Cher Journal...

*3*

« Cher Journal,

J'ai appris des choses, dernièrement. J'ai compris que l'esprit humain est dérangé, puissant et faible à la fois. Je suis des faibles, et je l'ai toujours su. Cependant, je ne me croyais pas en danger... Pourtant, les esprits forts contrôlent le monde... ils l'adaptent à leur désir.

Moi, je suis en train de me faire reprogrammer. Je deviens une loque, un jouet, une petite chose fragile prête à tout pour un peu de tendresse... Pitoyable, non ? J'aurais aussi dit ça avant, parce que maintenant, je sais... L'esprit faible cède, accepte, suit les règles et... vit.

Est-ce que ça en vaut la peine ? Vivre pour ne plus s'appartenir n'est plus une vie en soi... Pourtant, j'obéis.

J'espère survivre, tout en sachant que bientôt il en sera fini de moi. »

***

Une dernière gorgée de mon vin, et je tourne sur moi-même en contemplant mes allures de femme fatale. Dans cette robe, je suis superbe ! Sans perdre mon sourire, jouant des sourcils de manière suggestive, je demande l'avis auprès de Nat qui confirme en levant son verre.

– Tu es magnifique, ma chérie, il a intérêt à te faire perdre la tête, cet Adam !

– Je n'en doute pas une seconde, nous nous tournons autour depuis trop longtemps. Maintenant, il se sent enfin prêt pour une nouvelle histoire... avec moi.

– Tu as sauvé son âme souffrante par la perte de l'unique amour de sa vie, et lui te rend amoureuse et radieuse, on dirait l'une de ses romances télévisées...

– L'unique ? répété-je, soudain mal à l'aise.

– Oui... bafouille Nathalie. Il devait le penser, car ils se sont mariés. Néanmoins, maintenant, le destin a placé sur son chemin sa véritable âme sœur ! Et c'est beaucoup mieux, crois-moi !

Je plisse les yeux, perplexe, alors que mon amie attend, mine de rien, de voir si elle a su se rattraper correctement. Je me sens beaucoup moins sexy à savoir qu'Adam a déjà connu le grand amour. Non, je ne dois pas me démoraliser.

– Il a certifié vouloir faire les choses dans les règles, et je suis tellement excitée que j'ai peur de l'effrayer... Ce serait tellement gênant. Je vais suivre la cadence, Nat. Qui vivra verra, et j'ai vraiment envie que ça marche.

Je ne dois pas me torturer à ce point. J'ai ce que je voulais, après tout. Mon amitié avec Adam compte beaucoup... Désormais, j'ai besoin de plus parce que je suis tombée amoureuse de lui. Et puis, la première fois qu'il s'est laissé aller devant moi, j'ai eu tellement envie de l'embrasser, de le câliner, le rassurer.

– Bon, je vais y aller, moi. Tu es parfaite. Mets le paquet, ma belle, il n'attend que ça !

– J'espère que nous passerons enfin le stade des bisous, câlin, et amitié platonique...

– J'attends ton rapport demain, à la première heure ! se moque-t-elle, puis fait mine de réfléchir. Quoique, si tu m'appelles à la première heure, cela voudra vraiment dire que ses exploits laissent à désirer.

– Méchante ! ris-je en lui lançant un coussin. Je t'appelle.

Natalie prend ses affaires après avoir terminé son verre, m'envoie un baiser à distance, et s'en va en chantonnant. Celle femme vivra très longtemps parce qu'il n'y a pour elle que le présent qui compte, la joie, les sorties, des amants par milliers... Moi, je me suis amourachée d'un homme libre par sa présence, mais en couple par son esprit. Adam m'a touchée par sa sensibilité. Il était seul depuis trop longtemps, nous avons sympathisé, je me sentais obnubilée par ce désespoir qui l'entourait, lentement, l'envie de le rendre heureux de nouveau s'est installée. Lorsqu'il m'a annoncé le décès de sa femme, j'ai vraiment eu beaucoup de peine. Puis le revoyant de temps en temps sur ce banc public au parc, nous sommes devenus amis... J'ai pensé que cela me suffirait... je me trompais. Rapidement, j'ai ressenti du désir pour lui. Seigneur, comment résister alors que son regard représente l'érotisme incarné ? À chaque fois qu'il me parle, je me vois nue dans ses orphelines. Malheureusement, dès que je tente quoi que ce soit, Adam détourne timidement la tête, mal à l'aise, gêné... me laissant confuse à un point inimaginable.