ana

Haineuse

Cassie pleure.

"Sale gouine, sale chinoise, espèce de bridée, sale lècheuse, peau jaune..."

Elle court, tandis que toutes ces insultes résonnent douloureusement dans son crâne.

"Fais mon DM, face de citron, toi qu'est si intelligente."

"C'est rien qu'une lècheuse de chattes, les gars, vous approchez pas."

"L'est sourde, c'te conne, vous pouvez parler."

Ces mots, elle ne les entend pas, elle les devine. Elle lit sur les lèvres, elle voit dans les regards, tous ces regards sournois, ces regards en coin qu'on lui jette, croyant être discret. Ces mots, elle les sent dans sa joue gauche, si douloureuse.

Les yeux brouillés, elle ouvre la porte, la claque derrière elle, monte les escaliers quatre à quatre, tombe, se relève avec difficulté. Sonne.

Ana vient lui ouvrir.

Elle est nue, comme à son habitude, mais Cassie s'en fout. Elle la voit, tente de balbutier quelque chose, n'y parvient pas, fond en larmes de plus belle devant son amie. Celle-ci, les yeux écarquillés de surprise, la prend dans ses bras. Elle lui relève la tête, ses yeux humides, ses joues rondes et striées de larmes. Mais ce qu'elle voit, elle, et ce qui lui glace le coeur, c'est l'énorme balafre sanguinolente qui lui barre le visage, de la pommette gauche au menton.

Elle entraîne la jeune fille jusqu'à sa chambre, et c'est la première fois que quelqu'un y pénètre. Elle évite les plantes, et l'allonge sur son lit. Efficacité. Elle ferme les rideaux, allume une lampe. Court à la salle de bain, attrape le désinfectant, l'applique avec douceur sur la joue de son amie. Cassie hurle, et ce cri déchire les oreilles et l'âme d'Ana.

Alors, elle éteint la lampe. Se retire doucement.

Elle a envie de crier, de hurler, de pleurer, et de frapper les responsables jusqu'à ce qu'ils en crèvent. Au lieu de ça, elle enfile un pyjama, et compose le 18 sur le vieux téléphone familial.

a m i e  d é f i g u r é e  a i d e  a p p o r t é e  h a i n e  b i e n t ô t  r e l â c h é e