I. Seule au monde

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"Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle

Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,

Et que l'horizon embrassant tout le cercle

Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits"



En écrivant ces lignes, Baudelaire n'imaginait probablement pas que le monde tel qu'il le connaissait se transformerai en ça.

Assise sur le canapé modeste d'un sombre salon qu'elle avait découvert à peine une heure plus tôt, Emma lisait cet exemplaire des "Fleurs du mal", un recueil du célèbre poète Charles Baudelaire. Elle se souvenait vaguement l'avoir étudié au lycée. Ses beaux yeux verts émeraude parcouraient les lignes lentement. Sa mâchoire crispée cachait de petites dents encore blanches malgré sa nouvelle vie, et les lignes dessinant son visage permettaient à quiconque de comprendre que la jeune femme devait survivre.

Un craquement retenti derrière, elle tourna la tête et senti ses cheveux légers et fins frapper ses épaules dénudées. Mis à part ce vieux débardeur blanc, rouge sang par endroit ainsi qu'un jean troué au niveau du genoux droit, Emma n'avait pas collectionné beaucoup de vêtements. Malgré tout elle avait ses immortelles Rangers noires et abîmées qui lui permettaient de longs et fastidieux voyages à pied.

Elle déposa son livre prêt d'elle et porta sa main à la ceinture qui entourait solidement sa taille. Sous ses doigts, elle senti le bois solide qui formait le manche de son couteau de chasse. Une arme précieuse en ces temps sombres. Immobile, calme mais toujours vigilante et prête à agir, elle tendit l'oreille. Rien. Rien à part ces grognements et bruits de pas lourds qui étaient maintenant devenus une berceuse pour tout survivant.

Enfin, Emma cligna des yeux et retourna à son occupation, décidant que le bruit n'était pas un signe de danger. Lire lui rappelait le monde dans lequel elle était née, le monde dans lequel on allait voir des gens que l'on connaissait, puis on passait des heures à parler, rigoler, s'amuser. On croisait des gens que l'on saluait parfois sans même les connaître, par politesse. On pleurait de la perte d'un proche, puis le but était de continuer sa vie malgré tout.

Aujourd'hui, la mort était omniprésente, elle était l'âme de ces êtres dehors, elle était le compagnon de voyage de chacun des vivants, elle était l'image qui hantait les plus désespérés.

Cinq mois plus tôt, alors que Emma était en cours, elle se souvient encore avoir entendu ces quelques rumeurs concernant une nouvelle "maladie". Au début Emma croyait à une mauvaise blague, mais l'information avait été rapidement été confirmée officiellement. Certes, le gouvernement jurait qu'il pouvait gérer la situation, mais tout le monde en parlait. Peu à peu, on avait eu peur. "Même moi", pensa Emma. Des cas apparaissaient dans le monde entier. À la télé, en quelques jours, toutes les chaînes parlaient déjà de "zombies". Les grands du monde avaient commencé à organiser des conférences, discussions d'urgence... bref, le genre d'informations qui ne rassurent personne. Beaucoup ont commencé à parler de fin du monde, surtout les Américains d'ailleurs. De leur côté, Emma et ses amies préféraient ne pas dramatiser. Très vite, les armées du monde furent mobilisées. Des camps de quarantaine furent mis en place. Les scientifiques avaient le devoir de travailler à un rythme intense. Puis le gouvernement avait commencé à placer des sièges sur toutes les villes qui semblaient être touchées. Par chance, Emma ne faisait parti d'aucune d'entre elles. L'épidémie ne faisait que progresser, surtout dans les grandes villes. Suite aux sièges, les chaînes de télé furent nombreuses à arrêter de transmettre. Les quelques unes d'entre elles qui diffusaient encore montraient des images choquantes : des cadavres ambulants qui attaquaient la foule. Alors l'armée dû se faire plus présente encore. Des renforts furent appelés en Inde, aux États-Unis, en Allemagne.., mais jamais aucun pays ne pouvait libérer ses troupes. L'armée dû admettre qu'elle était dépassée par la situation. C'est alors que de grosses émeutes ont débuté partout dans le pays. Les chaînes diffusaient presque toutes des messages automatiques du gouvernement, demandant de rester chez soit et de respecter les ordres de l'armée ou autre membre du service publique. La communication devenait rare. Les opérateurs avaient aussi cessé de fournir le réseau. En quelques semaines, tout vira au cauchemar. Emma se souvenait encore de ce Samedi matin, quand Mélissa, une amie, avait décidé de rejoindre sa famille en hâte pour avoir des nouvelles. Elle était aussi sa colocataire. Le même jour Emma avait décidé de quitter la ville dans laquelle elle étudiait. Elle était de taille raisonnable et n'avait été que peu touchée par le virus, même si depuis quelques jours, les gens se voyaient pour partager leurs angoisses communes.

