Prison 5

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/!\ Certains propos peuvent être choquants, je suis responsable de ce que j'écris pas de ce que vous lisez ! /!\

Les quelques heures avant le repas se passèrent dans un silence lourd, si bien que pour évacuer la pression, je pris entre mes doigts deux clopes et lui en proposai une. Elle accepta d'un faible merci, comme intimidée devant mon comportement quelques temps auparavant. Je lui passai une allumette ainsi que la boite afin qu'elle l'allume, puis effectuai le même geste. La fumée emplissait mes poumons, me procurant une vague de bien-être indescriptible. Mes muscles se détendirent, je m'approchai de la fenêtre afin de ne pas empester la chambre, elle me suivit. Accoudés sur celle ci, nous restions silencieux, jusqu'à ce que je brise le calme de la pièce.

"Désolé pour tout à l'heure. La psychologue pense que je suis lunatique et impulsif surtout. Ça n'aide pas.

-J'aurais pas du non plus t'apostropher de la sorte, dit-elle calmement.

-Que t'as dit la dealeuse ?

-Que je ne serais pas sous votre protection bien longtemps et que ce jour là, elle me tomberait dessus. Elle m'a dit aussi que... hésita-t-elle en regardant la pointe de ses pieds.

-Que ?

-Que tu n'étais pas digne de confiance.

-J'imagine que c'est la réputation qui me suit dans la prison. Si tu ne me fais pas confiance, tu peux au moins croire les autres, Serpent, le Parrain et les jumeaux sont des personnes droites et honnêtes.

-Je te veux toi, pas eux.

-Je vais faire comme si tu n'avais rien dit. De quelle couleur sont tes sous-vêtements ?

-Hé, rigola-t-elle, tu devais faire comme si je n'avais rien dit.

-Cela n'a rien à voir, dis-je en souriant, à notre entrée ici, les gardes nous assignent une couleur de sous-vêtements afin que nous ne nous les échangions pas entre nous, mais ils ont aussi une signification.

-Quelles couleurs existent ?

-Rouge, noir, blanc, gris, Kaki et turquoise.

-Scientifiquement, le Noir et le Blanc ne sont pas une couleur.

-Tu es scientifique ?

-Non.

-Alors tais toi et laisse moi te dire leur signification. Les couleurs sont exclusivement pour les femmes, va savoir pourquoi. Les rouges, ils ne les donnent qu'aux femmes vraiment canons qui les draguent, du moins dans leur pensée. Les turquoises sont pour les femmes froides et caractérielles, celles qui ne se laissent pas marcher sur les pieds et qui te dominent dans la vie courante comme au lit, lui expliquai-je avec un petit clin d'oeil

-Pervers ! s'exclama-t-elle en m'assénant une petite claque sur l'épaule.

-Un peu de sérieux, s'il te plaît. Reprenons, le blanc est pour les femmes mariées, celle que l'on ne peut pas approcher, une sorte de mise en garde qu'elles sont chasse gardée. Le gris, au contraire du turquoise, se sont les femmes que tu peux toucher quand tu veux et où tu veux sans qu'elle ne dise rien. Ce sont des soumises si tu veux.

-Oh, c'est assez sexuelle cette histoire de sous-vêtements.

-Faut bien assouvir ses pulsions. Bref, il reste le noir qui est pour les homosexuelles, elles se préviennent entre elle ainsi. Et le kaki, c'est pour les filles que les gardes estiment un peu bizarre, un peu décalée, du genre avec des fétichismes étranges et franchement bandant si tu veux mon avis.

-Non je ne le veux pas, c'est bon, dit-elle l'air faussement répugné.

-Et donc quel genre de femme es-tu ?

-J'ai pas vraiment envie de te dire après cette explication...

-Ne me dis pas que tu es grise ?

-Non, loin de là en fait...

-Alors dis moi."

Soudain les portes s'ouvrirent indiquant qu'il était l'heure de dîner, nous jetâmes nos mégots par la fenêtre puis rejoignîmes les rangs main dans la main pour ne pas se perdre. Elle avait attrapé la mienne, sûrement par peur de se faire choper par la dealeuse.

Nous rejoignîmes comme à notre habitude notre tablée habituelle. Ils nous regardèrent souriants pour une fois.

"Il s'est passé quoi par chez vous pour que vous souriez de la sorte vous quatre ? Demandai-je méfiant.

-Rien rien...répondit un des jumeaux apparemment gêné."

Je regardai rapidement Eléa qui se dandinait face à Serpent comme pour essayer d'apercevoir quelque chose, je lui mis un coup de coude dans les côtes qui la fit me sermonner pendant une bonne dizaine de minutes. Pendant ce temps, je discutai avec le Parrain du sort que l'on réservait au nouveau de l'aile 2.

"Faut qu'on agisse vite, m'expliqua-t-il, et il faut faire mal.

-Je propose qu'on le chope par les testicules, tenta Serpent.

-Pas bête du tout..."

Alors que nous tentions de trouver une idée vraisemblable qui tenait la route, Eléa nous coupa et demanda :

"Dis, si ça te gène dis le mais quelle est ta couleur de sous-vêtements Nelly ?"

Je mis un peu de temps avant de comprendre qu'elle s'adressait à Serpent. Sans me regarder, cette dernière me dit :

"Tu lui as expliqué ? Tu voulais savoir si tu pouvais te la faire ?

-Mais bon sang, où ai-je atterri ? Demanda la principale concernée.

-Dans l'antre des pervers, répondit ironiquement l'un des deux jumeaux.

-Rouge bien évidemment s'exclama Nelly, loin d'être choquée.

-Il faut dire que tu ne l'as pas loupé le garde, le jour de notre arrivée, commença le premier jumeau.

-Je me souviens, on était dans la petite camionnette chargée de nous transporter avec plusieurs autres détenus, continua le second.

-Ce moment me fait penser au début d'un des films Pirates des Caraïbes, tu trouves pas ? Quand ils sont dans le fourgon avec son pote, argumenta de nouveau l'aîné.

-Enfin bref, un garde était avec nous à l'arrière et tu te plaignais que les menottes heurtaient tes petites mains délicates, rigola l'un des jumeaux.

-Mon poignet était écarlate, se défendit Nelly.

-Toujours est-il que pour qu'il te détache, tu lui as dit un truc à l'oreille, puis il s'est mordu la lèvre, a replacé son pantalon avant que tu ne lui mordilles le lobe de l'oreille.

-Il poussait de ses gémissements se rappela la jeune femme.

-Tu as continué, as pris ses clés et as détaché nos menottes avant de les refermer sur ses mains. Tu es ensuite monté sur lui et...

-Stop s'il te plaît, ne viole pas mon intimité, l'intima Serpent en le menaçant du regard."

Eléa quant à elle, rigolai, loin des fictions idiotes et romantiques, son rire était loin d'être quelque chose de doux et de cristallin, il ressemblait plutôt à un phoque obèse coincé sous un tracteur rouillé. Cela nous faisait du bien à tous, d'entendre un rire, si moche soit il, dans ce sombre bâtiment. Cela faisait trois ans, que je n'avais pas connu, ni de discussions passionnées, ni de rires éhontés, ni rappels du passé. Je remerciai mentalement Eléa de nous avoir rapporté cela.


On this side of the barsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant