2. Rêve

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  Des yeux. Deux yeux vairons, comme les miens vus dans un miroir. Le gauche était bleu et le droit brun. Ils me regardaient avec une telle intensité! 

  Je fixais les pupilles d'un noir de jais, me concentrant sur leurs contours pour tenter d'y déceler une émotion, une idée. Elles reflétaient un certain étonnement, comme un reflet des miens qui transmettaient sûrement ce même sentiment.

  Une brume bleue entourait ces deux yeux, sorte de brouillard d'une étrange épaisseur, presque sirupeux. Une étrange sensation de froid m'envahit, comme si je me trouvais sous l'eau, et qu'elle s'infiltrait dans mes vêtements, glaçant chaque parcelle de ma peau.

  Soudain, tout disparu et je me retrouvais dans la mer, ou l'océan peut-être. Autour de moi, une eau brune obstruait ma vision. J'avais l'impression qu'elle s'insinuait dans mon corps par mon nez et ma bouche. Elle pénétrait dans mes poumons et je la sentais prendre la place de l'air, provoquant peu à peu mon asphyxie. 

  Je voulu crier, remonter à la surface mais j'étais comme paralysée. Je ne parvenais à bouger ni mes bras ni mes jambes.

  Alors que la folie allait m'emporter, je sentis quelque chose effleurer mon épaule droite. Je voulu faire volte face mais je ne pouvais plus me mouvoir.

  Ma frayeur augmenta encore lorsque je sentis quelque chose de gluant s'accrocher à mon dos. Une déchargé électrique me traversa de part en part, convulsant mon corps comme un chiffon agité par le vent.

  Je sentis que la mort allait m'emporter et ma dernière vision fut horrifiante.

  Des centaines de méduses accrochaient leurs tentacules à mon corps, meurtrissant à chaque fois un peu plus ma peau. Alors qu'un dernier animal gélatineux s'approchait de mon visage pour venir s'y fixer, un dernier éclair écarlate obstrua ma vision avant de céder place au noir de jais de la mort.

  Mes yeux s'ouvrirent dans un sursaut et je me redressais d'un bond pour atteindre l'interrupteur qui allumait le plafonnier. J'étais dans mon lit (qui n'était en fait qu'un matelas étendu sur le sol de terre battue de ma cabane). Je me rendis soudain compte que j'étais en train de hurler. Je me tus de suite, craignant de réveiller les voisins.

  Je tentais de reprendre mes esprits, essuyant mon front couvert de sueur du revers de ma manche. Ces rêves ne me laisseraient donc jamais tranquille! Je soupirais en remarquant à travers les carreaux sales, les premières lueurs de l'aube.

 Me résignant à supporter la fatigue, je décidais de me lever.

La révolution des médusesWhere stories live. Discover now