la lâcheté. Car ne pas aider était lâche, elle le savait. Pourtant, jamais la lâcheté n'avait été pour une aussi bonne raison. Elle secoua la tête. Il fallait qu'elle réfléchisse à cela à tête reposée. Elle s'approcha alors de Kementári qui était allongée près de Thalion, s'allongea à son tour, tout en plaçant sa tête sur l'encolure de la jument. Une voix retentit dans sa tête. Elle se laissa bercer par le chant, puis sentit le sommeil s'emparer enfin d'elle.

Elle fut réveillée le lendemain par Thalion qui s'était mis à chanter avec leur protectrice. Si Kementári était encore allongée afin de permettre à une Elenna assoupie de se reposer encore un peu, le frère de Liliane lui, était en train de s'entraîner à manier l'épée de sa sœur, sous le regard attentif de la jument qui semblait surveiller ses moindres mouvements afin d'empêcher qu'il ne se blesse. Elenna, malgré le sentiment d'amitié qu'elle ressentait à présent pour leur protectrice, ne parvenait toujours pas à comprendre les raisons qui poussaient cette dernière à veiller sur eux. Elle avait de nombreuses fois aperçu les regards que lui lançait de temps à autre Kementári. Des regards où apparaissaient tendresse, compassion et amour. La jeune Elfe ne comprenait pas pourquoi elle inspirait de tels sentiments à cette créature. Celle-ci semblait la connaître par cœur, mais Elenna elle-même ignorait tout de cette dernière. Elle ignorait même ce qu'elle était. Elle la savait puissante et très âgée, mais l'espèce à laquelle elle appartenait lui était inconnue. Elle soupira puis laissa ses yeux s'habituer à la luminosité avant de se relever en douceur. Le soleil était levé depuis longtemps. Et au vu de sa position, Elenna devina qu'il devait être dix heures. Elle regarda alors le camp : leurs affaires n'étaient pas rangés et ni Kementári ni Thalion ne semblait être prêts à partir. La jeune Elfe ne comprit pas. Ils devaient rejoindre au plus vite le Gouffre de Helm ! Alors pourquoi faire soudainement une si longue pose ? Remarquant son incompréhension, Kementári lui expliqua les raisons ayant poussé à cette décision.