Chap. 8

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J'ouvre la lettre, ressentant, malgré moi, une pointe d'appréhension.

L'encre noire est encore fraîche sur le papier blanc, ce qui m'amène à penser que la lettre a été écrite au lycée ?

"Taissa, Taissa, Taissa, n'arrêteras-tu jamais de me surprendre ? Je vais t'expliquer une petite chose, je ne vérifie pas la liste tout le temps, je reçois simplement une notification lorsqu'une modification a eu lieu. Tu essayes de t'échapper mais je ne te laisserai pas me glisser entre les doigts, tu es une perle rare Taissa. Tu apportes à la liste de l'espoir, toutes ces filles complexées se sentent mieux, elles se sentent moins banales. Car, on ne va pas se le cacher, tu es quelqu'un d'extrêmement banale, une petite "Madame Tout le Monde", mais tu es un espoir pour beaucoup de personnes, et moi, ça m'arrange. Plus que deux jours et je te dirai si tu restes dans ma liste, prends soin de toi"

Je replis rapidement la lettre et la pose dans mon casier. Je ne suis pas mieux qu'avant, cette lettre m'a encore plus démoralisée.

Voilà qu'en plus d'être coincée, pathétique, insociable, laide et inutile, je suis banale.

Une nouvelle fois on me confirme des faits sur moi, et encore une fois ça me blesse.

Je pourrais rajouter susceptible à la liste.

Décidément les listes ne m'apportent rien de bon.

J'aimerai être le genre de personnes qui ne se soucie pas de ce que peuvent penser les gens. C'est un poison de s'intéresser aux pensées des autres nous concernant, j'aimerai pouvoir me dire "je me fiche de ce qu'ils disent", seulement cela ne fonctionne pas avec moi.

Même si le jugement des autres m'atteint, je dois faire semblant, les populaires ne s'intéressent pas à ce genre de choses, non ?

À vrai dire, je n'en sais rien, je n'en côtoie aucun. Du moins je n'en connais réellement aucun.

D'ailleurs il me semble que Brett m'attend, j'essuie les quelques larmes présentes sur mes joues d'un revers de main et je ferme mon casier.

Je respire un grand coup, ce qui ne m'aide absolument pas, et je déplace mes pieds d'une allure que je veux normale, jusqu'à l'extérieur.

Brett est là, appuyé sur ses deux paumes de main, le buste en arrière. Même dans cette position il reste "cool", si je faisais ça, je me tordrais les bras devant tous les lycéens. Maladroite.

Son regard se pose sur moi et il me sourit gentiment.

Je m'avance et je m'assois en tailleur à ses côtés. Je commence à arracher l'herbe sous mes mains, pour m'occuper.

- Tu veux en parler ? me demande t-il d'une voix douce que je ne lui connais pas.

PDV Brett.

Elle garde son regard vers l'herbe qu'elle est en train de détruire.

- Je- il n'y a pas grand chose à dire.. annonce t-elle.

Sa voix est petite, quasiment tremblante. Est-ce qu'elle a pleuré ? Juliana n'y a pas été de main morte, j'aurais presque de la peine pour elle. Elle a l'air si fragile, comme si, à la moindre épreuve elle allait se briser en milles morceaux et s'envoler au gré du vent.

Me voilà poète.

Ses fines mains continuent d'arracher l'herbe et je me rends compte que c'est un geste nerveux, il faut que je fasse quelque chose.

Je pose ma grande main sur la sienne, et sa tête se tourne immédiatement vers moi, elle est surprise et choquée de mon geste. Ses pommettes sont rouges, elle est gênée.

La (fausse) listeWhere stories live. Discover now