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Je baille pour la énième fois depuis que je suis affalée sur la banquette du hall de l'hôtel. Ça doit faire quinze minutes que Madame Herrero discute avec l'employé de l'accueil. Au début, j'ai suivi leur échange. Elle est amie avec le propriétaire de l'hôtel et est parvenue à nous obtenir quatre chambres à prix réduits. Sans surprise, parmi tous les duos formés, je me retrouve avec Angel.

Cependant, depuis environ cinq minutes, j'ai arrêté de les écouter. Avec la fatigue, les mots en espagnol ont commencé à s'embrouiller dans mon esprit. Je suis assez étonnée que les autres petits vieux aient l'air aussi en forme. Comparés à moi, ils ont dû profiter du vol pour dormir.

Personnellement, je ne parviens jamais vraiment à m'assoupir dans l'avion. J'ai donc choisi de regarder trois films et d'écouter de la musique.

J'en viens presque à regretter mon choix.

Je dois perdre la bataille contre Morphée car je suis réveillée par le timbre insupportable de mon colocataire.

— Debout l'Alcoolique, à moins que tu ne préfères dormir ici.

Je grogne plusieurs fois, me frotte les yeux dans l'espoir de m'habituer à nouveau à l'éclat des lampes puis me lève avec difficulté. Sans surprise, cet enculé ne prend pas la peine de m'attendre, et encore moins de tirer ma valise comme le gentleman qu'il ne sera jamais.

Je lui emboîte le pas après avoir souhaité bonne nuit au reste du groupe. J'ignore si Angel fait exprès de marcher aussi vite mais je suis forcée d'allonger le pas pour ne pas le perdre de vue. Arrivés devant la porte de notre -beurk- chambre, j'ai à peine le temps de lire le numéro 327 qu'il glisse la carte dans le mécanisme et abaisse la poignée.

Je me précipite à sa suite, histoire qu'il ne m'enferme pas dehors et laisse mon regard se perdre sur l'intérieur. La chambre est bien plus grande que ce à quoi je m'attendais. Malheureusement, les contacts de notre voisine admettent des limites.

Il n'y a qu'un seul lit.

D'accord, donc ma vie s'est transformée en stupide livre d'adolescent.

Par ailleurs, je suis trop épuisée pour faire des chichis ce soir. Je fais rouler ma valise vers le côté gauche du lit afin de marquer mon territoire et de faire comprendre à mon colocataire qu'il dormira de l'autre côté, qu'il le veule ou non.

Je prends toujours le soin de dormir le plus éloigné possible de la porte de la pièce où je passe la nuit. C'est psychologique. J'ai peur qu'une entité ou je-ne-sais quelle autre connerie vienne pour me tuer. Au moins, ça m'offre l'illusion stupide que je ne serai pas la première à mourir.

Je suis cinglée, je sais.

Angel s'est affairé sur la petite terrasse. Nous sommes au premier étage. Personnellement, je profiterai de la vue plus tard. Mon téléphone indique deux heures et demie du matin. D'habitude, je ne suis pas forcément fracassée à cette heure -si ce n'est à l'alcool- mais le voyage a drainé toute mon énergie.

Je profite de l'absence de mon colocataire pour extraire, non sans mal, mon pyjama de ma valise avant de filer dans la salle de bain.

Face à mon reflet, je me remercie intérieurement d'avoir fait des nattes et de ne pas être obligée de me lancer dans une coiffure protectrice à cette heure-ci. Une fois prête pour la nuit, je sors de la pièce et tombe nez-à-nez avec Angel.

Il ne semble pas non plus fatigué.

Qu'est-ce qu'ils prennent tous dans cet immeuble pour avoir l'air aussi frais ?

Il me bouscule presque lorsqu'il s'affaire dans la salle de bain. Je ne relève pas, trop occupée à viser le lit. Quelques secondes plus tard, je saute sur ce dernier et roule jusqu'à ma place. Le matelas est incroyable, les draps super doux et l'oreiller, de taille parfaite.

Sativa: Feel in a HeartbeatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant