Prison 1

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Allongé sur mon lit, je regardai le plafond défraîchi, des toiles de poussières et probablement d'araignées ornaient les coins de ce dernier. Des regroupements noirâtres prouvaient l'humidité omniprésente de la cellule, une odeur de moisi se dégageait de chaque centimètre des murs autrefois blanc. Parfois un rongeur passait entre la petite grille en bas de ma porte et déposait ses excréments dans un coin. Le sol inégalement droit était abîmé par des raclements semblerait-il.

Dans un coin, un lavabo rudimentaire disposant seulement d'eau froide, une armoire métallique était l'unique séparation entre le coin nuit et ce que l'on osait appeler le coin d'eau. Dans la seconde partie de la pièce, deux lits modestes, enfin, si tel était le terme que l'on pouvait utiliser pour les décrire. Sur ses quatre pieds bancales, un matelas aussi épais qu'une feuille de verre était déposé hâtivement, avec une couverture polaire rêche et un oreiller aussi plat que la télévision LED de la salle des surveillants.

Aujourd'hui le ciel était dégagé et le soleil entrait vaillamment dans la pièce sombre et sale. J'entendis la voix aigüe provenant de la cellule d'en face, s'élever contre la nouvelle surveillante. Je regardais la scène d'un oeil distrait, la jeune femme, dans son uniforme impeccable bleu marine, regardait rapidement chaque cellule, s'assurant par la même occasion que chacun d'entre nous, étions en bonne santé et surtout que nous ne tentions rien d'irréalisable. La détenue en face de moi, criait à la jeune femme qu'elle avait un besoin urgent d'aller aux toilettes. Je rigolai de l'ingéniosité de celle ci. Elle devait penser que la petite blonde, seule au milieu de détenus de tout sexe, de tout âge et de toute nationalité, serait assez naïve pour la laisser sortir et l'emmener sans l'aide des escorteurs.

Les escorteurs étaient deux molosses toujours présent devant la porte qui donnait accès à cette partie des cellules. Habillés de noir et brutaux, ils n'hésitaient pas à te planter les aiguilles emplies de produits anesthésiants qu'ils cachaient dans une petite boite verte. Ils nous emmenaient vers nos différentes taches : nettoyage des douches communes, ramassage des ordures dans l'enceinte des bâtiments généraux, nettoyage des congélateurs immenses, lavage de la vaisselle sale des huits départements principaux de la prison, ou bien, lors de certaines inspections, nettoyage des dortoirs et des cellules.

Les chambres ici étaient mixes, et le co-détenu de celle que l'on nommait ici "la Dealeuse" soufflait de lassitude face à la persistance de son amie. Par chance, la directrice ne m'avait pas encore assigné de compagnon de cellule, me jugeant trop instable pour que la situation soit durable. En vérité, je faisais tout pour repousser ce moment et cela faisait trois ans que cela fonctionnait. Je sortais souvent dans la cour commune, je faisais des lancers dans les paniers de basket, seul comme toujours ou parfois on oubliait que je devais être isolé et je les retrouvais, les seuls autres moments où je les voyais étaient lors des repas. La psychologue que je voyais tous les matins, continuait de me dire que mes fréquentations étaient mauvaises, que je devais faire des efforts et rentrer dans leur jeu de dénonciation futile avec ce système de récompenses qui l'était encore plus. Les autres fois, elle me prescrivait des gélules inutiles.

La surveillante mit un coup de matraque dans ma porte pour me signifier qu'il était l'heure que j'aille voir ma psychologue. Afin de l'énerver, je fis semblant de ne pas avoir entendu, les mains sous ma tête, les jambes pliées et croisées, je sifflai un air que j'affectionnais avant mon entrée ici.

"Bon, tu te décides à bouger ou il faut que j'appelle les autres ?

-C'est bon j'arrive j'arrive, dis-je comme à chaque fois."

Elle me rappela les règles que j'étais supposé respecter lors de cette sortie quotidienne, ouvrit lentement la porte en sifflant de mettre mes mains en évidence, vint derrière moi tandis que je lui soufflai à l'oreille qu'elle était plus belle de ce côté des barreaux. Elle ne réagit pas, se contentant seulement d'exécuter le protocole.
Nous marchâmes pendant quelques instants, sa main comprimant mon biceps avec force, entourés par les deux molosses en charge de nous. La porte bleue entra dans mon champ de vision, avec son habituel plaquette en or "Madame Scott, psychologue en chef". La petite blonde ouvrit la porte et me poussa dedans brusquement. Je n'eus pas le temps de lancer un regard dans sa direction que déjà l'on m'enfermait dans cette pièce.
Le contraste avec nos cellules était flagrant ici, tout respirait la luxure et l'argent, j'en vomissais de dégoût. Le sol, tout de moquette était revêtu, la large fenêtre menait à un balcon gigantesque.

On this side of the barsWhere stories live. Discover now