Chapitre 10- L'enterrement

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J'essaie doucement de me redresser, mais j'ai la tête qui me tourne. J'ai encore envie de vomir, mais je sais que plus rien ne sortira. Je me concentre pour réfléchir. Qu'est-ce que cette putain de jambe fait là, dans un trou derrière ma putain de cave ?! Donc c'est vraiment moi qui l'ai tué ? Non, c'est impossible. Jamais je ne lui aurais fait de mal. Et puis, je suis presque sûre que quand on tue quelqu'un, on s'en souvient. Le truc, c'est que moi je n'ai aucun souvenir d'avoir tué Murray. Je suis peut-être somnambule, ou quelque chose dans le genre. Ou alors mon corps s'est retrouvé prisonnier et je ne pouvais plus le contrôler, ce qui m'arrive assez souvent ces derniers temps. Dans tous les cas, c'est moi l'assassin. Bordel, Camille avait raison depuis le début. Il est pratiquement devenu fou à cause de cette histoire.

Soudain, j'entends la porte de la cave grincer. Je me retourne vers le trou dans le mur, et arrête de respirer. J'ai le cœur qui se met à battre la chamade. Le meuble grinça, et j'aperçu une ombre. Une tête passa à travers le passage, et mon sang ne fit qu'un tour ; c'est Camille.

Il me fixe. Il baissa ensuite les yeux vers les fleurs, et la jambe. Je m'attends à tout moment à ce qu'il se mette à hurler, qu'il me saute dessus pour m'arrêter. Mais il reste très calme, le visage impassible. Il descend du meuble et s'avance vers moi, les mains dans les poches.

-Alors, ça va comme tu veux, April ? Me demanda-t-il presque en souriant. Je ne sais pas quoi dire, ni quoi faire. Je suis absolument immobile de peur. J'ai l'impression que le sang dans mes veines se transforme en béton, et que je deviens une putain de statue. Voyant que je ne dis rien, Camille continue ; Ouais, tu es perplexe. Je vais t'expliquer. En fait, ça fait plusieurs mois que je te suis. J'attendais le moment où tu me conduirais là ou tu avais planqué la jambe de Murray. Mais putain, je m'attendais pas à ce que tu m'emmènes là où tu avais aussi caché les fleurs ! Mais ok, ça me va. J'ai toutes les preuves pour faire ce que je veux faire depuis des mois.

Il se mit à rire, et s'avança encore vers moi. Je ne peux rien faire. Il va m'arrêter et me dénoncer. Je vais finir mes jours en prison, et je l'aurais mérité. Ce que j'ai fait, c'est impardonnable. Je suis un monstre. J'émet encore un doute – peut-être suis-je dans le déni, que tout ce qui était écrit dans la thèse était vrai. Sur ces pages, il était aussi inscrit que j'avais provoqué l'accident de voiture de Murray, et que j'aurais par conséquent tué sa femme. Je n'avais aucune raison de faire ça. Même si les preuves sont accablantes, je refuse toujours de croire que j'ai pu faire ça. Un tel acte, aussi cruel, barbare et sanglant, ça ne me ressemble pas. Je veux dire, je ne tue même pas les mouches et je fais attention où je mets les pieds quand il pleut, pour ne pas risquer d'écraser un escargot. Alors tuer un être humain ? D'autant plus mon ami, c'est juste invraisemblable. Pourtant, je crois bien l'avoir fait. J'aurais tout le temps d'y réfléchir quand je serais derrière les barreaux. Je ferme les yeux, et attends que Camille fasse ce qu'il a à faire. Mais il ne se passe rien. Au lieu d'entendre le bruit métallique des menottes, j'entends des bruits de pas étouffés, et un poids tomber au sol. J'ouvre les yeux, et recule contre le mur. Camille est allongé au sol, le regard dans le vide, une pique plantée dans la tête. Derrière lui se tient Ibliss, qui me fixe comme toujours. Je suis tellement choquée que je ne dis rien. Mes bras, mes jambes, ma nuque, tout devient froid, comme si tout était mort, mais j'ai extrêmement chaud en même temps. Je n'arrive pas à articuler le moindre mot. Mon corps tente de se défendre pour ne pas imploser, et je me mets à fondre en larme. Ibliss se précipite vers moi et me prends dans ses bras. Je colle ma tête contre sa poitrine pour entendre les battements de son cœur. J'halète, j'ai du mal à respirer. Ibliss m'embrasse le haut du crâne, et me rassure en me disant que tout va bien. Je sanglote sans pouvoir m'arrêter. Sa présence en ce moment est la chose dont j'avais le plus besoin, même s'il vient de tuer Camille. Il vient de tuer Camille. Bordel, mais qu'est-ce qui se passe dans ma vie ? C'est un cauchemar, ce n'est pas possible autrement. Je suis endormie, et je vais bientôt me réveiller aux côtés de Kôme, qui ne sera plus à l'hôpital, mais chez nous. Peut-être que si je me pince assez fort, j'arriverai à me réveiller.

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