Chapitre 13

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4 mois plus tard.

La cloche carillonna joyeusement lorsque Adèle poussa la porte de la boulangerie. Immédiatement, l'odeur savoureuse des croissants chauds et du café l'enroba, la chaleur de la pièce était réconfortante après le froid qui régnait à l'extérieur. La jeune fille se sentit incroyablement bien, un sourire se dessina sur ses lèvres sans même qu'elle ne s'en rende compte. Dans son dos, Leïla entra, les yeux grands ouverts. C'était la première fois qu'elle venait, Adèle avait enfin réussi à l'emmener, après des semaines de tentatives vaines. La jeune brune regarda avec amusement Leïla tourner sur elle-même en observant la décoration sobre et à la fois antique de bois et de dentelle, puis saliver devant la vitrine où s'étendaient, prêts à être servis, les croissants et les pains aux chocolats, les Paris-Brest et les chouquettes, et de l'autre côté les mille-feuilles et les éclairs colorés, et plus au fond encore il y avait les tartelettes au citron meringué, les religieuses et les macarons.

Adèle ne se rendit compte qu'elle était, elle aussi, perdue dans la contemplation des gourmandises, qu'au moment où Leïla lui donna un léger coup de coude.

- J'ai envie de tout prendre, murmura la jeune fille.

Adèle approuva par un sourire. Elle se sentait si bien. Un mouvement derrière le comptoir lui fit relever la tête. Un jeune homme sortait de l'arrière-boutique. Les boucles brunes en bataille, le sourire éclatant et les yeux pétillants, il s'avançait vers elle. Le temps s'arrêta autour d'elle, Leïla et les pâtisseries disparurent, il ne restait plus que lui, et ses yeux si particuliers posés sur elle, ses yeux couleur café.

Sans même réfléchir, Adèle se précipita derrière le comptoir et se jeta dans les bras du jeune homme. À cet instant, son cœur allait exploser d'allégresse, elle voulait prononcer un millier de mots, mais l'émotion lui nouait la langue et seules des larmes de joie coulaient le long de ses joues.

Au bout d'un long moment, Bastien défit leur étreinte, et avec un léger sourire, il essuya du bout des doigts les joues humides de la brune. Adèle ouvrit la bouche pour parler, mais elle ne sut pas quoi dire. Après tout ce temps, des jours et des mois d'absence, voilà qu'il était là, devant elle, enfin.

- Je ne te laisserai plus jamais partir, dit-elle enfin.

Bastien éclata de rire, un rire clair et joyeux, qui sembla résonner tout autour d'eux. L'écho continua de déformer le son, qui peu à peu se transforma en une répétition distordue et informe. Le bruit devint bien trop bruyant et présent pour que la jeune fille ne puisse l'ignorer. Elle essaya de fixer son attention sur Bastien, mais celui-ci n'était même plus là. Paniquée et pratiquement sourde de ce bruit qui emplissait l'espace, Adèle tenta de l'appeler, mais une fois encore, elle se retrouvait muette. Une ombre froide s'abattit soudain sur la jeune fille, une encre noire qui glissa lentement sur tout ce qui l'entourait. Il n'y eut plus rien, que ce noir insondable et ce bruit incessant.

- Bastien..., murmura Adèle.

Le mot ne parut même pas franchir ses lèvres. La jeune fille se sentit faible, seule et le noir autour d'elle l'étouffait de plus en plus. Où était Bastien ? Que faisait-il ? Pourquoi n'était-il pas là ?

- Bastien... répéta Adèle.

Prononcé un peu plus fort cette fois-ci. Il fallait qu'il l'entende, il fallait qu'il vienne l'aider. Tout était noir et froid. Le corps gelé, Adèle se rendit compte qu'elle ne pouvait même plus bouger. Le bruit autour d'elle persistait, elle avait l'impression de l'entendre dans son corps. Où était-ce son cœur qui battait bien trop vite ? Le bruit s'intensifia encore, et encore. Quelqu'un cria, ou peut-être était-ce elle ? Elle ne le savait pas, elle ne pouvait même plus s'entendre. Le cri grandit, en fond du bourdonnement infini, jusqu'à le surpasser, aigu, tranchant, un long cri d'agonie.

Adèle se releva d'un coup, le cœur battant la chamade et la respiration saccadée. De lourdes gouttes de sueur glissèrent le long de son front, sur ses joues et son corps tremblait. Il n'y avait plus aucun cri, ni aucun bourdonnement, à vrai dire, il n'y avait plus aucun son. Le calme et le silence de sa chambre contrastaient étrangement avec l'agitation qui l'habitait. Il fallut plusieurs minutes à la jeune femme pour se calmer, se rendre compte qu'elle était en sécurité, saine et sauve. Seule dans sa chambre. Le corps encore tremblant, Adèle se recroquevilla contre ses oreillers, cherchant à se réchauffer. Ce ne fut qu'après un long moment qu'elle se rendit compte qu'elle était toujours en train de pleurer.

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