Wasn't Expecting That.

1.

À bien y penser, je pense que tout est définitivement parti de ce baiser. Même si tout aurait pu commencer à partir de notre première rencontre, à partir du premier sourire, je pense que ce qui a vraiment tout déclenché, c'est ce baiser. S'il ne l'avait pas fait, s'il ne m'avait pas embrassé, quelle vie j'aurais pu manquer.

Parce que je m'y suis accroché durant les jours qui ont suivis, à ce petit souvenir de rien du tout.

À ce petit baiser innocent.

Je n'ai pas revu Harry immédiatement après cette soirée, parce que bien évidemment, je n'avais toujours pas de moyen de le joindre. J'avais écopé d'une bonne gueule de bois, mais pas de son numéro de téléphone.

Eleanor est finalement restée plus longtemps que prévu à Southampton alors c'en était d'autant plus impossible. Mais dans un sens, ce n'était pas grave parce que ça m'a permit de relativiser un peu, de dessouler beaucoup, et de guérir mes chevilles sans nouvelles plaies dues à n'importe quels patins stupides.

C'est le samedi d'après, que je l'ai revu. Une nouvelle fois, Eleanor avait pris un malin plaisir sadique à me cacher sa présence puisqu'elle est vile et cachotière ; mais d'un autre côté, je pense que c'était une bonne chose, sinon je me serais remis à me poser tout un tas de question inutiles sur tout, rien et n'importe quoi. J'aurais même surement paniqué et je ne serais pas venu.

Cette fois-là, on est allés au musée. Alors oui, connaissant ma meilleure amie, je n'ai absolument pas compris pourquoi elle cherchait à me trainer là-bas. El et l'art, ça a toujours été très... Hm. Mais je ne m'en suis pas tant formalisé que ça au final, et ça m'étonne encore aujourd'hui.
Peut-être que je ne voulais pas savoir, après tout.

Quand on est arrivé, qu'on a payé – que j'ai payé nos entrées, rendons à Caesar ce qui est à Caesar – j'ai tout de suite repéré une masse de boucles brunes beaucoup trop longues pour un garçon devant nous. C'est là que j'ai saisis. Ça ne pouvait décemment pas être une simple coïncidence.

Ça n'avait rien d'un rendez-vous, rassurez-vous : pour vous expliquer tout ça de manière simple, Harry devait faire un repérage pour sa classe et avait proposé à El de venir - avec moi. Cette condition, ce petit "avec moi", j'en ai eu connaissance seulement quelques semaines plus tard. Mais c'était mignon à entendre.

Si Harry devait faire un repérage, c'était parce qu'il était instit au début. Il n'a jamais fait parti d'un quelconque réseau de petit-ami-sur-commande, comme certains l'ont écrit et le croit toujours. Sérieusement, vous pensez réellement que certaines personnes acceptent de sortir avec d'autres pour un coup de pub pendant plusieurs dizaines d'années ? Réfléchissez.

Deux ou trois semaines, c'est possible, c'est négociable, c'est acceptable ; plusieurs mois, c'est déjà plus improbable, mais des années... Des années, bon sang.

Il enseignait dans une petite école maternelle près de Hyde Park. C'était sa première année dans la vie active, il venait d'avoir son diplôme. L'école où il travaillait s'appelait « Les Chatons ». Je m'en souviens encore parce que pendant un moment, et surtout parce qu'il détestait ça, je m'amusais à l'appeler comme ça. « Chaton ».

Chaton.

Il s'est retourné dès qu'il a entendu Eleanor parler et il a sourit. Un beau sourire tout blanc et tout aligné. Aussitôt, le souvenir du bisou a rejoué dans mon esprit comme une flèche, et moi aussi j'ai souris.

Niall est arrivé quelques secondes après, parce que Niall était là bien sûr, et on a commencé notre petite visite.

C'est à partir de ce jour-là que j'ai aimé les musées. Il faut dire que je n'en avais pas fait beaucoup avant, que je ne m'y étais jamais vraiment intéressé, mais ils m'ont vraiment plu à partir de ce samedi de décembre. C'est pour ça que souvent, quand ma famille n'arrive pas à me joindre parce que mon téléphone est anormalement éteint, il faut qu'elle se rassure et n'appelle pas la police comme certains – certaines – l'ont déjà fait. Je vais bien.