Chapitre 25

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Est-ce qu'elle venait d'halluciner ? Un flic venait vraiment de lui dire que sa petite amie était une tueuse en série ? Membre d'une secte ? Et pas n'importe quelle tueuse, le tueur le plus rechercher d'Europe. Le tueur sur lequel elle avait fait un dossier pour son cours de société moderne. Ça ne pouvait pas être vrai, pensa Ylena. Ce n'était pas un vrai flic, il puait l'alcool, les yeux cernés de noirs, la barbe et les cheveux en batailles et il ne lui avait donné qu'un petit bout de carton pour justifier son identité. Ça ne devait être qu'une mauvaise blague.

Elle relut le nom sur la carte de visite :

Lieutenant Godefroy Delaplace.

Il lui avait quand même parlé de l'arrestation de Cimeon. Elle n'avait jamais su pourquoi on l'avait arrêté, Maple évitant toujours le sujet, mais ça ne pouvait pas être pour meurtre. Il était si gentil, il avait une vraie compassion pour les animaux, il ne pouvait pas faire une chose pareille. Ça ne pouvait être qu'une blague.

Maple et son frère ne pouvaient pas faire partie d'une secte. L'Ordre Olympie, ce n'était même pas le nom d'une secte. Les sectes ça devaient s'appeler l'église des reptiliens, le temple des bons pensants, la maison des innocents. L'Ordre Olympie, ça ne sonnait pas comme un nom de secte, mais plutôt comme une compagnie dans un livre de fantaisie à la recherche d'un anneau perdu. Les Sylvestres n'avaient rien à voir avec des illuminés.

Ce ne pouvait pas être des tueurs. Elle avait étudié l'étripeur pour ces cours, elle savait qu'il s'agissait d'un seul homme, enfin, d'après ce qu'on disait dans les médias. C'est vrai qu'elle avait lu quelques articles qui rapportaient que les meurtres ressemblaient à des sacrifices rituels, mais c'était dans des revues prônant les théories du complot et qui ne citaient jamais leurs sources.

Ce que lui avait dit cet inconnu, qui n'était certainement pas un flic, ne pouvait pas être vrai. Rien ne se tenait. Maple était très proche de sa fratrie, on ne pouvait pas nier qu'ils ne semblaient pas très enclins à se lier aux gens extérieurs, mais ils n'avaient rien à voir avec une famille de tordus. Ils avaient simplement eu une enfance difficile. Une enfance dont Maple ne voulait jamais parler. C'est vrai qu'elle ne disait jamais rien sur sa vie, sur sa famille, mais ça ne voulait pas dire qu'elle tuait des gens ou qu'elle faisait partie d'une secte.

Ylena ne pouvait pas croire tout ce que cet homme lui avait raconté, pourquoi un tueur viendrait en cours d'ethnologie ? Ça ne se tenait pas, Maple était une femme généreuse, intelligente, timide, elle n'avait rien à voir avec ce qu'il lui avait rapporté. Mais plus elle y pensait, plus elle doutait. Maple était dans les Alpes peu de temps avant qu'on y découvre la dernière victime de l'étripeur, mais ce n'était qu'une coïncidence.

Ça ne pouvait qu'être une mauvaise blague. Il n'était pas flic, si c'était le cas, il l'aurait mis en sécurité, surtout s'il pensait vraiment qu'elle était en danger comme il lui avait rapporté. Mais pourquoi ce soit disant Godefroy voudrait lui faire cette blague loin d'être drôle ? Comme par hasard, il accusait Maple d'être le tueur sur lequel elle avait fait son dossier de société moderne. C'était certainement une connaissance de l'un de ses amis qui lui faisait une blague, il n'y avait pas d'autre explication, mais pourquoi aller jusqu'à imprimer une carte de visite.

Ylena se souvint de l'absence de Maple à l'un des cours d'ethnologie, elle avait dit être partie pour un rendez-vous d'affaire en Belgique, quelques semaines plus tard, les médias annonçaient un nouveau meurtre à Bruxelles.

Elle se prit la tête dans les mains, elle avait l'impression de devenir folle. Ce n'était que des coïncidences. Bruxelles, les Alpes. C'était les derniers lieux des meurtres de l'étripeur, deux lieux où Maple se trouvait au même moment. Mais ça ne pouvait être que des coïncidences.

