[ 7 ] Coffre fort, éveil et nacre

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[ Banque centrale de la Fédération de Russie, Moscou, district Central, Russie,
17 Avril 20**,
09H29, heure locale ]

Privet ! dis-je à l'hôte d'accueil. Nous voulons ouvrir le coffre numéro 333.

L'homme en costume cravate noir nous juge, tout à tour : Katinka qui se lime encore les ongles en silence, Alysse et sa sucette qui ne comprennent rien à ce que je baragouine en russe, puis moi et les valises qui assombrissent mes yeux. Finalement, j'ai très mal dormi entre les sièges d'avions et les escales interminables...

— Privet. Vous avez vos papiers d'identité et la clef ? questionne-t-il en tapant sur son clavier d'ordinateur.

Il est bavard, lui, dites donc.

Ses yeux s'agrandissent légèrement. Certainement parce qu'il lit l'ancien nom de la propriétaire de ce coffre – Svetlana Aslana – et le montant estimé de la fortune familiale.

— Alors, les papiers, oui, dis-je en lui donnant ma vieille carte d'identité mentionnant ma double nationalité. La clef par contre... il se pourrait qu'elle ait disparu.

Les yeux de l'homme effectue des va-et-vient d'authentification entre ma photo d'identité et moi, mais son sourcil se hausse lorsque je termine ma phrase.

— Sans la clef du coffre, je ne peux rien pour vous.
— Mais vous voyez bien que c'est moi ! Je suis la petite-fille de Svetlana Aslana ! La ressemblance est pourtant flagrante, quoi ! m'emporté-je en pointant mon visage et l'ordinateur de l'hôte. J'ai hérité de cette clef, mais elle a disparu ! Je dois savoir ce qui se trouve dans ce coffre !

L'homme en costume jette des coups d'œil alentour, mal à l'aise, quand il me fait signe de m'apaiser. J'ai conscience d'attirer les regards et quelques chuchotis vers notre groupe, d'autant que mon accent russe n'est pas aussi parfait que j'aimerais le croire. J'ai un peu perdu à force de ne pas pratiquer régulièrement... Mais si pousser une gueulante est ce qu'il faut pour avoir accès à ce qui m'appartient, soit. Je vais m'en donner à cœur joie.

— Il est, en effet, fait mention dans le dossier que le coffre 333 a fait l'objet d'une clause testamentaire, et je veux bien croire votre carte d'identité, mais sans clef, rien ne peut être ouvert.
— Pourtant, il existe un double. Un seul, intervient Katinka. Celui que vous gardez précieusement ici, dans la banque, en cas de force majeure. C'est dans la clause, là, précise-t-elle en pointant un paragraphe du règlement de la Banque centrale de la Fédération de Russie soigneusement surligné en bleu.

Je pense à jeter un coup d'œil à Alysse. Elle nous observe tous les trois, perdue mais comprenant quand même qu'il y a un problème si j'en crois son front inquiet et son pauvre bâton de sucette qu'elle mordille avec vigueur.

— Voilà ! C'est un cas de force majeure !
— Quelqu'un est en danger de mort imminente ?
— Euh... Ça se pourrait bien ?

L'hôte d'accueil secoue la tête en soupirant.

Il commence à me plaire, lui.

Déjà que nous avons été obligées d'être patientes, puisque les vols Victoria-Moscou, ça court pas les rues, même à l'aéroport international de Victoria, que nous avons passé plus de vingt-huit heures en vol avec deux escales, le tout avec un jet lag de bien onze heures dans la gueule, ce qui nous donne la sensation qu'il est actuellement vingt-deux heures et non neuf heures et des poussières. Si en plus on nous empêche de récupérer ce qui nous revient de droit... je vais en tarter un.

— Navré, mais nous ne pouvons pas ouvrir ce coffre aussi facilement. Il fait partie de ceux placés sous haute sécurité. Vous pouvez toujours faire une demande à ma hiérarchie, mais cela vous prendra certainement plusieurs mois. Soit vous retrouvez cette clef, soit vous remplissez ce dossier, dit-il en me tendant une épaisse pile de polycopiés.

TRINITY - Tome 3 : Rencontre du troisième typeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant