Chapitre 15 - Xan

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— Comment ça on doit abandonner tout ce qu'on a fait ? Mais tu te moques de moi ? s'écriait Xan face à Orion.

La pièce dans laquelle ils se cachaient était une salle de cours vide, au bout d'un des couloirs, pratiquement tout le temps vide, ils étaient sûrs ainsi de ne croiser personne. Les meubles étaient en bois, et leurs voix résonnaient dans la solitude des lieux. C'est Orion qui avait emmené Xan ici en revenant de son périple avec le meurtrier dont il n'avait pas raconté un mot, le visage cerné et un air épuisé et désespéré plaqué contre lui. Xan a cru pouvoir obtenir des informations permettant d'avancer sur l'enquête, ou quelque chose qui les aiderait, mais Orion avait refusé catégoriquement de partager quoi que ce soit.

— On n'en parle plus, et tu laisses tomber cette affaire, un point c'est tout.

— Mais dis-moi au moins ce qu'il s'est passé ! s'emportait Xan.

— Je n'ai plus envie de te parler, de quoi que ce soit, lâcha froidement Orion.

Xan cru sentir une douche glacée lui couler dessus. Iel sentit son cœur s'arrêter une seconde, avant de reprendre de plus belle dans une frénésie angoissante, son sang coulant d'une colère nouvelle.

— Comment ça ? T'es en train de me dire que toute notre amitié part en fumée, comme ça, sans explication, du jour au lendemain ?

— Exactement. Lâche-moi, maintenant, et arrête de t'intéresser à cette histoire de meurtre, c'était stupide de penser que nous pourrions avoir un quelconque impact dessus.

Les sourcils de Xan se froncèrent, iel ne comprenait pas ce changement d'avis si brusque de la part de son ami, mais iel répliqua :

— C'était ton idée à la base.

— Eh bien j'ai été bête, et je n'aurais pas dû t'en parler, je n'aurais même pas dû t'accorder mon attention.

— Sérieusement ?

— Mais fous-moi la paix à la fin, ai-je l'air de rire ? Non. Donc tu sors de ma vie, et tu passes à autre chose.

Orion était plus froid que jamais, sa voix tranchante comme s'il avait pour unique but de le.a blesser. Après tout ça, après que Xan ait pensé créer un vrai lien amical, pour une rare fois dans sa vie, c'est ainsi qu'il l'abandonnait... Xan sentit son cœur se briser, et d'une voix sanglotante et cassée, iel murmura :

— Je pensais qu'on était amis.

— Bien vu, moi de même, et finalement j'ai enfin compris que ça ne servait à rien. Ça n'a jamais servi.

Sur ce, Orion se dirigea vers la porte, et sembla susurrer un « désolé », mais Xan se demanda s'iel n'avait pas rêvé. L'étudiant.e s'assit finalement à l'une des tables, et se prit la tête dans les mains, songeant à de potentielles erreurs qu'iel aurait pu commettre, mais ne trouva rien. Iel pensait qu'enfin la solitude l'avait quitté, à tort, hélas. Et cette histoire de meurtre... L'absence d'Orion la veille avait probablement un rapport avec cette réaction absurde, mais Xan était trop blessé.e pour approfondir cette idée.

C'était trop, l'angoisse générale, l'ambiance obscure de l'université ces derniers temps, les cours qui lui mettaient la pression, et désormais, la perte de son seul ami... Xan se dit qu'il serait temps de partir, de s'autoriser quelques jours ou semaines loin d'ici, et retrouver sa famille, même s'ils le haïraient pour sécher les cours. Iel ne pouvait pas rester ici deux jours de plus, ou iel exploserait. Il fallait se reposer, se ressourcer, et quoi de mieux que sa maison et sa sœur pour cela ?

Il fallait fuir. Loin d'ici, et au moins, iel serait en sécurité, iel pourrait oublier toutes les supposées menaces qui lui planaient dessus ou sur l'école. Il fallait quitter cet endroit. Alors d'un pas décidé, Xan quitta la pièce et traversa les couloirs vides, puis la cour où des élèves discutaient sous les arches, leurs sacs en cuir posés près d'eux. Xan passa à travers les groupes, puis retrouva son dortoir, s'installa sur son lit pour parcourir le dossier des horaires de bus, prévu habituellement pour les vacances puisque les sorties étaient plutôt rares en période scolaire. Iel trouva finalement un trajet proche de chez ellui le soir-même, ce qui le.a rassura.

Il faudrait partir discrètement, car l'université tolérait mal les absences, et fuguer était interdit, il faudrait normalement l'appel d'un des parents, mais Xan n'avait pas le temps, et n'avait non plus d'excuse à leur donner. Iel pensa qu'iel parviendra bien à trouver une solution une fois arrivé.e là-bas. Xan remplit donc son sac de vêtements dans lesquels il cacha un couteau, puis réunit ses affaires de toilette. En se regardant dans le miroir, iel ne se reconnaissait plus ; ses cheveux de jais en bataille, son regard fatigué... Cette histoire de meurtre en avait changé un bien grand nombre, mais certains plus que d'autres.

A la tombée de la nuit, le ciel se déshabillait de ses couleurs ambrées pour se vêtir d'un voile azur baigné d'obscurité. Les ombres s'allongeaient lentement dans un silence inquiétant, et le vent murmurait une mélodie énigmatique à travers les branches des arbres de la cour. Xan se permit un dernier coup d'œil par la fenêtre et un au revoir à sa colocataire qui l'ignorait, puis iel quitta la pièce, son sac à dos marron sur le dos, et un air concentré sur le visage. Il y avait une vingtaine de minutes de marche à travers la forêt pour atteindre la ville, mais cela ne dérangea pas Xan qui était habitué.e aux trajets, même malgré la nuit et la température fraiche.

L'esprit de Xan pouvait enfin se reposer et se nourrir dans la pleine nature que lui proposaient les alentours de l'université, iel avançait à travers les sentiers sinueux et portait son attention sur le son des feuilles qui bruissaient dans les arbres. Soudain, un craquement sinistre se fit entendre tout près, Xan s'immobilisa, le cœur battant. Iel porta rapidement sa main tremblante à son sac pour fouiller rapidement et y sortir son couteau à l'instant même où un inconnu émergea des ombres et plaqua sa main sur la bouche de l'étudiant.e lui procurant un long frisson de terreur.

Xan lâcha son sac au sol, l'agresseur n'avait pas eu la bonne idée de retenir ses mains, ce qui lui permit de lui infliger un coup aux côtes. En un instant, la forêt passa d'un tableau empli de sérénité à une scène de danger et de mort, les arbres semblaient vouloir se rapprocher, et les ténèbres tentaient de le.a capturer dans leurs abysses. L'inconnu masqué restait silencieux en recevant son coup, et répliqua en lui assenant un coup sur le côté du visage, Xan se défendit comme iel put, mais la fatigue et le poids de la peur le déconcentrèrent. En un instant, Xan se retrouva plaqué au sol, son adversaire attrapa une pierre et lui frappa le front. Avant de s'évanouir, Xan aperçut deux yeux d'un vert émeraude sombre, de la couleur d'une forêt plongée dans l'obscurité.

Sous le murmure des ombresWhere stories live. Discover now