XXI. Contraintes

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Martin ouvrit la porte de l'appartement et entra d'un pas décidé. Il tourna directement à droite pour rejoindre le salon et s'arrêta devant la femme qui était concentrée sur des mot fléchés sans doute. Le genre d'occupation qui semblait tellement idiote maintenant.

- Montrez moi mes amis.

Elle leva les yeux, surprise du ton qu'il venait d'employer.

- Tu n'aide pas les autres en bas ?

- Ils s'en sortent sans moi, tout va bien. Où sont mes amis ? Je veux les voir.

Elle soupira puis posa son livre sur une petite table. Elle commença à jouer avec la mine du crayon et annonça :

- Je m'appelle Sophie. J'ai 64 ans et je vivais dans cet appartement avant que tout commence.

Elle continuait de fixer la mine tout en parlant.

- Jean est un voisin de l'étage au dessus, il vivait avec son fils Noham, que tu as déjà croisé. Et lorsque c'est arrivé, le cousin de Noham, Franck, était là aussi. Je me souvient encore avoir entendu les gens en dessous hurler. Il y a eu des coups secs et violents. J'ai d'abord cru à un cambriolage et lorsque j'ai voulu appeler la police... bref, c'était déjà trop tard, et pas seulement pour les voisins d'en dessous, tu vois ?

- ... Oui.

- Après ça, Jean et les deux jeunes sont descendus et ont réussi à foutre les monstres dehors. Ils sont restés presque 3 jours à la porte, à frapper, gratter, râler. Vu que chez moi c'est grand, Jean et les deux garçons sont venus vivre ici. Soit-disant pour me tenir compagnie. Mais je sais bien qu'ils aiment surtout ma réserve de nourriture. On a commencé à sortir pour fouiller les environs il y a deux semaines. Pour le moment on a eu de la chance. On a de quoi survivre un bon moment. Mais c'était sans compter votre arrivée...

Martin commençait à se sentir mal.

- Qu'est-ce que vous voulez dire ?

Cette fois, ça voix était menaçante. Il espérait avoir mal compris.

- Ce n'est pas une menace, mon garçon. Seulement, et tu l'as vu, Jean a un sale caractère et...disons qu'il n'a pas été très aimable avec nos derniers invités.

- Comment ça ?

- Ils ont malencontreusement sautés par la fenêtre de la chambre dans laquelle tu étais. Évidemment, la vérité est autre, je suis persuadée que c'est Jean ou l'un des deux jeunes qui a fait le coup.

Martin senti son cœur battre à tout rompre, il sentait la peur monter en lui. Il avait peur pour sa vie, évidemment, mais il pensait aussi à Emma, ce corps si fragile qui reposait avec innocence dans une pièce voisine. Il imaginait ce corps jeté par la fenêtre, les yeux de la jeune femme s'ouvrir et regarder Martin avec terreur... il ne pouvait laisser une chose pareil se produire.

- Pourquoi vous restez avec eux s'ils sont si dangereux ?

- Ils me protègent des morts et de ces groupes de bandits qui tentent de nous piller. Je me rend bien compte que le jour où nous n'aurons plus du tout de provision, ils ne me feront pas de cadeaux mais... regarde moi, tu me vois tenter de les mettre dehors ? Tu me vois survivre seule dans les rues ? Je dois vivre avec leur façon de penser, de faire les choses, c'est ma seule chance.

Elle avait prononcé les derniers mots avec tristesse, continuant de fixer le bout pointu du crayon.

- Vient mon garçon, je vais te montrer tes amis...


Humanité : Tome 1 - ConfianceWhere stories live. Discover now