LOVERS - Personne d'autre que toi (Tome 3)

Passé 1

Huit ans plus tôt

Daël Hamilton

Les étoiles, c'est joli. On ne les regarde pas assez souvent. Je tire encore un peu plus sur mon cou pour avoir une vue d'ensemble. Elles bougent. Je ne savais pas qu'elles bougeaient.

— Daël, il est défoncé !

Le poids d'un abruti s'échoue sur mon dos et je me détache de ma vision nocturne pour réceptionner Stan qui manque de s'écrouler comme une merde, sur le bord de la route.

— Attention ! s'exclame son grand frère qui, pour être honnête, n'est pas dans un meilleur état que lui. Je ne t'emmène pas à l'hôpital cette nuit.

— Je vais bien, rétorque Stan. Arrête de me considérer comme un gamin de douze ans.

— Douze ? répète Fallone, elle aussi ivre morte. Tu es sympa, je t'en aurais donné cinq.

Stan se contente d'un doigt d'honneur, comme il sait toujours si bien le faire, et son grand frère reprend une conversation plus utile :

— On va où maintenant ?

La question fait rire tout le monde, car on s'est déjà fait virer deux fois des bars précédents. Ce n'était clairement pas la soirée prévue. À la base, on voulait fêter ma majorité à Amsterdam, mais on a loupé l'avion comme des bouffons. À la place, on a décidé de faire la tournée des bars à Londres.

On est bourrés et complètement défoncés. Comme on n'a pas pu se rendre à Amsterdam, on a fumé de la beuh pour compenser, peut-être même plus que tout ce qu'on aurait pu trouver là-bas. Heureusement que Noah n'est pas venu avec nous. Du haut de ses quinze ans, il n'aurait pas tenu le choc.

— Je vais gerber, informe Stan.

Bien, à dix-sept non plus visiblement.

— Je croyais que tu allais bien, commente son frère.

— Je viens de voir la gueule de Daël et ça m'a retourné l'estomac.

— Va te faire mettre, pouffé-je sans même réussir à trouver la force de me sentir insulté.

— Pourquoi ton mec n'est pas venu fêter ton anniversaire avec nous ? ajoute Stan, clairement pour m'emmerder.

Je lui lance un regard blasé, il sait très bien la réponse. On se prend souvent la tête avec Daniel à cause de ça. De mes cousins et moi. De mon penchant pour l'alcool et la beuh. De mes soirées interminables et de mes gueules de bois au matin. Des fois, je me demande comment ça se fait qu'on soit toujours ensemble. Lui si parfait, et moi si... Si quoi ? Je ne me définis pas. Je suis loin d'être un raté. Je suis le rejeton d'une des familles les plus riches de la ville, j'ai un avenir en or, une gueule pas trop mal, une majorité assez récente, des cousins géniaux et un mec pire que canon. Je crois que je suis quelqu'un avec de la chance. C'est peut-être ça qui l'énerve, Dani. Il trouve que je ne l'exploite pas assez. Que je n'en fous pas une au lycée, que je sors trop, que je flingue ma santé, que j'agis comme un connard avec mon père. Dit comme ça, on a l'impression qu'on passe notre temps à se détester, mais en vrai la plupart du temps, ça se passe bien, nous deux. C'est pour ça que ça me fait chier qu'il n'aime pas ce côté de ma personnalité. Le côté pas soumis au grand Miles Hamilton.

Un bruit de gerbe me sort de mes pensées. Stan est en train de vomir dans une poubelle. J'éclate de rire avec Fallone alors qu'Aiden se précipite sur son frère pour lui tenir la tête en dehors du vide-ordures. Ça pourrait être mignon s'il n'était pas en train de l'insulter en même temps.