Chapitre 2

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 Complètement hagarde face au paparazzi effondré au sol, la tête de Jenifer commence à tourner. Ou bien le monde tourne autour d'elle. Elle ne sait plus trop. Tout est flou. Elle fait quelques pas en arrière. Cependant, cette maigre distance ne suffit pas. Elle déglutit difficilement en espérant faire passer la vague qui la submerge mais sa respiration s'emballe et lui fait presque perdre l'équilibre.

Les images du casque qui s'envole contre la tête du jeune homme se bousculent devant ses yeux, en même temps que celles de son corps qui emporte le scooter dans sa chute. Elle ne sait même pas si c'est sa main à elle qui tient le casque ou celle d'un inconnu qui s'est glissé là sans qu'elle ne s'en rende compte. Peut-être qu'elle a imaginé tout ça.

Elle réentend la voix de cet homme, son rire, qui monte, de plus en plus terrifiant. De plus en plus fort. Et en même temps, une voix inconnue dans sa tête ne cesse de lui demander ce qu'elle fait. Pourquoi elle à fait ça...

Ni la voix, ni le paparazzi ne veulent se taire. Elle ne distingue même plus le bruit de la circulation. Elle ne voit plus aucun des passants qui s'étaient attardés près de la dispute. Juste sa main qui vole. Et ce corps qui tombe

Et un énorme bourdonnement s'ajoute à cette cacophonie. Un bourdonnement si intense qu'il la fait trembler.

Sa main crispée échappe alors le casque qu'elle tenait toujours et il semble tomber au ralenti. Il lui faut ce qui lui paraissent être plusieurs minutes complètes pour s'écraser au sol. Mais le bruit qu'il fait l'atteignant est fracassant.

En un sursaut, la réalité la rattrape et comme pour s'en protéger, Jen monte ses mains à sa tête. De toutes ses forces, elle bouche ses oreilles.

Et continue de reculer. Elle ne peut pas rester là. Elle ne veut plus le voir. Elle ne veut plus voir les éclats du phare dispersé sur la chaussée. Elle ne veut plus voir ce sang qui crée une auréole par terre. Ni même les yeux clos de cet homme, qui la fixait si durement une éternité plus tôt.

Incapable de réflechir avec cohérence, son instinct le plus primitif, celui de la survie lui dit de fuir.

Toujours les mains plaquées sur ses tempes, elle se grifferait presque le crâne. Elle s'arrache une poignée de cheveux et se met à courir entre les silhouettes attroupées. Personne n'essaye d'entraver son chemin. Sous l'effet du choc, elle donne l'impression de n'être qu'un esprit errant, malade et dangereux.

Sans même savoir quelle direction elle prend, elle court. Ses grandes enjambées avalent les mètres, puis bientôt les kilomètres qui la séparent de ses actes.

Certaines personnes se retournent sur son passage, n'ayant aucune idée de pourquoi cette femme traverse la ville à toute allure. Ils la dévisagent, sentant que quelque chose d'étrange se trame. Certains la reconnaissent même, sans pour autant avoir le temps de vraiment réaliser qui elle est. Elle a déjà filé une paire de rues plus loin. Et de toute façon, ça serait inutile de la stopper. Elle serait incapable de répondre aux demandes les plus simples.

Petit à petit, elle croise de moins en moins de monde sur son chemin. Les rues sont de plus en plus désertes. Ce vide lui inspire un peu de sécurité. Ses sens ne sont plus saturés par les messages dans lesquels son esprit tente de la noyer. Par ce que son cerveau veut lui faire comprendre. Ses émotions s'estompent petit à petit et le flot d'informations se régule.

Dans sa tête, les images se sont calmées, elles aussi. Ça tourne de moins en moins vite et ses yeux perçoivent, peu à peu, son environnement. Elle ne le voit plus. Ses yeux ne sont plus là. Le bruit métallique du scooter qui s'écrase au sol ne la hante plus. Elle n'est même plus certaine d'avoir touché à cet homme.

La CavaleOnde histórias criam vida. Descubra agora