Chapitre 32

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Le soleil avait déjà dépassé son zénith depuis plusieurs heures quand Thranduil recroisa enfin le chemin de son amie. Elle passait là, dans l'angle d'un couloir, dans sa grande robe blanche, ignorant la présence du Sinda alors qu'elle venait de poser ses yeux d'émeraude sur lui. Surpris, il resta d'abord immobile, il finit cependant par lui courir après en l'appelant. Elle ne se retourna pas, se contentant d'accélérer le pas en rentrant la tête dans les épaules. Malgré tout, il finit par la rattraper, et, la saisissant par le poignet, il la fit pivoter vers lui pour l'affronter :

- Pouvez-vous m'expliquer ce comportement ? demanda-t-il perdu et légèrement en colère.

Elle ne répondit, dégageant son bras de l'emprise du roi d'un mouvement sec.

- Il n'y a rien à expliquer ! s'exclama-t-elle

- Je pense que si, pourquoi m'éviter ? Hier tout allait pour le mieux alors pourquoi aujourd'hui...

Il ne finit pas sa phrase, sachant très bien qu'elle avait compris le problème.

- Il n'y a rien à expliquer ! répéta-t-elle. Elle voulut repartir mais il la retint par le bras.

- Non ! Je veux connaitre vos raisons. Est-ce à cause de ce qu'il a pu se passer hier soir ?

- Cela me semble plutôt logique.

Elle employait un ton hargneux mais son regard fuyant était au bord des larmes, et elle maintenait une tension permanente dans son bras, preuve que, s'il la lâchait, elle s'enfuirait le plus loin possible. Alors le roi tint bon, ne voulant pas qu'elle s'échappe à nouveau.

- Écoutez... souffla-t-il doucement. Je n'aurais pas dû faire ce...

- Je vous arrête tout de suite, cela n'a rien à voir avec ça !

- Mais alors quoi ?

- À votre avis ? J'aurais pu vous tuer si Arianne n'était pas intervenu !

- Mais ce n'est pas le cas, je suis toujours là et bien en vie ! Pourquoi s'en inquiéter ?

- Pourquoi s'en inquiéter ? Parce que ça recommencera et un beau jour je finirais par vous tuer, pour de bon ! Je ne veux faire ça, je ne veux pas que vous mouriez. Alors si cela signifie m'éloigner je le ferais.

- Et moi je vous l'interdit ! Vous m'aviez promis que vous ne fuirez plus jamais ! Que vous vous sentiez coupable est un fait que vous partiez en est un autre. Restez avec moi, je vous en supplie...

Il se rapprocha d'elle, prenant son visage en coupe tout en contemplant ses grandes prunelles vertes.

- Mais j'ai voulu vous tuer...

Des larmes vinrent perler le long de ses joues qu'il s'empressa d'essuyer de ses pouces.

- Non, ce n'est pas moi que vous vouliez tuer.

- Qu'en savez-vous ?!

D'un mouvement brusque, elle retira les mains du roi et partit le plus vite qu'elle le put, mettant un maximum de distance entre lui et elle. Il ne lui courut pas après, à quoi bon ? Il n'arriverait pas à la raisonner ainsi. Alors, il retourna dans sa chambre, ayant perdu tout désir de faire la moindre chose, il se contenta de se coucher sur son lit, contemplant les épaisses poutres de bois bruns sculptés qui le maintenait. Il aurait voulu hurler de frustration mais aucun son ne serait venu. Il était resté plusieurs heures ainsi, immobile, pensant à sa belle. Est-ce qu'un jour ils pourraient vivre ensemble sans que son ancien et défunt mari ne vienne s'interposer ? Il l'espérait de tout son cœur mais les Valar semblaient en avoir décidé autrement.

Cela faisait maintenant deux mois que Thranduil et Insha avait eu leur altercation dans ce couloir. Cela faisait deux mois qu'ils ne s'étaient pas adressé la parole, deux mois qu'elle l'évitait. Le Seigneur de Vertbois faisait comme si de rien était, comme si cette situation ne l'affectait pas mais au fond de lui, il était blessé et triste. Legolas avait supplié Arianne de parler à sa sœur mais elle avait catégoriquement refusé de se mêler à cette histoire, malgré tout, elle lui glissait régulièrement quelques mots à ce sujet, espérant qu'elle comprenne que ce qui s'était passé cette nuit là était nullement de sa faute, elle n'aurait jamais essayé de s'en prendre à Thranduil si elle n'avait pas été sous l'effet de cette hallucination. Elle aussi souffrait de cette distance qu'elle s'imposait, elle souffrait tout autant que le roi mais la culpabilité et la peur l'empêchaient de faire le premier pas pour retourner le voir. Et de toute manière, elle était bien trop effrayée par le risque de le blesser pour se risquer à une telle chose. Alors, elle faisait de son mieux pour l'ignorer même si, au fond elle, elle savait très bien qu'elle se faisait autant de mal à elle qu'à lui.

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