Eléna Mar

Respire Eléna, respire...

— Éléna, elle en a marre. Marre d'être le dindon de la farce, le bouche-trou, la bonne à tout faire ! Marre, marre, marre ! Démerdez-vous !

Sérieusement, j'en ai ras le bol. J'ai ma vie aussi. Je dois prendre du recul et me calmer. Je remonte dans la chambre me détendre. Dire qu'il y a deux jours, j'étais bien, sereine et sous le charme d'Étienne. Non seulement, j'apprends que mon ex s'est blessé, mais en plus, qu'il a une nana. Dur à digérer. Je tiens encore à lui, je veux être là pour l'aider.

Par contre, Zora risque de me mettre des bâtons dans les roues. D'après le médecin, c'est le temps d'un mois ou deux, maximum. Je vais prendre sur moi, et rien que pour faire de l'ombre à Zora, je vais dire oui. Tant pis pour Tweet, j'irai le voir tous les jours. Il faut que je leur annonce la couleur.

— J'ai décidé de te dépanner, sauf le week-end. Comme Zora est habituellement disponible à cette période de la semaine, je vous relègue les enfants.

Julien acquiesce. Zora fait la moue. Leurs week-ends en amoureux s'avèrent mouvementés avec Louis et Victor. Terminé les dîners en tête à tête, les ballades tous les deux et les parties de jambes en l'air quand bon leur semble. Elle va vite déchanter la cocotte ! J'informe Julien que j'occuperai la chambre d'amis. Il faut que je ramène Cathy chez elle et que je passe chez moi prendre quelques affaires. Je lui fais signe de me suivre dans la cuisine.

— Alors, ai-je pris la bonne décision selon toi ?

— Sincèrement. Oui. Et cela va te permettre de savoir où tu en es sentimentalement avec Julien.

— Le salaud ! Il n'a pas perdu de temps. Si j'avais su, je me serais jetée dans les bras d'Étienne.

— C'est un mal pour un bien, tu verras... Sa copine n'a pas l'air très futée. Je ne vois pas ce qu'il lui trouve. Elle est petite, boulotte et moche.

— C'est sans doute un super plan au lit.

— Hélas, ça ne fait pas tout. Si elle n'est pas foutue de gérer tes mômes, leur histoire va vite tourner court.

— Peu importe. Il aura ce qu'il mérite.

— Ne sois pas si méchante avec lui. Tu l'as quitté du jour au lendemain je te le rappelle. C'est toi la cause de cette liaison.

— Tu sais ce qui me bouffe ? Il a arrêté de faire du vélo pour la voir le week-end. Jamais il n'aurait fait cela pour moi.

— Tu ne lui as pas laissé le temps.

— Tu te fous de ma goule ou quoi ? Dix ans pour qu'il change.

— Ce que je veux dire, c'est que tu n'as pas su faire passer sa passion après toi.

— Qu'est-ce que tu peux être soulante quand tu t'y mets ! Avec toi, j'ai l'impression que tout ce que je fais est mal.

— Tu m'exaspères. Ose affronter la vérité en face.

— Je t'aime beaucoup Cathy et je n'ai pas du tout envie de me fâcher avec toi. Reste en dehors de tout ça s'il te plaît.

— Tête de mule ! Tu ne changeras jamais. Si tu n'es pas foutue de recevoir mes conseils, alors oui, je préfère ne rien dire.

— Ne le prends pas sur ce ton.

— Et comment veux tu que je le prenne ? Je suis à tes côtés en tant qu'amie, pour t'aider. Et toi, tu me refoules comme une merde.

— Sujet clos. Je ne veux pas briser notre amitié. Restons-en là.

Cathy est vexée. Moi aussi. Un léger malaise s'installe entre nous. Je crois qu'il vaut mieux que je la raccompagne au plus vite avant que cela ne fasse des étincelles. Je l'adore, mais qu'est-ce qu'elle peut être lourde avec ses principes à la noix. Ses échecs lui ont servi de leçon, et elle essaie de faire en sorte que ma vie ne soit pas aussi terne que la sienne.