Chapitre 8 : Le rêve

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Chaque goutte d'eau tombant de la voûte de ma cellule sur mon front résonnait comme un écho solitaire dans mon esprit.

Plouf... Plouf... Plouf...

Le rythme irrégulier de ces gouttes reflétait l'incertitude de ma vie depuis mon exil involontaire. Elles étaient froides, brûlant ma peau à chaque impact, portant en elles toutes les émotions que j'avais refoulées.

Dans cette obscurité presque totale, les chaînes autour de mes poignets me liaient à cette réalité sombre. Les murs de pierre froide semblaient se resserrer autour de moi.

Plouf... ... Plouf... ... Plouf...

Chaque goutte rythmait cette transformation en moi. J'étais à la croisée des chemins, entre l'enfant que j'avais été et l'individu que je devais devenir. C'était un mélange de terreur et de libération qui me traversait. La terreur se manifestait par une sensation glaciale qui me parcourait la colonne vertébrale, comme si chaque vertèbre était un glaçon se formant un à un. Mes mains tremblaient légèrement, et je pouvais presque entendre mon propre cœur battre dans ma poitrine, comme un tambour lointain annonçant une guerre imminente. D'un autre côté, la libération était comme un feu doux qui brûlait dans le creux de mon estomac, s'élevant lentement pour réchauffer mon cœur et mes pensées. Pour la première fois, je sentais que j'avais un certain contrôle, une certaine autonomie sur ma vie, même si les chaînes métalliques qui enserraient mes poignets semblaient rire de cette idée.

Plouf... Plouf...

Les gouttes continuaient de tomber, mais ce soir, elles étaient différentes. Elles étaient plus lourdes, comme chargées d'une terrible nouvelle qui allait bientôt me parvenir. Les voix des gardes parvenaient jusqu'à moi, leurs mots flottant dans l'air, emportés par le peu de vent. Et ce que j'entendis ensuite brisa le fragile équilibre que j'avais tant lutté pour maintenir.

Les gardes parlaient entre eux, leurs voix teintées d'une cruauté décontractée. J'essayais de me concentrer sur les gouttes d'eau qui tombaient irrégulièrement sur mon front, comme si elles pouvaient me protéger de la réalité qui s'apprêtait à me frapper. Mais ce soir, même elles semblaient s'être tues, comme si elles attendaient, elles aussi, l'inévitable.

"Tu as entendu parler de ce village qu'on a découvert près du puits où on a trouvé ce gamin ?" demanda l'un d'eux, sa voix trahissant une sorte de jubilation malsaine.

"Ah, oui. Les maîtres ont fait quelques recherches. Il semblerait que ce village ait été... comment dire... effacé de la carte," répondit l'autre, riant comme si c'était la meilleure nouvelle de la journée.

Mon cœur se figea un instant. Le puits où on m'avait trouvé ? Ils parlaient de mon village. Une vague de désespoir m'envahit, submergeant tous mes sens. Je voulais crier, hurler à l'injustice de ce monde, mais aucun son ne sortit de ma bouche. C'était comme si j'étais devenu muet, incapable de donner une voix à ma douleur.

Mais alors, une rupture intérieure se produisit en moi, silencieuse mais dévastatrice, déchirant le tissu même de mon âme. La folie que j'avais si méticuleusement emprisonnée se libéra enfin, déferlant à travers mon être comme un tsunami de désespoir et de rage. En repensant à tout ce que j'avais enduré-le harcèlement incessant, l'isolement suffocant, les nouvelles bouleversantes, le mépris flagrant, les jalousies venimeuses, les coups de fouet cruels, les regards pernicieux, la haine ambiante, les sourires narquois des sadiques, et l'humiliation quotidienne-je réalisai que je n'avais jamais eu un moment de répit. Une force ou une faiblesse, je ne saurais dire, avait germé en moi. J'aurais dû la contenir, la maîtriser, mais à cet instant, je la laissai s'échapper, incontrôlable et dévastatrice.

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⏰ Last updated: Feb 01 ⏰

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MiradjinnWhere stories live. Discover now