Opération "attraction glaciale" [SWANQUEEN]

❄ - Chapitre 14 - Partie 2 - ❄

| Voici la deuxième partie du chapitre 14. Bonne lecture ! 

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10 décembre 2021 – Bordeaux – Emma,

Mon trousseau de clés me glisse des mains pour la troisième fois. Un énième grognement m'échappe. Je pousse un soupir puis me penche pour le ramasser. Une vive douleur me lacère la colonne vertébrale pendant que je me redresse. Outch. Je n'aurais pas dû boire tous ces shots de vodka cul-sec. Me voilà maintenant devant le loft de mes parents avec le dos et les jambes en compote, incapable de trouver la clé qui correspond à la serrure de l'entrée. Ça m'apprendra à abuser de l'alcool. Amuse-toi jusqu'au bout de la nuit, m'a dit Ruby avant de s'enfuir comme une voleuse. Un vrai fiasco. D'ailleurs, cette traite ne paye rien pour attendre. Comment a-t-elle osé me laisser avec...

— Tu as besoin d'aide ?

Le ton taquin de madame Mills résonne derrière moi. Un frisson me chatouille les bras. J'ai froid. Non, je suis gelée. Gelée et brûlante à la fois. Mes yeux se ferment une seconde. Mes deux index exercent de petits ronds sur mes tempes. Inspire, expire. Inspire, expire. Plus ce mantra s'imprègne dans mon esprit, moins j'y crois. Cela ne fonctionne pas. Mes idées partent dans tous les sens et deviennent impossibles à réunir. Il y a trop de choses, trop de pensées, trop de sensations, trop de tout. Et ce tout est si flou qu'il m'empêche d'entendre, de percevoir ou de voir quoi que ce soit.

Je pivote brusquement sur moi-même. Ma tête se met à tourner si fort que ma vue se brouille un instant. Quelle idiote je suis ! Pourquoi n'ai-je pas commandé de l'eau ? Le regard amusé de mon interlocutrice m'apporte la réponse. Mon corps se tend. Mes pupilles s'assombrissent de colère. Chancelante, j'avance dans sa direction. C'est à cause d'elle. Elle est responsable de tout.

— Fichez-moi la paix, grincé-je, les dents serrées, ce n'est pas parce que je vous ai laissé me raccompagner que vous devez en jouer. Ni en profiter pour me tutoyer ; j'ai été assez claire là-dessus.

Nous nous fixons en silence. De longues minutes défilent avant que mon cerveau redémarre. Mes neurones encore présents se réactivent. Mes organes se réveillent un à un. Dès que mes jambes me le permettent, je reporte mon attention sur mon principal problème : réussir à rentrer chez moi. Mes doigts recommencent à triturer mes clés. Au bout d'un moment, je tombe sur la bonne. Enfin. Le bruit du verrou qui s'ouvre est ma bénédiction. Mon pied tape dans la porte d'un geste maladroit. Je jette mon trousseau sur le premier meuble à ma droite puis traverse le salon. Mes pas lourds me ralentissent. Quelqu'un aurait-il mis du plomb dans mes chaussures ? Sans oublier dans ma tête, mon cœur et mes poumons qui pèsent une tonne.

— Vu ton état, c'est préférable. Ce serait dommage que tu abîmes cette si belle silhouette à cause d'un ou deux verres de trop.

Des talons aiguilles foulent le parquet dans mon dos. Mes poings se crispent. Mes ongles griffent l'intérieur de mes paumes. Mes phalanges virent au blanc. Le soulagement qui était prêt à m'envahir disparaît aussitôt. L'agacement ne tarde pas à prendre sa place. Il ne me quitte pas. Il me ronge, m'étouffe, me colle à la peau. Je souffle bruyamment du nez. À trois reprises. Un ricanement discret mais railleur retentit dans la pièce. Je fais volte-face puis la foudroie de mes iris enragés. Elle hausse un sourcil interrogateur. Et pour cause : ce rire moqueur n'était pas le sien. C'était le mien.

— Et tu n'as qu'à arrêter de me vouvoyer aussi, ajoute-t-elle, les bras croisés contre sa poitrine, je n'y verrais aucun inconvénient.

Ma mâchoire tendue refuse de lâcher un mot. Avec un peu de chance, mon absence de réponse la fera fuir. Un peu de chance. C'est plutôt d'un miracle dont j'ai besoin. Madame Mills se rapproche d'une démarche féline. Ma bouche s'assèche. L'effroyable sensualité qui émane d'elle me vide de mon énergie et de mon courage. Ses hanches moulées dans sa robe se balancent avec grâce. Mon sang se glace dans mes veines. Ma respiration se coupe.