En fin d'après-midi, Emma s'était retrouvée seule dans une petite forêt, dans un espace dédié aux pique-niques. Il y avait quelques tables en bois accompagnées de bancs de la même matière...

Emma leva les yeux au ciel. Pourquoi se remémorer ces événements en boucle ? À quoi bon. Depuis qu'elle avait fuit, elle n'avais plus revu quiconque de censé. Seuls ces choses qui ne pensaient qu'à dévorer de la chair fraîche. La jeune femme senti des frissons lui remonter le long de la colonne vertébrale. Puis elle soupira. Elle jeta un regard autour d'elle, et ce qu'elle vit n'était pas très différent des précédentes maisons qu'elle avait occupé depuis le drame : meubles poussiéreux, objets peu rangés qui témoignaient d'une fuite soudaine et précipitée... sans oublier l'éclaboussure rouge écarlate qui s'étalait sur un mur près de l'entrée. Le sang de l'un d'eux. Emma se leva et se dirigea doucement vers une fenêtre. Elle écarta le rideau juste assez pour y passer un œil et observa la route qui passait devant la maison. Emma l'avait choisie car elle était à 6 kilomètres de la ville la plus proche. Et malgré les ordres du gouvernement, elle avait compris que c'était dans ces fourmilières géantes que le danger était le plus présent. Aux alentours, seule une autre petite maison était dressée, sans vie.

"Je la fouillerai demain". Elle laissa re-tomber le rideau et au même instant, un son attira son attention : un moteur. Un gros moteur. Sans hésiter, Emma se dirigea sur un beau fusil de précision qu'elle balança rapidement dans son dos. Puis elle monta à l'étage et observa par une des fenêtres qui lui donnaient le meilleur point de vue. À 500 mètres d'elle, "au nord", la jeune femme pouvait observer un imposant 4*4 noir qui se dirigeait vers la seconde maison. Déjà, sept créatures avançaient dans leur direction. Intriguée, Emma observa la scène, attendant de voir comment allaient se débrouiller ces personnes. L'attente ne fut pas longue. En effet, deux silhouettes sortirent du véhicule, chacun une arme de corps à corps à la main, et ils se lancèrent sur les zombies sans hésiter. "Des haches, plutôt efficace". Après quelques coups secs, les deux silhouettes restèrent quelques instants dehors afin de jeter un dernier coup d'oeil, puis elles entrèrent avec précaution dans la maison, suivi d'une troisième qui était sorti du véhicule après le massacre. Emma ne savait pas quoi penser. Ces personnes semblaient maîtriser le combat face aux créatures, même si niveau stratégie et discrétion, ils avaient des choses à revoir... dans tout les cas, ça faisait trop longtemps que la jeune femme était seule. Et qui sait, ses nouveaux voisins allaient peut-être l'emmener dans un camp de réfugiés, peut-être qu'ils étaient en expédition pour ramener des survivants. "Ou peut-être qu'ils sont là pour piller et tuer". La tête droite, Emma prit sa décision, si au levé du soleil ils n'étaient pas partis, elle irait les voir... sans violence...

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