Elle devait parler à Maple, elle devait lui demander des explications. Elle seule pouvait la rassurer, rire de ces accusations. Ce n'était qu'une mauvaise blague, mais elle avait besoin que Maple lui confirme parce qu'elle commençait malgré elle à y croire.

Ylena lui envoya un message lui demandant de venir à son appartement, elle hésita, mais lui dit qu'un certain Lieutenant Delaplace était venu lui rendre visite. Maple arriva en quelques minutes, elle ne sonna même pas à l'interphone et pénétra dans l'appartement sans prendre le temps de frapper à la porte.

— Où est il ? aboya-t-elle affolée.

Elle déposa le regard sur Ylena qui avait perdu le sourire qu'elle avait aux lèvres quelques heures plutôt. Les mains de Maple étaient rouges comme si elle les avait plongées dans une eau bouillante et les manches de son manteau semblaient dégager une légère fumée blanche. Elle était sur ses gardes, comme si elle était prête à en découdre avec ce soit disant flic.

— Il est parti, je ne l'ai même pas laissé entrer dans mon appartement.

— T'as eu raison, dit Maple en reprenant son calme secouant ses mains comme si elles étaient douloureuses.

— Je vois que tu connais ce type, souleva Ylena.

— Oui, oui, c'est lui qui en a après mon frère, se justifia-t-elle, tu sais, c'est lui qui l'a arrêté.

— Il ne m'a donc pas menti, dit elle pour elle-même.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Je dois te poser une question Maple, reprit-elle d'un ton ferme alors que ses yeux brillaient de larmes, mais je suis pas certaine que tu me dises la vérité.

— Je t'écoute, je n'ai rien à te cacher.

— Est-ce que tu connais un truc qui s'appelle l'ordre d'Olympe ?

— L'Ordre Olympie, reprit Maple avec une grimace.

Ylena comprit que sa petite amie savait très bien ce que le Lieutenant lui avait raconté. Ce n'était donc pas une blague. Maple et sa fratrie faisaient bien partie d'une secte. Maple était une meurtrière. En le formulant dans sa tête, Ylena eut la nausée. Maple se précipita vers elle, mais elle lui fit signe de ne pas l'approcher.

— C'est une organisation qui met en relation des entreprises, tenta d'expliquer Maple, mon entreprise en fait partie, pourquoi ?

— Il parait que c'est une secte.

— J'ai entendu des rumeurs, mais...

— Est-ce que ton frère s'est fait arrêter pour être l'étripeur ? coupa Ylena en essuyant les larmes qui perlaient à ses yeux, la voix tremblante.

— Il a été disculpé.

Elle ne disait pas non, elle ne disait pas qu'il n'était pas coupable. La gorge d'Ylena se resserra un peu plus.

— C'est ce flic qui en a après lui, continua Maple.

— Il n'en a pas qu'après lui, avoua Ylena d'une voix éteinte.

— Qu'est-ce que tu veux dire ? Qu'est-ce qu'il t'as dit ?

Ylena prit une grande inspiration, une fois qu'elle aurai dit les mots qui brulaient sa langue il serait trop tard pour retourner en arrière.

— Est-ce que c'est toi l'étripeur ? lança-t-elle en serrant les poings.

Elle ferma les yeux en priant pour que Maple lui dise que non, mais une longue minute s'écoula sans qu'aucune d'elles ne parlent. L'atmosphère c'était peu à peu alourdie au fur et à mesure qu'Ylena comprenait que le Lieutenant Delaplace n'avait pas menti, que ce n'était pas une blague, que tout était bien réel.

— Ce n'est pas ce que tu crois, dit finalement Maple alors qu'une lourde larme roulait sur sa joue.

Encore une fois, elle ne disait pas non. Ylena se mit à pleurer, elle ne voulait plus rien entendre. Elle ne voulait rien savoir de plus. Elle supplia Maple de partir et ne plus jamais revenir. Elle ne la regarda même pas, incapable de faire face à cette vérité absurde.

Maple quitta l'appartement sans objecter, alors qu'Ylena essayait encore de se persuader que rien n'était vrai. Elle devait faire un mauvais rêve, elle essaya de toutes ses forces de se réveiller, mais rien n'y faisait, elle était bloquée dans ce cauchemar.

Le Fou de la ReineWhere stories live. Discover now