14 Passe d'armes

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Voici un nouveau chapitre des aventures d'Océane. J'espère qu'il vous divertira et vous distraira un peu du quotidien qui fait tout sauf rêver.

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On était le jour des étoiles aujourd'hui et c'était le premier jour d'une nouvelle semaine ; une semaine de six jours. Océane trouvait bizarre de ne pas commencer par le lundi, jour de la lune mais on était chez les elfes, qui se sont éveillés à la lumière des étoiles, se souvenait-elle. D'où leur éclat dans les yeux, particulièrement évident dans ceux de Galadriel ou de Celeborn, estimait-elle. Elle ne savait pas pourquoi elle se rappelait cela tandis qu'elle traînait derrière elle le « seau beurk », comme elle l'avait surnommé. Peut-être pour contrebalancer. Elle devait vider son contenu dans une sorte de charrette, stationnée au sol dans un coin discret. Cette collecte servait de fumier pour enrichir la terre et bonifier les récoltes de ce qui poussait pour les fruits et légumes ou les fleurs d'ornement. Lorsqu'Orophin lui avait montré l'endroit, la semaine dernière, elle s'était demandé pourquoi il l'avait emmenée dans un lieu si trivial.

Aussi, ce matin avant de partir pour son cours de sindarin, il lui avait demandé d'évacuer le seau qui recueillait leurs besoins dans la petite pièce servant de toilettes. « Eh, ben !, pensa-t-elle, qu'elle merveilleuse idée j'ai eu en y coulant un dernier « bronze » ce matin ! C'est dommage que mon transit pouvait plus attendre !» Il fallait, en plus, qu'elle lave le seau avant de le ramener et le remettre à sa place. Berk ! Elle devait aussi reconstituer le stock de senteurs, ainsi que celui des feuilles faisant office de papier toilette. Océane avait été un peu étonnée la première fois qu'elle avait réalisé à quoi celles-ci servaient mais vu leur nombre à disposition, elle s'était dit que ça tombait sous le sens. L'enchantement des lieux l'affranchissait de son addiction au tabac mais pas de ce besoin basique et naturel auquel les elfes eux-mêmes n'échappaient pas. Les deux sacs qu'Orophin lui avait donné à remplir la gênaient. Elle finit par les mettre en bandoulière. Et puis elle avait toujours mal aux muscles. Le massage l'avait soulagé sur le moment, hier soir, mais ce matin elle avait l'impression qu'elle en payait le prix. Orophin ne pouvait-il pas tenir compte de sa douleur pour l'épargner ? « Mon prince se transforme en marâtre exigeant des travaux d'entretien digne de Cendrillon », soupirait-elle. Elle se méfiera la prochaine fois qu'on lui enseignera des mots dont le champ lexical appartient à la famille des travaux de nettoyage, du rangement et autres corvées. Elle devrait peut-être faire des efforts pour retenir le moins possible ce genre de mots afin de décourager les elfes de la charger de travail. Ça pourrait peut-être marcher...

Elle atteignit la dernière marche d'un escalier menant au sol, chargée de l'encombrant seau que maintenant elle portait devant elle pour plus de commodité, lorsqu'elle se trouva presque nez-à-nez avec un elfe en arme. Il s'était arrêté, délibérément, attendant qu'elle passe devant lui son seau plein en main. Le regard qu'il jeta à Océane heurta celle-ci. C'était un mélange de dégoût et de désapprobation. Elle fut soudain mortifiée de se promener avec un tel bagage en main et se sentit honteuse par la nature avilissante de sa tâche. Si elle avait pu, elle se serait rendue invisible, ou aurait modifié la ligne temporelle pour passer à un autre moment, avant ou après.

C'est alors qu'elle le reconnut. C'était Delyndil ! Le « garde imbécile » qui l'avait dénoncée et fait enfermer ! Elle regretta que le seau soit si lourd. Un instant, elle eut le désir fugace de lui balancer son contenu à la tête. La nuit qu'elle avait passé en prison à cause de cet enfoiré ! « Pas trop déçu que je sois traitée comme une invitée et non en paria, le soudard ?! », se vengeait-elle en pensée en se redressant. Elle lui passa fièrement devant, comme si son seau était devenu un panier précieux. C'était bien dommage de ne pas pouvoir se faire comprendre ; elle lui aurait bien dit deux ou trois choses. Et de quel droit il la jugeait ? Il doit bien l'évacuer parfois, le seau, après avoir contribué à le remplir, non ? 

Egarée en Terre du MilieuWhere stories live. Discover now