24 Avril 1912.

15 2 0
                                    

Le bonheur,c'est l'absence de souffrance.

Sigmund Freud

-La famille Sage?Et si ils m'obligent à porter plainte?Et si ils me tiennent responsable de la mort de cette famille?paniquai-je.

Edmée eut l'air très calme,en espérant me communiquer cet état.

-Et si ils veulent que je leur offre une contribution financière.

-On s'y opposera,a répondu calmement mon enseignante,qui me suivait à la trace,ma mère ne pouvant pas m'aider.

-Mais vous imaginez la réaction de mon père?Il m'accusera de l'avoir ruiné?

-Je ne peux que m'opposer à cette remarque,Ania.Premièrement,tu en as parfaitement les moyens,secondement,ton père t'aime.

-Oui,il t'aime,fit la voix d'Alizzia derrière moi.

-Au final,a fait Edmée,tu doutes de l'amour de ton père alors que tu n'as aucun doute en l'amour d'un gamin des rues que tu n'as même pas connu une semaine.

J'eus l'impression de recevoir un coup de poings dans tous les organes.Il fallait donc que j'enquête.Moi qui pensait tout savoir de lui,j'avais été une petite sucrée naïve et ridicule qui ne le connaissait pas,qui ne pouvait pas le connaître.Il n'y a pas plus honteux,à part aller aux toilettes et être harcelé à l'école,que de se faire manipuler.Se sacrifier pour son amour est aussi admirable que se faire manipuler est innommable.Honnêtement,je ne pense pas que ce soit le cas.C'est impossible.Je pense qu'il y a des limites.

Mais si je m'étais donné la mort,nous aurions été au même point.Je ne serais plus harcelée,je ne serais plus en deuil.Surtout,je n'aurais plus à prendre le bateau et mon angoisse sera finie pour une éternité.

On prend le RMS celtic,demain à la première heure.J'arriverais en Grande-Bretagne le 1er mai.Le 5 mai seulement,je rentrerai en France.J'y étais encore au début du mois.Depuis,je n'eus plus aucune nouvelle de ma famille,et ils n'eurent plus aucunes nouvelles de moi.Dés que j'ai quitté ma ville natale,celle où j'ai passé mon enfance,définitivement finie le soir où j'ai rencontré Tristan.Il fallait que je reste attachée aux Sage.Même si ils ne m'accepteront jamais.Même si j'ai tué cette famille.Ils ont tous disparu à présent,et chaque année,je le promets,je retournerais à Inverness pour fleurir leur tombe.

-Madame?ai-je fini par lui demander.Que feriez-vous si la vie vous enlevez un être cher aussi vite qu'il vous l'a offert?Ou plutôt qu'avez-vous fait?

-Vous voulez savoir jusqu'où je suis allée pour récupérer ne serait-ce qu'un sourire de Spencergates?Jusqu'à vous manipuler?J'ai eu un enfant avec ce coureur de jupon britannique.Il venait du pays de ma mère où je n'étais même jamais allée.

Elle avait encore une chance de le revoir.Il était con,mais il était vivant.Et il ne lui manquerait pas.Tristan,lui,était le meilleur garçon de la terre en même temps que le meilleur guitariste.

J'avançai lentement sous l'averse de mes propres larmes.Je m'en fichais bien de quitter une Ville dont je n'aurais pas profité,que j'étais enchantée de découvrir et où je n'avais même pas envie de revenir.J'étais si perturbée.Je faisais mes valises avec hâte.Hâte de voir sa terre natale,quelque chose de très général mais qui me semblait incroyablement lié à lui,et où Alizzia voulait aller par simple goût de vivre,qu'elle avait la chance de ne pas avoir perdu.

-J'espère que ma mère ne s'est pas laissé mourir par inquiétude pour moi...a murmuré Leslie,allongée sur son lit en regardant le plafond.

-J'étais refoulée et reniée par mes parents,a fait Katty,là ils seront un peu obligés de s'inquiéter pour moi.

C'était misérable et elle n'en était pas fière.Je me suis accoudée sur le balcon en fer fin.J'ai regardé la ville.Tu ne me manqueras pas.Je voulais me réchauffer dans les bras de ma mère,profiter du substrat vital des bonheurs les plus simples.



Ania.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant