Chapitre 15 | C'était si bien parti

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Je sonnais, sonnais, puis tambourinais à la porte. Toujours rien. Je ne sais pas combien de temps j'ai frappé. Ma mère devait être à la porte depuis un moment quand j'ai repris mes esprits. Elle me regardait comme si j'étais fou. Ça m'a énervé. Quoi ? D'abord elle me foutait dans la merde et après elle me jugeait ? De quel droit ! De quel droit ! Je suis rentré en titubant, la poussant au passage.

- Qu'est-ce qui se passe, Olivier ? Parle-moi, tu m'inquiètes.

Lui parler. Pour lui dire quoi. Et il était bien temps de s'inquiéter pour moi.

- Il me faut de l'argent. Maintenant.

- Mais, calme-toi, assieds-toi.

- Il faut que tu vendes la maison. Maintenant, tu m'entends. Maintenant !

Je hurlais en marchant dans le salon.

- Calme-toi, tu n'es pas dans ton état normal.

- Je n'ai plus d'état normal, tu comprends, mon état normal c'est...

Je m'arrêtais. La fixais sans la voir.

- Donne-moi l'argent.

- Je t'ai dit, je n'ai plus d'argent. Que cette maison. Je ne peux pas la vendre tout de suite.

- Tu ne veux pas, ce n'est pas pareil. Tu préfères laisser ton fils crever, c'est ça ?

- Mais non mon chéri, mais je ne peux pas.

- Tu ne veux pas, tu ne veux pas ! Parce que tu vas voir si tu ne peux pas !

Je la secouais. Je la secouais comme... Comme un fou. Fou que j'étais cette nuit-là. J'ai repris conscience. Ma mère gisait à mes pieds. J'étais sur le canapé et elle par terre. Pas de sang. Je la secouais, paniqué, mais elle ne bougeait pas. Elle ne bougeait plus. J'essayais d'écouter sa respiration. Je n'entendais rien. Je n'arrivais pas à savoir si ça venait de la coke, car je sentais un bourdonnement en permanence depuis quelques jours.

J'allais lui chercher de l'eau et je pensais à la police. Je me dis que ça sonnerait quand même bizarre si elle était morte et qu'on retrouvait un verre d'eau près d'elle. Ça indiquerait le proche. Je restais malgré tout un bon moment à écouter son cœur. Elle ne respirait plus. Elle était morte. Plus besoin d'eau. Je venais de tuer ma mère. Marrant comme dans ce moment unique, j'ai eu des réflexes vus à la télé ou au cinéma. J'essayais d'enlever mes empreintes des endroits les plus gênants. Pour le reste, pas besoin, après tout, c'était la maison de ma mère, la maison de mon enfance. La maison de mon enfance.

Je me suis mis à pleurer, pris de soubresauts, perdant totalement le contrôle. J'ai couru aux toilettes où après avoir vomi tout ce que j'avais mangé depuis une semaine, j'ai chié pendant trente minutes. Me revidant par la bouche de temps en temps dans le lavabo. J'ai nettoyé comme j'ai pu puis je suis rentré à pied. Nanterre-Belleville à pince. Comptez trois heures en mode direct, cinq heures en parcours alcolocké après avoir tué votre mère. Je devais avoir l'air totalement fou, titubant plus que je ne marchais. Heureusement, je n'ai pas croisé beaucoup de personnes au départ ; il était quatre heures. Et à partir de sept heures, j'ai eu les idées un peu moins embrumées. Je faisais sûrement peur mais pas autant. Je suis arrivé chez moi, me suis endormi comme une masse et deux heures plus tard le téléphone sonnait :

- T'es où là ? Tu sais qu'on a un service à assurer. Si tu viens même plus, si on va par là, pourquoi je viens moi.

Le débit de Seb s'était encore accéléré. J'avais l'impression que toutes les personnes autour de moi se droguait, que chaque jour la dose de coke était plus grande.

Une tarte dans la gueuleWhere stories live. Discover now